Les cinq poèmes de l’écrivaine, journaliste et chercheuse polonaise Agnieszka Wolny-Hamkalo ont été initialement publiés dans les recueils Nikon i Leica (pol. Nikon et Leica, 2010) et Występy gościnne (pol. Invitée spéciale, 2014). L’autrice a construit son œuvre dès 1999 : celle-ci comporte aujourd’hui plus de trois cents poèmes, plusieurs romans adulte et jeunesse, des pièces de théâtre, des performances ainsi que des articles scientifiques.
Sa poésie est très visuelle, les images y défilant à une vitesse d’obturateur. Cette proximité à la photographie souligne que les représentations (qu’elles soient analogiques ou numériques, physiques ou oniriques) occupent une place prépondérante dans la poétique d’Agnieszka Wolny-Hamkalo.
Profondèment inspirée par Susan Sontag, dont elle étudie l’œuvre, et chercheuse spécialisée dans le style camp, Agnieszka Wolny-Hamkalo veille à ce que ses textes, comme le prônait Sontag, aient aussi « le goût de l’exagéré »1. La ville est son domaine de prédilection. Elle en saisit l’essence en y appliquant un filtre poétique, afin d’en composer une mise en scène. Ses représentations se détachent de leurs sens premiers, pour devenir un objet « conçu comme pur artifice » et changer la perception du lecteur en orientant son attention vers un phénomène caché.
Agnieszka Wolny-Hamkalo lit le livre L’été d’Adela, publié par la maison d’édition Hokus-Pokus. Le livre a été illustré par Agnieszka Kożuchowska.
Ainsi rétrécit-ellele domaine de la banalité » car « la banalité, au sens strict, est inséparable du contemporain ».
Malgré son onirisme — le rêve, le songe, les visions nocturnes constituent le leitmotiv de l’écriture de Wolny-Hamkalo — cette poésie demeure très narrative, ouverte à ses lectrices et lecteurs. C’est une invitation au voyage à travers de multiples strates du rêve, de la ville et de la vie.
Du recueil Nikon et Leica (2010) : une histoire vraie, flashmob ; du recueil Invitée spéciale (2014) : mandala, fenêtre météorologique, principe de Mach.
Agnieszka Wolny-Hamkało — 5 poèmes
Traduit du polonais par Michał Grabowski avec la collaboration précieuse de Blaise Guinin
une histoire vraie
Du chien je descends, du paon
j’ai gardé les plumes. Les garçons apprécient
mon âme farineuse, plate comme la dune.
Dedans j’ai plein de toiles d’araignées.
Les poupées sans bouche ont encore maigri,
je leur sers de la soupe de terre et des fourmis
avec du sucre. Mon jeune singe Rita
est sorti de sa coquille, il l’a abandonnée blotti
comme un jaune d’œuf ou comme une fée dragonne.
Maintenant les messieurs font sortir par ma bouche
des chants. Je regarde alors le fleuve :
dedans nage un argent fermenté et la lune
étire son omoplate cassé
contre le courant. La terre fume une fois encore comme l’azote.
Le matin, je trouve une trace sur ma peau.
historia prawdziwa
Od psa pochodzę a pióra
dał bażant. Chłopcy lubią z mąki
moją duszę płytką jak wydma.
W środku mam pełno pajęczyn.
Lalki bez ust są znów chudsze,
daję im zupę z ziemi i mrówki
z cukrem. Moja małpka Rita
wyniosła się z jajka skulona
jak żółtko, jak smocza wróżka.
Teraz panowie wyciągają ze mnie pieśni
przez usta. Patrzę wtedy na rzekę,
płynie w niej zsiadłe srebro i księżyc
nadstawia złamany obojczyk
pod nurt. Ziemia znów dymi jak azot.
Rano mam ślad na skórze.
flashmob
Sur-dormons aujourd’hui – ce sera bon.
Sur-dormons exprès. Feignons
la fièvre, le paludisme.
Foutons-nous des avis de passage, ignorons
les sonnettes, jouons les disparus,
un peu les morts, les perdus.
Sur-dormons éperdument
que ce jour soit un jour sans nous.
Sans nous ils s’en sortiront,
tous ces rendez-vous immanquables, tous ces impondérables.
Sur-dormons aujourd’hui, ne prononçons plus aucun mot.
fleszmob
Zaśpijmy dzisiaj – będzie fajnie.
Zaśpijmy specjalnie. Udajmy
gorączkę, udajmy malarię.
Olejmy awizo, zignorujmy
dzwonki, grajmy zaginionych,
tylko troszkę martwych.
Zaśpijmy zupełnie
dzień dniem bez nas zróbmy.
Bez nas się obejdą
te ważne spotkania, te straszne wypadki.
Zaśpijmy dzisiaj, nie mówmy już nic.
(extraits de : Agnieszka Wolny-Hamkało, Nikon i Leica (fr. Nikon et Leica), édtions WBPiCAK, Poznan 2010).
mandala
Pour toi les trompettes framboises, révolution.
Pour toi les cigarettes, les oranges.
Voici ! La ville s’investissant de couleurs,
la ville où nous nous amuserons
parmi les noms charmants. Au fond de mon œil
toi et tes tatouages – grands comme des lacs,
sages comme des tableaux. La ville
aime ses naufragés, elle leur réserve
des caveaux confortables. Voilà des rêves
emprunts, à mon sens, d’un bout d’Indonésie.
J’aime regarder les bateaux
sur tes mers noires, cette ville
où les cercueils entrent sous la terre
comme des truffes, où les patinoires blanches
offrent des locaux spacieux,
et des cigarettes mentholées avec leur bandeau bleu.
Les gens sont de grands chats inoffensifs
qui chantent dans les caves
leur chanson d’après-midi
et se prennent en photo parmi les dracénas.
mandala
Twoje malinowe trąbki, rewolucjo.
Twoje papierosy, twoje pomarańcze.
Tak jest! Miasto inwestuje w kolory,
będziemy bawić się w mieście
pośród ładnych nazw. Ty i twoje tatuaże
na dnie mojego oka – duże jak jeziora,
mądre jak obrazy. A miasto
lubi swoich rozbitków, układa ich
w ciepłych wnękach. Sny są jednak zrobione
z jakiejś Indonezji, tak myślę.
Lubię patrzeć na statki
i twoje morza czarne, miasto,
gdzie trumny wjeżdżają pod ziemię
jak trufle, a białe lodowiska
produkują przestronne lokale
i mentole z niebieską obwódką.
Ludzie to wielkie, niewrogie nam koty,
które śpiewają w piwnicach
popołudniową piosenkę
i robią sobie zdjęcia wśród dracen.
fenêtre météorologique
Se défiant de l’opinion générale,
elle a acheté ce foulard, et puis s’en est allée,
abandonnant volontés et prétentions enfantines.
Combien de secondes chances peut-on donner
impliquant cet enfant, faisant de lui partie prenante ?
Le soleil – bien nourri et éduqué –
s’en est allé, lui aussi, découvrir le monde. Les enfants n’ont droit à rien –
surtout que nous avons déjà quelque chose de prévu
pour ce soir. Tant pis, il avait une lecture
plus que sélective des lois de l’église.
Elle regrette toujours le garçon à qui elle s’était habituée.
La nuit, quand il ouvrait une canette de sprite,
ça crissait comme des grillons.
okno pogodowe
Wbrew obiegowej opinii
kupiła szalik i wyjechała,
rezygnując z dziecięcych roszczeń i pragnień.
Bo ile razy można dawać drugą szansę,
wciągając dziecko, robiąc z niego stronę?
Słońce – wykarmione i odchowane –
też ruszyło w świat. Nic dla dzieci –
zwłaszcza jeżeli mamy już jakieś plany
na wieczór. Trudno, miał zbyt selektywny
stosunek do przykazań kościoła.
Ale żal jej chłopca, do którego zdążyła przywyknąć.
Kiedy nocą otwierał sprite’a,
to brzmiało jak świerszcze.
Principe de Mach
Une femme parle russe au téléphone
dans une ville, celle d’un vieux film avec des aviatrices.
Une lune physiologique revient sans cesse
comme une chose oubliée, non dite ou non faite.
– Je crois qu’au fond les rêves sont emprunts
d’un bout d’Indonésie. En l’occurrence, je crois que celui-ci
est emprunt de ma douleur dans le dos, de mes cigarettes consumées,
et de mon permis de conduire à repasser
jusqu’à ma mort. Les rêves sont soumis au principe de Mach :
l’enfant qui virevolte sur un manège
est attiré par des étoiles qui ne sont pas de ce monde.
Zasada Macha
Kobieta mówiąca po rosyjsku przez telefon
w mieście ze starego filmu o pilotkach:
Fizjologiczny księżyc wracający bez przerwy
jak coś, co zapomniało się powiedzieć albo zrobić.
– Sny są jednak zrobione z jakiejś Indonezji,
tak myślę. Ten jest zrobiony z mojego bólu
kręgosłupa i z moich papierosów wypalonych
oraz z mojego nigdy już do śmierci niezrobionego
prawa jazdy, tak myślę. Snami rządzi zasada Macha:
dziecko wirujące na karuzeli
jest przyciągane przez gwiazdy nie stąd.
(extraits de : Agnieszka-Wolny Hamkało, Występy gościnne (fr. Invitée spéciale), éditions Igloo, Wroclaw 2014).
La trame de Lichtenstein, d’Agnieszka Wolny-Hamkało, interprétée par Michał Zborowski. Réalisé et édité par Piotr Bartos.
Note
- cette citation et suivantes dans ce paragraphe : Susan Sontag, Le style camp, traduction Guy Durand, éditions Christian Bourgois 2022.
Présentation de l’auteur
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