la nuit parle
des mondes qui tombent
et s’entrechoquent
pourtant les verbes dorment
planètes autour desquelles gravitent les phrases
comment puis-je dire alors
que je n’ai rien à dire
de plus beau
que le silence d’un visage
*
l’amour a le goût clandestin de la nuit
nébuleux et secret
tant de soleils craintifs
voltigent au loin comme des lucioles
les anneaux de Saturne tintent froids
aux poignets des amants
ils dorment
les mains dans des rivières d’étoiles
leurs doigts ne démêleront jamais les
eaux rebelles de leurs songes
*
la lune soudain
écarquillée
nous cloue dans sa lumière
ton corps se fige
sur le lit
brutalement étranger
honte
regret
ton cœur se glace
le mien je sais
ne bat plus dans ta poitrine
*
réveil au vitriol
ô ce brusque sursaut de nos sens
où l’amour se suicide
mire-toi
fixe encore mon regard cristallin
avant d’y lire l’absence
avant que la beauté
– brûlure acide –
ne me déchire les yeux
*
les mots vont
viennent
navettes de l’esprit
tissent
entre les choses
le voile de la connaissance
ce voile si fin que le poème déchire
lacère
d’images acérées
il n’en laisse plus que des lambeaux de sens
des idées décousues
offrant la nudité du monde
brutale
splendide au regard qui s’éveille
sans verbe
au pur langage de l’étreinte