Anthologie Le Courage des vivants

Le courage des vivants est une anthologie publiée chez Jacques André éditeur, au profit de l'association Le Défi Anthony, qui est une association de Saint Symphorien des bois en Saône et Loire qui assure son soutien aux malades et aux équipes médicales, en hommage à Anthony, qui à l'âge de vingt et un ans est décédé d'une leucémie en 1998. Une belle action, pour un livre magnifiquement orchestré par Christine Durif-Bruckert et Alain Crozier.

Trente poètes ont relevé le défi, et accepté d'écrire sur cette thématique qu'est la maladie. Comment tenir face à la déliquescence du corps, comment être présent auprès de ceux qui souffrent, soulager, tenir cette place qui ôte un peu des maux... Justement trouver comment prononcer ce qui porte vers un peu de lumière, lorsque nous emporte les dysfonctionnements du corps. Problématique d’actualité s’il en est. Cette anthologie a été pensée bien avant la catastrophe de ce qui nous tient encore dans la sidération, ce qui nous emporte vers des horizons inconnus, la prison de la chair malade, la présence aux côtés de ceux qui souffrent et sont irrémédiablement emportés.

Une très belle liste de poètes, avec la présence, entre autres, de Marilyne Bertoncini, d'Anne-Lise Blanchard, de Valérie Canat de Chizy, de Stéphan Causse, Sylvie Charreyre, Patrick Quillier, Béatrice Rieussec, Marie-Ange Sebasti, Fabienne Swiatly, etc ! Autant dire que chacun a tenu à être là pour soutenir cette initiative. 

 

 

Le Courage des vivants, Anthologie
établie par Christine Durif-Bruckert et
Alain Crozier, Jacques André Editeur, 2020.

Egalement Alain crozier : 

 

Défaire les valises dans la chambre,
Effacer les valises sous les yeux.
Épaules lourdes,
Guetter le prochain repos,
Ranger les photos,
Les souvenirs.
Plein de vide,
Respirer.
Tout lentement.

 

 

Alain Marc :

 

...  On déprime
lorsque l’on ne voit plus
de solutions...

*

...  Quand les Idées
Tournent
TOURNENT
Dans la Tête
Sans Jamais
Pouvoir
S’Arrêter

COMME UNE IDÉE FIXE

 

A côté de ces poèmes versifiés forts, âcres parfois, sensibles toujours, des poèmes en  prose scandent cette impuissance face à la maladie, d'une manière non moins puissante, non moins émouvante, et poignante.

 

Luc Vidal

Ce poème a été traduit en espagnol, anglais, allemand,
russe, arabe et albanais

Je voudrais écrire un poème terrible et doux qui
inquiète la Mort
La jeune fille écoutait l’andante con moto Der
Tod und das Mädchen** de Frantz Schubert
Cela la plongeait dans une mélancolie sans fond
dans une errance sans repère et sans nom
Les chambres du printemps se noyaient dans
l’ivresse de la mort

 

Il y a encore bien d’autres poèmes, bien d’autres confessions aussi. Peut-on vraiment écrire sur ce sujet sans avoir ressenti cette impuissance, et ce poids qui alourdit plus encore la souffrance lorsque dire devient impossible, si ce n’est grâce au poème, offert comme une plainte, et une porte vers ce que les mots ne peuvent énoncer. Ici encore, c'est le langage tout entier qui est en charge de révéler, grâce à sa mise en échec offerte par le poème, par le travail des mots contre eux-mêmes finalement, comme si côte à côte dans ce dispositif particulier ils pouvaient révéler ce qu'aucun ne peut dire : la douleur, la disparition, la maladie. Très bel ouvrage, dont la puissance réside également dans ce collectif, dans cette pluralité de voix qui évoquent la singularité des ressentis face à cette universalité de la souffrance.