Nous reprenons pour quatre numéros la publication de la suite poétique d’Etienne Quillet. En priant nos lecteurs et l’auteur de bien vouloir nous pardonner d’avoir donné priorité à l’actualité.
HIVER
Ruisseaux effacés
chênes enclos de l’automne
Écorces griffées
en fines plumes de forêt
Larmes concédées
à l’arbitrage du givre
Sur ce tapis de silence
la neige attend son heure
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Nous étions cendre
nous étions sève
Nous étions louves
au confluent de la meute
Charmilles feutrées
verrières étourdies de blancheur
Nous sacrifiions nos empreintes
aux préfaces nacrées des sous-bois
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Nous les avons suivis
nous avons appelé leurs noms
Désensablé leurs fontaines
taries de s’être égarées
Étreint de nos voix
leurs langages glacés
Nos manteaux entravaient
l’affleurement de leurs peines
Ils ne nous ont pas reconnues
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Était-ce l’encre
était-ce la source
Était-ce le bleu
de l’esquisse des morts
Nous affrontions seules
le jugement de la pierre
Branches lancées nues
aux sentences des brouillards
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Sur les plis de la trace
nous arrêtions la marche
Nos doigts gourds hésitaient
dans les restes de fins de jour
Arqués vers l’ombre des branches
enterrées sous l’hiver
Nous allumions notre feu
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J’assemblais pour elles
des bracelets de glace
La nuit de nos yeux lourds
ambrait l’anneau des saisons
Nous fuyions dans le vent des braises
lianes diaprées sous ce destin de lumière
Et repartions au matin
l’âme vêtue de nos charmes de verre
Avant que l’hiver ne fonde
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Qu’avez-vous su
de ces lunes
de ces fleuves
De ces forêts écrites
de ces torrents
qu’avez-vous entendu
Rien si ce n’est
la visite
de l’écho
Si ce n’est
l’éraflure
de l’éclat
Rien
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TEMPÊTE
Comment pouvions-nous voir
dans le chant de l’alouette
Dans le versant des tilleuls
dans l’invitation des plaines
Dans le pacte secret des abeilles
comment pouvions-nous croire
Que se chargeaient au loin
les crues sauvages du lierre
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Ses filles impatientes
encerclaient la vallée
Le ciel dispersait
les pluies noires du sursis
Nous l’aperçûmes enfin
dans la réflexion de l’alliage
Elle lançait depuis l’aube
des sillons affamés de désert
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Elle était masque
elle était pesanteur
Elle était arche
sous le sable des terres
Elle était colline
dans le cri des loups
Elle était tempête
elle dansait sa violence
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Assoiffée de matière
déchirée de nuages
Accusant l’horizon
de l’avoir soudain fait chair
Elle enseignait aux êtres
la dissidence du vide
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Nous avons laissé aux courants
nos charges de lumière
Tournant en grappes déliées
dans le cadran des roches
Nous invoquions l’aigle
aux serres fermées du jour
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La tempête au dehors
emportait nos alliées
Prostrées sous une vire amie
à l’ombre des disparues
Nous attendions le silence
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La route était lourde
jonchée d’arbres couchés
Morts et avec eux
nos sœurs
Comme une soie
brumeuse
De tristesse
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