L’idée me vint alors que j’entrais dans les toi­lettes du ciné­ma UGC Ciné Cité Les Halles :
J’allais écrire le par­ti pris des marques.
Je com­mence par les tubes de pâte dentifrice.
Leur façon toute par­ti­c­ulière de ne pas se vider en entier de leur pâte.
De telle sorte qu’il en restât tou­jours un peu,
Tassée au fond du tube,
De la pâte à jamais perdue
Pour le brossage de mes dents
Pâte payée
Pâte peine perdue
Tu appuies sur le tube, il se tord comme de la guimauve, se plie à ta volonté.
C’est une lopette, ce tube.
Mais rien ne sort pour autant.
Pâte payée per­due à jamais.
Ô pâte, sors du tube !
Mais c’est non
Rien ne sort
Du tube.
De telle sorte que je fusse obligé de rachetass­er un tube
Avant qu’icelui en ma pos­ses­sion ne soit vidé de toute sa pâte
De telle sorte que je con­som­mas­sasse davantage
Plus vite et meilleur ce serait
Voilà com­ment l’idée m’est venue
Alors que je ten­tais vainement
De dérouler le papi­er hygiénique coincé autour de son axe
Inac­ces­si­ble papi­er à cul de chiottes
Col­lé à son axe comme une tique sur le cou de la vache
Saloperie !
C’est voulu !
Va t’en essuy­er ton cul
Avec ça
Qui reste col­lé à son rouleau
Sur lequel rien n’est écrit, allez va.
De telle sorte qu’un plaisantin
Pour sûr un excité
Fra­cassâ­tasse le blanc cylin­dre de métal qui con­te­nait le rouleau
Pour avoir accès audit rouleau
Dans les toi­lettes du ciné­ma UGC Ciné Cité Les Halles
Un après-midi amer
Où j’avais soif
Où j’avais faim de vérité
Qui fût contemporaine

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