Il est des œuvres qu’on se doit d’aborder avec la plus grande humilité, des œuvres qui intimident. « Vouloir comprendre, c’est vouloir réduire l’autre à soi-même » dit Hugo Mujica, comment entendre tout en laissant « ouvert » le sens ? Comme il est dit, en quatrième de couverture, « Avec Hugo Mujica, le poète ne parle plus. Il écoute avec les mots. »
Il y a des mots
qui sont le silence
de ce qu’eux-mêmes
disent
ils disent racine,
non feuillage.
Hugo Mujica, En un fleuve toutes les pluies, traduit de l’espagnol (Argentine) par Gaëtane Muller-Vasseur et Audomaro Hidalgo éditions Phloème ISBN 9791096199 55 6, 15 euros.
Le poète nous prévient dès le tout début de son recueil :
Ce n’est pour nommer
ce qui se tait dans la vie,
c’est pour l’écouter
que j’écris.
C’est qu’il est lui-même d’une grande humilité et d’une grande exactitude dans ses mots.
Manque-t-il quelque chose au silence
quand le fleuve ne le
chante pas ?
La mise en espace du recueil semble déjà nous montrer la voie, les poèmes se déploient sur le dernier tiers des pages : laissant tout le haut de celles-ci blanc et silencieux, ils semblent issus du silence, de la méditation, de la contemplation, de la lenteur. Chaque vers, en escalier, semble descendre du précédent.
Et pourtant, très certainement, cette poésie affirme, refuse, dit « oui » ou « non ». Les maximes sont paradoxales mais restent des maximes, c’est que Hugo Mujica préfère la contradiction à l’harmonie. L’harmonie endort quand la contradiction réveille.
L’oiseau vole
parce qu’il est ses ailes
non parce qu’il sait
qu’il en possède :
chacun parvient à soi-même
quand il est de soi-même
l’oubli.
Une poésie tout entre « une déchirure : l’humain » et « la palpitation du sacré. » Une expérience poétique majeure.
Présentation de l’auteur
- Hugo Mujica, En un fleuve toutes les pluies - 6 janvier 2025
- Marine Leconte, On n’en taire pas les fantômes - 21 octobre 2024
- Cathy Jurado, Intérieur nuit - 7 juillet 2024
- Cathy Jurado, Intérieur nuit - 6 juin 2024
- Isabelle Lévesque et Sabine Dewulf, Magie renversée - 6 mai 2024
- Tristan Felix, Grimoire des foudres - 12 novembre 2023
- Joël-Claude Meffre, Ma vie animalière suivi de Homme-père/homme de pluie et Souvenir du feu - 21 octobre 2023
- Pierre Perrin, Des jours de pleine terre — Poésie, 1969–2022 - 24 janvier 2023
- Danielle Bassez, Contre-chant - 21 décembre 2022
- Tristan Felix, Les Hauts du Bouc & autres nouvelles - 21 octobre 2022
- Nouveaux délits, Revue de poésie vive, Numéro 72 - 5 septembre 2022
- Revue Mot à Maux Numéro 19 - 2 juillet 2022
- Sylvie Fabre G., Nos voix persistent dans le noir - 20 avril 2022
- Marc Nagels, Sauvages - 5 avril 2022
- Louis Adran, Nu l’été sous les fleurs précédé de Traquée comme jardin - 19 mars 2022
- Revue Mot à Maux Numéro 19 - 1 mars 2022
- Voix d’encre numéro 65 - 1 janvier 2022
- Joël-Claude Meffre, Aux alentours d’un monde - 19 octobre 2021
- Sabine Dewulf et Florence Saint-Roch, Tu dis délivrer la lumière - 6 octobre 2021
- Karina Borowicz, Tomates de septembre - 5 avril 2021
- Marine Gross, Détachant la pénombre - 21 janvier 2021
- Roland Chopard, Parmi les méandres, Cinq méditations d’écriture - 21 décembre 2020
- Gérard Bocholier, J’appelle depuis l’enfance - 6 décembre 2020
- Grégoire Laurent-Huyghues-Beaufond , Chambre avec vues précédé de Arguments pour un graveur (mythographies) - 26 novembre 2020
- Lambert Schlechter, Je n’irai plus jamais à Feodossia, Proseries, Le murmure du monde / 9 - 6 juin 2020
- ( Avant-)dernier cri de Patrick Argenté - 15 octobre 2019