Angèle PAOLI, Marcher dans l’éphémère
Dans le voisinage de Canari, la poète marche et écrit, dans une double tension : retenir le subit, le bref, le caché, l’instantané, et prolonger dans la mémoire des lieux aimés le souvenir vif du conjoint disparu il y a peu.
Les poèmes, surgis de cette double instance d’écriture, disent le bonheur consenti à remettre les pieds là où le défunt a vu, vécu, marché.
De « l’angoisse de la mort », de celle qui est arrivée trop vite pour qu’on en perçoive la force et le chagrin, le poème dit le juste contraire : qu’il puisse, dans sa brièveté, offrir quelque apaisement à celle qui souffre.
Les poèmes d’un lyrisme contenu offrent des regards, de moments de partage, des découvertes issues de l’éphémère : « tu cherches des points/ d’eau/ dans la lumière » ou « c’est heureux que la terre encore/ persiste sévère ».
La proximité de la mer, des rumeurs, des papillons « musardant », des « échancrures soudain/ moignons de branches », tout aide à ce que « passe la vie qui nous sépare ».
La description de la nature éloigne un temps les blessures, le chagrin.
Jonas un temps, par son récit, éloigne la poète des longs vers intenses de la fin, quand la mort venue soudain, est trauma puissant.
Angèle PAOLI, Marcher dans l’éphémère, Cahiers du Loup bleu, Les Lieux-Dits, 2022, 48p. Loup de Caroline François-Rubino. 7 euros.
L’instant d’avant
il était là les yeux mi-clos
les voilà clos
sur une nuit définitive (p.36)
La beauté de ces poèmes réside tout à la fois dans leur juste appréhension de l’extérieur et dans l’intense écriture de l’intime pudique.
Angèle Paoli réussit à rendre universelle cette poignée de poèmes personnels, où lecteur et poème se rencontrent et « où le rejoindre ».