Alain Brissiaud, Chemin de montine, inédits
Tu ne sais pas où loger tes pensées
ronces que cela
étourderies
descendant le chemin tu songes
à ces choses
qui surgissent venues
et t’obligent à dire
parler
pour comprendre avec eux
tous
qui sont-ils
si nombreux
recouverts de feu de terre
d’or diront-ils
non
pas cela
ceux qui passent ont plus que de l’or
juste le visage d’homme
et toi
tu veux tenir tout au bout de ta main
leurs beaux regards bariolés
Ce n’est pas rien le maintien
la belle allure
derrière la haie cortège de flammèches
tu songes à mettre en ordre tes pensées
ronces que cela
personne ne t’attend ils passent
juste
une autre fois il pleuvait
allongée près de moi
dans le silence
ta peau reflétait une lumière crue
il n’y avait plus de dehors
et cette pluie plus forte plus puissante à mesure
sonnait dans le ciel
donnait tout d’elle
elle était notre toit de fortune
nous ne pouvions comprendre
tes yeux vibraient de la folie
Devant le miroir
nous avons déjeuné de pain
doucement
à nous dévisager
étions-nous ces amants si pâles
dis-moi
es-tu celle rêvée
nous dormions séparés par la glace
depuis ce jour d’autrefois
au premier temps
de toi
si vite oublieuse de ma présence
je pioche dans ta mémoire
indistinctement
sans rien attendre
ni voir
la main tendue aux vents
Tu t’approches
lui montrant la vallée
et soudain
il connut l’irruption de la douleur
se souvenait-il
mais comment oublier
ce qu’il était venu chercher
pourquoi
être allé si loin
rejetant le passé
il dit encore quelque chose
qu’il est épuisé
qu’il veut rester dans la lumière
et ne peut se poser
dire sa marche
et au-delà
aussi
partir vivre comme on va mourir
Présence de ton corps au bord de l’arbre
dans le cri des corneilles
sur la lisière
où tu t’avances vêtue de lait de braises
tu lis un poème
alors des couteaux de larmes viennent
irriguer tes rêves
tu songes au regard que je te porte
celui
qui te traverse
et te mène au lieu du langage
quelle vérité que cela
Où sont nos compagnons
le sais-tu
l’ocre du ciel
et l’herbe douce
nouveau temps
de quoi ont-ils besoin
je tremble sous le figuier méditant
sur ces choses
l’hiver reverdit
le temps se sépare
pourquoi nous ont-ils laissé ce qui se perd
Ils ont bu à la santé de ce moment
de ce temps
qui continue à venir
ils ont trinqué
comme on rit d’un rien
pour oublier
comme pendant un discours
une messe
quand le temps se fige
accroché aux souvenirs
et personne ne s’étonne
personne n’est vraiment triste l’on se tient l’un à l’autre
sans pouvoir se quitter
on chanterait presque
alors
circule un gobelet de vin
il est chaud de chacun
vit dans chaque main
fiévreux comme un enfant
après
nous sommes seuls dans la blancheur de ce moment
démunis
à dire tout un long jour des choses bêtes
Ce soir
que reste-t-il
de ton regard
peut-être la transmission de ton regard
la terreur du vide
cette mémoire qui se refuse
teigneuse
comme un bouquet d’absence au monde
peut-être
la contrainte de ce lieu
impossible et calm
qui nous obsède et nous encercle
ce nouvel état de la vie
plus tard longtemps après
tu vins jouer dans mon sommeil
comme hors de toi
retournée
Cet autre rêve dans la chaleur
assoupi derrière le muret
tu viens vers moi
indélicate
et merveilleuse
tête à l’envers
me donner ton odeur
ta déchirure
plus tard
assise sur le seuil
au lieu d’éclats
enragée
une brèche à la taille
tu me regardes même vieillir
insolence de ce moment
et puis ce temps nouveau
bouquet d’absinthe
roule
sans rien de ce qui fut
même plus la mémoire
tout a sauté
sombré par le fond
Temps d’ivresse
ta lèvre est un cœur
de silence
tu tais la fièvre
tu fais l’ensevelie
tu es la corde
alors
je n’écris plus de beaux poèmes
plus de lumière
je te regarde aller venir
juste j’attends ce moment
où
le rire que tu portes
sera notre fardeau