C’est avec une vive émotion que nous apprenons le décès de Jean Migrenne, disparu le 15 janvier. Il était notre collaborateur depuis 2017.
Il nous a offert un feuilleton regulier, Un américain à Séville, extraits de l’œuvre du poète américain David George, expatrié en Espagne, ainsi que des articles et traductions.
Régulièrement publié dans Siècle 21, Europe, Le Frisson Esthétique,Peut-être et (en ligne) Temporel, Recours au poème, Jean Migrenne a fait éditer l’essentiel de l’œuvre poétique de Richard Wilbur ; la traduction française commentée de la Démonologie de Jacques Stuart, Roi d’Écosse et d’Angleterre, accompagnée des Nouvelles d’Écosse relatant une affaire de sorcellerie (1590) qui inspira Shakespeare ; la première traduction française de The Discovery of Witchcraft, de Reginald Scot, 1584, édition critique en collaboration avec Pierre Kapitaniak.
Il a traduit plusieurs recueils de poètes contemporains dont Stephen Spender, Seamus Hogan, James Emmanuel, Henry Taylor et Rita Dove une des grandes poétesse afro-américaine, Richard Wilbur, et Marilyn Hacker qui lui rend hommage dans Poezibao.
Nous prenons part à la douleur de sa famille et de ses amis, et nous leur présentons nos plus sincères condoléances.
Nous aimerions pour accompagner son départ lui offrir à notre tour ce poème de Dylan Thomas qu’il avait traduit pour Recours au poème en fin d’année dernière, Do not go gentle into that good night. Avec notre immense gratitude, cher Jean Migrenne.
Do not go gentle into that good night,
Old age should burn and rave at close of day;
Rage, rage against the dying of the light.
Though wise men at their end know dark is right,
Because their words had forked no lightning they
Do not go gentle into that good night.
Good men, the last wave by, crying how bright
Their frail deeds might have danced in a green bay,
Rage, rage against the dying of the light.
Wild men who caught and sang the sun in flight,
And learn, too late, they grieved it on its way,
Do not go gentle into that good night.
Grave men, near death, who see with blinding sight
Blind eyes could blaze like meteors and be gay,
Rage, rage against the dying of the light.
And you, my father, there on that sad height,
Curse, bless me now with your fierce tears, I pray.
Do not go gentle into that good night.
Rage, rage against the dying of the light.
In In Country Sleep, éd. New Directions, New York, 1952.
Ne va pas sans fureur au repos de la nuit
Ne va pas sans fureur au repos de la nuit,
L’âge doit s’embraser quand s’éteint la lumière ;
Rage, révolte-toi contre un jour qui périt.
Le sage au trépas trouvant raison malgré lui,
Qui n’a vu de ses mots jaillir le moindre éclair,
Ne va pas sans fureur au repos de la nuit.
L’honnête homme, à l’adieu des flots, pleurant son fruit
Fragile et beau dont n’a joué nul golfe vert,
Se révolte et rage contre un jour qui périt.
Le barde fou, pêcheur de l’astre qui s’enfuit,
Découvrant trop tard que ses chants l’importunèrent,
Ne va pas sans fureur au repos de la nuit.
L’homme austère, à sa fin, lorsqu’il voit, ébloui,
Qu’aveugle l’œil fulgure sans être sévère,
Se révolte et rage contre un jour qui périt.
Et toi, mon père, au triste sommet, je t’en prie,
Maudis-moi, bénis-moi, de tes larmes amères.
Ne va pas sans fureur au repos de la nuit.
Rage, révolte-toi contre un jour qui périt.