Pour tromper l’angoisse, noyer l’ennui, retrouver virtuellement les amis qu’on ne pouvait plus rencontrer dans les lieux habituels durant le confinement, la page facebook des “Jeudis des Mots” avait proposé à ses lecteurs d’écrire des textes brefs, à partir de photos qui étaient renouvelées chaque semaine, ou bien à partir des textes déjà parus sur la page, avec des consignes variées.
Ces textes ont été lus lors de la dernière rencontre, à Nice, à la fin du confinement, et Recours au Poème - partenaire de ces rencontres, ainsi que les éditions Pourquoi viens-tu si tard? et la revue Cairns - s’est engagée à en publier une sélection dans son numéro spécial “haïkus et textes brefs” de rentrée. C’est avec plaisir que nous vous les proposons, en remerciant encore les poètes qui ont animé nos pages durant cette étrange période.
Sur deux photos de Marco Baschieri
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Il t’arrive
De tellement souffrir
Qu’il te paraît
Inutile
De mourir.
Lèvres serrées
Convulsivement
Il ne répondra pas,
L’enfant.
Dominique Ottavi
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Quand
sur la page blanche apparaissent les mots
sur ma plage noire les maux disparaissent .
Frédéric Erbs
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Tout est prêt
Pour un départ arrivée
Même la lumière est immobile
CeeJay.
Sur les photos de Franck Berthoux et Marilyne Bertoncini
Fleurs pierres plantes
macadam Entente cordiale
Que serait la Terre sans nous
Seul sur mon balcon
Devant la nuit silencieuse
Un verre de vin à la main
Franck Berthoux
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Depuis le mur
Envolée jaune bleu
Pointillée de mésange.
Joëlle Petillot
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Une feuille tombe dans le jardin
Toujours le même bleu
Aucune durée ne tient debout
La nuit ne dit plus rien
Une porte bat pourtant
Je frissonne
Il ne sait pas qu’il va tomber
Le promeneur de la berge
Le jour vibre si mal
Dominique Boudou
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photo Franck Berthoux
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photo Marilyne Bertoncini
Le chemin empierré
La lumière l’aborde
Le soleil l’attendrit
Annie Wallois
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dans la rue déserte
l’écho de mes pas furtifs
le merle s’en moque
Francis Carpentier
de plumes et d’ailes
pareille aux fleurs sauvages
une résistance
Emmanuelle Sarrouy Noguès
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J’ai déposé ma vie
Sur le petit sentier
J’apprends à respirer
Tatiana Gerkens
Sur deux photos de Paolo Briganti et Rémi Tournier
La nuit n’en mène pas large sous les toits.
Le silence vibre si mal dans les chambres.
Un secret pourtant sera livré
Quand les solives se seront plaintes.
Dominique Boudou
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Parfois j’entre dans une image
Elle me happe
L’outre-mer vibrant m’écrase
La splendeur d’un ciel n’ôte rien de sa menace
Comme une immense toile qui poche Gonflée
Ce qui pèse au-dessus est mon destin
Peut-être.
Narki Nal
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Nous escaladons
ce que nous pouvons
pour un moment de grâce
qui échappe
Gardons au cœur
la distance
− le goût des échelles
qui a toujours raison.
Marilyse Leroux
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photo Paolo Briganti
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photo Rémi Tournier
Que le ciel roule
Comme un grand océan
Ses nuages de laine sombre
Nous nous réveillerons
Dans une lumière nouvelle
Octave Castada
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Le bruit des pages et du vent
qui n’exige aucune réponse
Ciel bleu jusqu’au sol
Sophie Brassart
Sur deux photos de Rémi Tournier et Giovanni Greci
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photo Giovanni Greci
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photo Rémi Tournier
Le ciel qu’on imagine
Est un rêve sinueux et concret.
Lignes jamais tracées
Le parcourent peut-être.
Envie, surface, texture à réinventer.
Miguel Angel Real
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Les nuages sont moins blessants que les fleurs
de barbelés
Mon sang aérien
ne pousse que sur la liberté,
nourri au vent
des voix sans frontière
Thierry Mathiasin
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Et peut-être là-bas
de l’au-delà du rêve
parviennent les messages
de ceux qu’on a aimés
Combien de déchirures avec chaque départ -
cœur lacéré emprisonné par tous les liens
barbelés du souvenir
Marilyne Bertoncini
Détournement et ricochets : sur deux compositions de Flora et de Patrick Joquel
Chercher l’échappée
Jusqu’aprés les hérésies
Toucher la lumière
Michel Thomas Vieulle
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Chercher l’échappée
dans le dédale estampillé
D’étoiles
D’un regard partagé
Carole Mesrobian
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Le pas de côté
Poésie d’éternité
Rencontres masquées
Sandi Dard
*l
le pas de côté
pour regarder ce qui s’en va
sous un ciel meilleur
l’horizon en point de mire
que dire, que faire
pour un instant le retenir
Christophe Sanchez
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Le pas de côté
Nullement le point de fuite
l’embellie juste.
Dominique Ottavi
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le pas de côté
comme le fou sur l’échiquier -
le faux démasqué
Marilyne Bertoncini
Voir la vie en zèbre
La pluie barre les fenêtres
Souvenirs masqués
Sandi Dard
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La pluie barre les fenêtres
il compte les heures versées
Le temps se retourne
Alexia Aubert
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Le temps se retourne
Sur nos ivresses partagées
Il rêve nos alcools
Michel Thomas Vieulle
Le temps se retourne
Sur nos ivresses partagées
Il rêve nos alcools
Michel Thomas Vieulle
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Il rêve nos alcools
N’a plus de pétales
Souvenirs d’un hiver
Alexia Aubert
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Le temps se retourne
le fantôme des cerisiers
n’a plus de pétales
Marilyne Bertoncini
Sur un poème d’Abbas Kiarostami
Le vantail de l’aurore
S’ouvre sur l’horizon
Son parfum d’imaginaire
À perte de vue
Le temps d’un soupir
Défaire les agrafes
De nos élans astraux
Et n’être plus qu’éclipse
Le temps d’un soupir
Devant le soleil
Mon ivresse en libation
Un oiseau s’envole
Michel Thomas Vieulle
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Midi : me voici seule
devant le soleil
à épeler ma part de jour.
Marilyse Leroux
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Saadi, Abbas Kiarostami, poèmes traduits du persan par Amin Kamranzadeh, Franck Merger et Niloufar Sadighi, éd. Po&Psy, ERES, 2020.
avec ma lune
entouré de silence:
deux privilèges.
Miguel Angel Real
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Je suis si heureuse cette nuit
de ne pas dormir
les étoiles tournent
au-dessus de mon toit
et ma tête avec elles
La lumière aimante
noue chaque astre
à son double endormi.
Marilyse Leroux
Devant le soleil
Les lunettes de l’espoir
Courages exquis
Sandi Dard
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referme ô ciel
ta paupière lasse
sur les hommes endormis
laisse-les rêver
de la brume dorée
d’une aurore infinie
le temps d’un soupir
Marilyne Bertoncini
La totalité des propositions est toujours disponible sur la page facebook de Jeudi des Mots : @jeudidesmots