François Cheng et François d’Assise

 

      Saint François « inter­pelle » les poètes. On se sou­vient de la lec­ture qu’a fait Chris­t­ian Bobin du Poverel­lo d’Assise dans son livre à suc­cès Le Très-Bas (Gal­li­mard, 1992). C’est aujourd’hui François Cheng qui abor­de le saint ital­ien, non pas en par­tant de ses « œuvres », mais en le situ­ant dans sa ville d’Assise. Et, par le fait même, pro­posant au lecteur une véri­ta­ble « géopoé­tique » de la sainteté.

     L’académicien français d’origine chi­noise est allé à Assise en 1961, par des temps de vach­es mai­gres, peu de temps après son arrivée en France. Il en revien­dra ébloui. « Ful­gu­rante ren­con­tre », écrit-il. Faisant d’emblée le lien avec la tra­di­tion chi­noise, il ajoute : « La vue de ce haut lieu réveil­la en moi la réminis­cence de la tra­di­tion du feng shui, la géo­man­cie chi­noise : un site excep­tion­nel est cen­sé avoir le pou­voir de propulser l’homme vers le règne supérieur de l’esprit ».

     Assise, selon François Cheng, fait par­tie de ces sites excep­tion­nels. « Cette ville (…) a atteint un degré d’équilibre mirac­uleuse­ment juste. Attiré sans doute par cet équili­bre, le souf­fle vital qui cir­cule entre terre et ciel y séjourne volon­tiers, y épan­dant ses clartés favorables ».

     Le lieu pri­mor­dial — pour celui qui devien­dra saint François — est l’église Saint Damien où, devant le cru­ci­fix, « il enten­dit la voix du Christ lui enjoin­dre de relever l’Eglise ». Afin de se vouer à la prière, François choisit une grotte (le Carceri) près du som­met du mont Sub­a­sio. Pour se dévouer corps et âmes aux déshérités, il fit de la Por­tion­cule son « camp de base », au pied de la colline d’Assise. De ces deux sites, François en fait sa lec­ture franco-chinoise.

     Carceri ? « Au sein de cet univers de grottes, je le vois, à la manière de tant d’ermites taoïstes, dormir au creux des rochers avec, en guise d’oreiller, un gros cail­lou à la sur­face lisse »

     Por­tion­cule ? « C’est ici qu’il est allé à la ren­con­tre des blessés de la vie (…) Les souf­frances de cha­cun et de tous ne peu­vent être sur­mon­tées que dans l’abandon con­fi­ant à la marche de la Voie qui seule ne trahit pas ».

     Cette dou­ble expéri­ence fait de François d’Assise le « Grand Vivant ». Comme l’écrit François Cheng, « Pour le Grand Vivant, tout est ren­con­tre, tout est inter­ac­tion, tout est occa­sion d’une pos­si­ble transformation ».

      C’est parce qu’il admi­rait tant ce Grand Vivant que François Cheng déci­da, en 1971, de pren­dre le prénom de François.

                                                                                                                     

Assise, une ren­con­tre inat­ten­due, suivi du Can­tique des créa­tures de François d’Assise,  par François Cheng de l’Académie française, Albin Michel, 55 pages, 9,50 euros. 

 

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                   Marie-Josée Christien sonde la nuit

 

     Pour la part de mys­tère et de secret qu’elle recèle, la nuit n’en finit pas d’inspirer les poètes. On le sait surtout depuis les Roman­tiques et les poèmes de Lamar­tine, Hugo ou Mus­set appris sur les bancs de l’école. Mais il y a aus­si, plus près de nous, ce beau poème de Claude Roy qui revient à la mémoire : « Elle est venue la nuit de plus loin que la nuit/A pas de vent de loup de fougère et de men­the ».  En pub­liant un recueil sur la nuit (pour enfants et grands enfants) Marie-Josée Christien se met plutôt dans les pas de Claude Roy que dans celui des Romantiques.

     En exer­gue, le poète con­voque d’autres auteurs fameux qui ont par­lé de la nuit: Appoli­naire, Saint-Exupéry, Valéry, Blan­chot, mais aus­si Maître Eck­hart et le Brah­mana indi­en. C’est même plutôt à ces deux dernières tra­di­tions qu’elle se rat­tache car ses poèmes brefs (mag­nifique­ment accom­pa­g­nés par des pho­togra­phies en noir et blanc de Yann Cham­peau)  relèvent avant tout de la médi­ta­tion, de l’exercice d’admiration, voire de la nota­tion d’ordre philosophique ou spir­ituel. « Il n’est pas de nuit qui n’ait de lumière », écrit Maître Eck­hart sous le ciel de Erfurt. « Sans la nuit/que serait le miracle/de l’aube/l’apparition du jour/derrière les paupières », écrit Marie-Josée Christien sous le ciel de Quimper.

     Tout le livre est à l’avenant, mar­qué par une expéri­ence exis­ten­tielle, sen­sorielle de la nuit, espace du som­meil ou du rêve éveil­lé. Espace de l’attente du jour et de l’émerveillement, où la nuit se révèle, d’une cer­taine manière, être la face cachée du jour. « Lumières éteintes/regarde la nuit/les étoiles/contre ton cœur ».

      Il y a aus­si – par­courant le livre – ce sen­ti­ment puis­sant d’habiter pro­fondé­ment le cos­mos, d’être (à la manière des auteurs d’Extrême-Orient) par­tie inté­grante d’un univers où l’on cohab­ite har­monieuse­ment avec la nature et les astres. « Pen­dant que la mai­son dort/sous sa cara­pace d’ardoises/le noir est là/sur la vitre/et des­sine les hiéroglyphes/des étoiles ».

      Les Celtes aiment la nuit. Marie-Josée Christien le dit aus­si  à sa manière. « En la souhaitant/rends la nuit souhaitable/En la vénéran­t/rends-la vénérable/En la désir­an­t/rends-là désir­able ». A longueur de pages, elle nous dis­tille ain­si quelques leçons de sagesse pour apprivois­er la nuit. L’apprivoiser comme un  Petit prince qui chercherait à apprivois­er un renard.

                                                                                                

Quand la nuit voit le jour, Marie-Josée Christien, pho­togra­phies de Yann Cham­peau, Ter­tium édi­tions, 85 pages, 12,50 euros.

 

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Guille­vic : « Pos­si­bles futurs »

 

     Lire et relire Eugène Guille­vic. C’est la cas avec ces Pos­si­bles futurs du poète bre­ton, ouvrage pub­lié en 1996 (le dernier pub­lié de son vivant) et aujourd’hui disponible en poche.

On y trou­ve des poèmes rédigés entre 1986 et 1995 ayant fait l’objet de pub­li­ca­tions à tirage lim­ité en col­lab­o­ra­tion avec des pein­tres. Ce qui explique la var­iété des thèmes abor­dés (la plaine, le matin, l’innocent…).

     Et, pour­tant, com­ment ne pas sen­tir, à leur lec­ture, qu’un même fris­son par­court tous ces textes et que l’on a affaire (ain­si que l’affirme l’auteur lui-même) à « un vieux poète tou­jours en révolte con­tre les à quoi bon ». Car Guille­vic n’a pas renon­cé au « roy­aume ». Non pas au Roy­aume qu’envisage le chris­tian­isme, mais ce roy­aume qui n’a pas d’autre messie que « l’être qui advient à soi-même », ain­si que le souligne juste­ment Michaël Bro­phy dans la pré­face du recueil.

   

     Ce roy­aume Guille­vic l’associe sou­vent au silence.

   

    « Mon roy­aume de silence
    A la forme d’une sphère

    Je ne suis pas au centre
    Mais quelque part en haut.

    Là où je me tiens
    Tout me revient, tout m’arrive.

    J’ausculte
    Un présent sans frontière ».

 

     Dans ce « présent sans fron­tière », Guille­vic asso­cie aus­si  l’innocence et le beau, donne une âme au matin et au soir, accueille les nuages comme des mes­sagers. De l’oiseau, il dit ce qu’il est vrai­ment en dis­ant ce qu’il n’est pas.

 

    « Je ne vois pas l’oiseau
    Refu­sant de chanter
    Pour ne pas
    Déranger la haie. »

 

     Dans ces con­di­tions, le bon­heur peut rester une idée neuve.

 

    « Le bonheur
    Dans mon roy­aume de silence

    C’est de communier
    Avec soi-même
    En toute chose ».

Avec soi-même. Et aus­si avec les autres, à com­mencer par Elle.

 

   «  Porteuse
    D’assez de douceur
    Pour pou­voir la cacher ».

 

Superbe déc­la­ra­tion d’amour à celle dont les cils « sont le souvenir/des forêts orig­inelles » et dont les seins « gar­dent le silence » car « ils sont ce qu’elle a/ de plus planétaire ».

     Oui, de bout en bout, « Il demeure/ L’appel du roy­aume », parce que Guille­vic n’a jamais renon­cé à être un vrai puisati­er. « En vérité/tu es à la recherche de la source ». Comme, sous d’autres cieux, l’était aus­si Georges Hal­das rédi­geant ses car­nets sur l’Etat de poésie. Les deux poètes, en effet, creusent pro­fond vers le noy­au de l’être, cherchent une lumière (d’essence divine pour Hal­das) et font advenir le poème. Guille­vic n’en finit pas, ain­si, de nous tenir en éveil.

                                                                                                         

Guille­vic, Pos­si­bles futurs, Poésie/Gallimard, 199 pages.

 

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Dominique Sampiero au pays des « taiseux »

 

     Besoin de silence. Besoin de l’abri. Besoin d’ici. En trois chapitres, Dominique Sampiero nous entre­tient, dans son nou­veau livre (en prose poé­tique), d’une enfance ouvrière au pays des taiseux. « Se taire, écrit-il, est une parole invis­i­ble, de neige et de soupir, qui m’a servi d’amour dans la horde, quand père et mère gorgés de blessures incon­solées occu­paient leurs mains et leurs vigueurs à faire sur­gir du jardin de leurs corvées les dieux de nos assiettes ».

     Le jeune garçon  trou­ve un pre­mier appui dans des livres qui lui par­lent. « J’apprenais à dis­pers­er ma tristesse et mon ennui dans le fruité sec des phras­es. A rebondir avec les mots et à être moins seul ». Puis c’est l’école qui s’offre à lui. Il par­le, il s’exprime, lui le fils de taiseux. « Mes maîtres s’enthousiasmaient sur mes phras­es et mes prouess­es sco­laires ». Enfin, il y a la décou­verte de la page blanche et les pre­miers pas dans l’écriture. « Je bif­fais, rat­u­rais, recou­vrais de signes des pages entières jusque tard dans la pénom­bre m’affalant telle une neige tombée du toit dans mon pre­mier sommeil ».

     Le futur poète s’installe dans une « trinité silen­cieuse », celles des « mains », du « regard » et du « papi­er ». Une voca­tion s’affirme mais l’écorché vif a besoin de se pro­téger. Il cherche un abri dans la page blanche mais aus­si dans le pays d’où il vient et qu’il ne renie pas. « Ma chair est faite de collines, de forêts. De lieux innom­brables en forme de brous­saille ». Nous sommes dans le nord de la France. « Ici la nuit est plus grande que le jour et le mange parfois ».

     Dominique Sampiero nous entraîne à sa suite dans le maquis de ce passé et de ce pays. Son pro­pos est par­fois com­plexe et énig­ma­tique,  à l’image du mys­tère que le poète ne cesse de son­der. Il témoigne d’un auteur tou­jours en quête et en per­pétuelle ten­sion. « Je ne me résigne pas à m’enfuir dans l’air où s’exaspère l’absence du dieu lointain ».

    Puis il y a la mort. Celle du père, qui ouvre de nou­velles portes et, finale­ment, libère plus que jamais la parole. « Quand il est mort, j’ai su que quelque chose de lui serait à moi » et « j’ai su par­ler aux arbres depuis mon aubier d’enfant végé­tal ». Dominique Sampiero en arrive même à par­ler de cet  « éblouisse­ment » qui « n’est pas une brûlure du regard mais une neige tombée en flo­cons der­rière le vis­age que nos proches recon­nais­sent comme l’envers de notre joie ».

     Un « car­net de lecteurs » vient s’adosser à ce livre fiévreux. Une dizaine d’hommes et de femmes témoignent à leur manière du silence, de la lec­ture et de l’écriture en prenant appui, ou non, sur les pages du poète. C’est la volon­té de l’éditeur « d’offrir en partage la réso­nance du poème ». Fidèle en cela à sa voca­tion de « passeur ».

                                                                                                          

Avant la chair, Dominique Sampiero, Le Passeur édi­teur,  110 pages, 15 euros.

 

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                       « Cette sim­ple joie » de Jean- Pierre Boulic

 

     Du poète Jean-Pierre Boulic on dit volon­tiers qu’il est un veilleur, à la proue de son cher Pays d’Iroise dans le Nord-Fin­istère, un pays « dans la douce étoffe des nuages », « roy­aume de varechs et de roseaux ».Veilleur, donc,  face à la mer, à l’écoute du chant du monde dans une atti­tude de recueille­ment et de gratitude.

     De son nou­veau recueil, Cette sim­ple joie, on peut pour­tant dire que le fond de l’air y est moins marin que ter­rien. Moins  ten­du vers les larges hori­zons qu’aspiré vers l’intériorité (con­fir­mant ain­si une incli­na­tion amor­cée dans ses précé­dents recueils). Et que le veilleur peut aus­si devenir sourci­er. D’où, pré­cisé­ment, l’attirance du poète pour les sources dont on entend le bruisse­ment au fil des pages. Sous la plume de Jean-Pierre Boulic, en effet, les sources « exul­tent », « s’ébruitent ». Il arrive même qu’elles « par­lent » dans les herbes. Plus mer­veilleux encore : leur « résur­gence ». Comme si un cœur nou­veau, soudain, venait habiter la nature. « L’eau passante/Converse avec la lumière/Au pied d’un saint tail­lé dans le gran­it ». Aus­si, ajoute-t-il„ « L’âme ne se lasse de voir/Et sen­tir et touch­er entendre/Mots et souf­fle de l’univers ».

 

     Le poète est le médi­a­teur de ce souf­fle. Son poème devient incan­ta­tion et plain-chant (« La trans­parence des heures/Où germe la louange ») et, pour tout dire, véri­ta­ble exer­ci­ce spir­ituel, tel que le définit Gérard Bocholi­er dans son essai sur la poésie.  Car Jean-Pierre Boulic s’efface devant quelque chose – ou quelqu’un – de plus grand et de plus fort que lui. Une Parole se mur­mure, une Présence rôde. Le poète accueille l’invisible, l’indicible. Il devient le récep­ta­cle du mer­veilleux. « Sans bruit l’œuvre de ton cœur/Ce chant sur tes lèvres/Irait le jour sans pénombre/Bénir l’invisible ». Car, insiste le poète, « Tout nous est donné/A portée de cœur »    

     Les oiseaux sont sou­vent les mes­sagers de cette « bonne nou­velle ». « De son chant l’oiseau illumine/Le silence des branches/où l’invisible se recueille ». Ils sont nom­breux, donc, à appa­raître au fil des pages : rouge-gorge, passereau, mésange, hiron­delle, alou­ette, moineau, aigrette… Sans oubli­er « la liesse des mou­ettes ». Si les oiseaux du ciel « ne sèment ni ne moisson­nent » (Math­ieu, 6,26 ), on en voit chez Jean-Pierre Boulic dans des  « blés gorgés d’été » qui « pépi­ent dans l’or ». A la manière de Jean Gros­jean, le poète réveille en effet  des saveurs d’Evangile quand il con­voque, ailleurs, la Samar­i­taine (« Une femme survient/Portant la cruche ») parce qu’alors « L’espace luit/De l’eau vivante/D’une parole sans retour ».                                                                     

     En pub­liant ce nou­veau recueil, Jean-Pierre Boulic con­firme donc – plus que jamais – son inscrip­tion dans un mou­ve­ment poé­tique aux références chré­ti­ennes affir­mées, aux côtés notam­ment de Philippe Mac Léod, Gérard Bocholi­er, Gilles Baudry et, bien sûr, de Jean-Pierre Lemaire, à qui il dédie son livre.

     On ne dira non plus jamais assez l’amour de la langue qui tran­spire dans ses poèmes courts et ciselés, ain­si que  leur pro­fonde musi­cal­ité. Sans par­ler de sa gour­man­dise pour des mots oubliés qu’il ressus­cite sous nos yeux. Il en est ain­si des « sépales », des « épi­aires », des « glumes », des « éteules » ou des « cenel­liers ». Car, nous dit aus­si Jean-Pierre Boulic, « la musaraigne brasille » et « la brise trémule ».

                                                                                                                                                                                                            

Cette sim­ple joie, Jean-Pierre Boulic, La Part Com­mune, 125 pages, 13 euros.

 

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Les « vibrants arpèges » d’un moine bouddhiste

 

     Moine boud­dhiste et poète. Jig­mé Thrin­lé Gyat­so (de son vrai nom Yves Boud­ero) médite, enseigne, dia­logue et péré­grine. Il vit aujourd’hui en ermite en Savoie. Ses poèmes sont des vibra­tions à l’image de ces arpèges qu’il décline dans trois recueils suc­ces­sifs : Silen­cieux arpèges, Lumineux arpèges et, aujourd’hui, Vibrants arpèges. Une trilo­gie en forme d’exercice spir­ituel  où le poète mul­ti­plie les cita­tions « comme cela se fait en musique », ponc­tu­ant le texte « comme autant de paus­es hors-temps ». Place, donc, à  Jean de la Croix,  Hen­ry-David Thore­au, Ken­neth White, Andrée Che­did, et, bien sûr, Milaré­pa, le grand inspi­ra­teur. « Il faut, écrit Jig­mé Thrin­lé Gyat­so,  de grands espaces/dans le ventre/et la cage thoracique/et la gorge/et l’esprit/pour que la voix se libère/en de vibrants arpèges ».    

     Jet­sun Milaré­pa est au cœur du Jardin de Mila que le poète pub­lie par ailleurs. Cent onze ter­cets « pour chanter la présence éveil­lée » que le moine poète ouvre par des cita­tions d’Adonis, Man­del­stam, Super­vielle, Dar­wich… C’est dire assez sa volon­té d’ouverture à toutes les formes d’expression poé­tique et à toutes les cul­tures. Morceaux choisis :

 

« Dans le jardin de Mila
s’épanouissent en silence
les ané­mones dis­crètes de la persévérance »

 

« Dans le jardin de Mila
comme à la source du Gange
nuit et jour trem­ble la terre des concepts »

 

       Il y a même ce ter­cet aux allures de haïku :

 

« Cette nuit tombe la neige
et au matin
tout est blanc et arrondi »

 

     Quit­tant le jardin de Mila, l’auteur pour­suit une  quête poé­tique orig­i­nale autour de la let­tre y. Car le y, dit-il, « ponctue » sa vie. N’est-il pas né à La Roche-sur-Yon ? Son frère ne s’appelle-t-il pas Guy ? N’a‑t-il pas reçu, lui-même, le prénom de Yves ? Alors, cette fois, il peut dédi­er à Yvon Le Men son poème sur le Y. Car « Y est ouverture/triple ouver­ture d’un point/dans l’espace infini ».

     Dans un dernier ensem­ble poé­tique inti­t­ulé Empreintes, au ton engagé, le poète règle son compte à toutes ces « empreintes » qui défig­urent l’homme et la vie : « Empreintes du marché, de l’offre et de la demande », « Empreintes mortelles des marchands d’armes »… Il lance un appel « pour aller /vers la sim­plic­ité de l’humilité/vers la spontanéité/et la sobriété ».

     Jig­mé Thrin­lé Gyat­so pour­suit ain­si une œuvre d’écriture inscrite dans la tra­di­tion boud­diste du mantra. Pourvu, explique-t-il, « que la moti­va­tion soit juste et que la justesse soit celle de la spon­tanéité du cœur et du partage sincère ». Dans son cas, cela ne fait aucun doute.

                                                                                               

Vibrants arpèges,  par Jig­mé Thrin­lé Gyat­so, pré­face de Françoise Bonardel, édi­tions de l’Astronome, 96 pages, 9 euros.
Le jardin de Mila, suivi de Y et de Empreintes, par Jig­mé Thrin­lé Gyat­so, pré­face de Nico­las Brard, illus­tra­tions de Y par l’artiste plas­ti­ci­enne Sophie Esteulle, édi­tions de l’Astronome, 96 pages, 12 euros.

 

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