La neige neige son pas de lenteur
den­sité blanche, halo de vide
étrange­ment accordé au mystère
— du corps con­tre l’invisible
voix  par­faite de la voix se mesure
à la source fleurie de l’hiver
se mesure à ce qui la ramène au souffle
engen­drant le monde

dans ta bouche

il neige des enfances de mots
des rêves qui fondent au cœur du temps
la neige les appelle sans les nommer
touch­er forme, touch­er sons
l’indicible parole de celle qui veille
sur la mon­tagne enveloppe
égare, mène son jeu 
aux tables de la présence
aux tables de l’absence
une légèreté qui n’existe pas

boule­verse tout , la neige
brûle sans le savoir
flamme au-dedans meurt et renaît
le corps l’éprouve, la traverse
met au monde le floconnement
— jardin trop loin­tain pour l’habiter
se dépose et me fait
grand froid dans la poitrine
du blanc sur du rouge
pas de réponse à la ques­tion de la vie
juste le recou­vre­ment et  la transmutation
l’agrandissement
à la mesure de ce qui s’absente en nous

la neige neige

ouvrant nos yeux de con­stant éveil
les lie au ciel
qui sans cesse nous échappe
monde céleste et ter­restre dans l’éphémère
la marche de l’hiver en nous
est sans illusions
agi­ta­tion, angoisse,  agonie
mais que tombe la mort
comme tombe la neige
avec cette légèreté
qui nous est scellée.

image_pdfimage_print