Carthage bleuissait au fronton des colonnes
Et les marbres se miraient dans l’onyx du ciel,
La paix pliait sa toge et ses yeux anémone
Sur la blonde Byrsa versaient leur mauve miel.
Là-bas à l’horizon non loin des lys romains,
Tanit, la grande Tanit, Tanit la mystérieuse,
La fleur des nuits puniques et des amours radieuses
Cédait à l’astre d’or son sceptre sibyllin.
La brise se balançait aux branches des sycomores
Et la mer s’agenouillait aux pieds du sable d’or,
Les prêtres de Baal offraient de l’ellébore
Au Dieu des rêves purs et de la blanche mort.
L’ineffable Didon à Carthage s’enivrait
Des parfums odorants de ces fiers asphodèles,
Et sur le temple divin, étendant sa clarté,
L’ombre d’Hannibal se faisait immortelle.
Mais l’air était si doux que les maisons s’ouvraient
Près des figuiers foncés et des palmiers prospères,
Et les sandales glissaient le long des cours pavées
Hantées par des colombes en habit de lumière.
Le silence planait au-dessus des remparts
Et les cendres du tophet s’effaçaient des portiques,
Les navires s’évadaient sur les eaux hiératiques,
Et Carthage s’endormait dans les bras de Melkart.
Poème extrait d’Alchimie