LES MOTS NE SONT PAS DE FAUX-BILLETS
Les mots ne sont pas de faux-billets.
Vous me demandez d’offrir des fleurs, des couronnes et des excuses
Pour ceux qui sont morts
Quand je n’étais pas née
Pour ceux qui ont souffert
A des milliers de kilomètres
De l’endroit où je ne me sens plus chez moi
Vous me demandez de marcher sur des braises
A cause des allures, des fautes, des prétentions
De gens que je ne connais pas
Notre seul point commun
C’est d’être sorti d’un ventre
La même année, le même mois.
Je crois que l’intelligence est un muscle
Qui peut briser des nuques, des phalanges
Et du béton
Actuellement, je ne suis pas en mesure
De me coucher aux pattes
D’un chien endormi
Je ne peux pas respecter des images, des discours, des assemblées
Qui ne sont pas respectables.
Qui va me demander pardon pour les promesses que vous n’avez pas tenues ?
Pour les hommes bien habillés incapables de s’écouter hurler dans les amphithéâtres officiels ?
Qui va venir s’excuser pour les pétasses siliconées
Imposées, réunies, ligotées
Au centre de l’arène
Avec une pancarte « exemple à suivre »
Clouée sur la cervelle ?
Qui va me demander pardon pour les hôpitaux sans lumières
Où aucun adolescent ne devrait jamais passer
De vacances particulières ?
L’avenir était une auréole, un jardin sans clôtures où nous devions laisser nos traces.
Aujourd’hui le futur n’est plus qu’un paradis perdu que les orages menacent.
Les cadenas de mes bronches sont intacts
J’ai jeté la clé aux crocodiles des paradis fiscaux.
Je ne vous ne veux pas.
Je vous déteste
Pour avoir créé du vide
Et crucifié le beau.