André GACHE : Dogons, Emme Wobo
A travers une étude ethnographique, l'auteur nous livre la « matière » parole, celle qui est souple, qui évolue, s'échange et se modifie en fonction des interlocuteurs et du temps, matière volatile, eut égard d'abord à la tradition orale africaine, formant un groupe, voire des sociétés qui partagent un univers commun.
Le tour de force est alors de figer à l'écrit ce qui est naturellement aérien, nuages qui évoluent, parfois se désagrègent pour se reformer ailleurs, et de réunir ainsi les différentes couches du langage où le sacré est la source profonde bien avant les mythes et les religions.
Alors il faut se laisser porter, peut-être dériver jusqu'aux « matins qui tiennent dans la main », puisque la « bonne parole est un repas délicieux pour l'oreille », même si la guerre, l'esclavage, les règles familiales très strictes sont aussi présents.
Par un triptyque, l'auteur nous invite d'abord dans le fleuve nourricier d'un poème multiforme, expérience initiatique pour mettre en avant les questions fondamentales.
La deuxième partie, photographique, nous plonge dans une réalité physique, aride, quotidienne, artistique parfois ou architecturale, pleine d'odeurs visuelles où la vie est à fleur de terre, avant de donner quelques clés théoriques ouvrant de mystérieuses portes.
Cette étude qui mêle poésie, sciences et ethnographie témoigne de la vérité multiple africaine dont l'art que nous connaissons en occident à travers la musique, la peinture et la sculpture mis en valeur par de grands artistes, ne sont que les embruns de civilisations élaborées, en particulier les Dogons du Mali dont l'histoire est marquée par la volonté de demeurer authentique.
Résumer ce livre est une gageure, tant il est riche, complexe sans être compliqué, analytique et poétique à la fois, où les rêves et la réalité se confondent dans un même creuset, celui de l'humanité