Antoine Loriant, provençale

Par |2024-11-06T10:53:24+01:00 6 novembre 2024|Catégories : Antoine Loriant, Poèmes|

Il t’est un voyageur fidèle qui, loin dans le matin, 
boit à la corne de tes yeux. 
Et, l’étoile t’hommage,
pub­lie ses pen­sées sur le sable.

L’exil est une con­vic­tion avec laque­lle tu nais. 
Bête de psaume dans le tin­te­ment des cloches
elle danse sa joie avec les épées, là, dans la digue, au-dessus.

Une moitié de lance, 
bonne qu’à délir­er les aveu­gles et les marées,
qui, foulée dans ton réveil, 
habille chaque coquil­lage en oracle.

 

Provençale

Car­il­lon dans le bois le feuil­lage osseux 
plein de claque­ments de langue 
salu­ent le cortège pour­pre des étoiles.

Aux murs de l’été, tar­dives, elles vien­nent semer la rosée mauve 
dans les ombres aux artic­u­la­tions mauvaises 
et sur le rêve des marcheurs oubliés.

Sous le marteau de l’azur tombent des coins du ciel des alarmes
et avec le débris fou des pastoureaux.
Les voûtes de plumes abri­tent encore le secret des légen­des per­dues et le prix des mythes.

Bruns le jardin et la paille et les heures, hum­bles, qui som­no­lent sur les genoux du désastre. 
Du vin des tour­nesols ayant per­du son or, coulé loin dans les astres, 
Se tor­dent les fronts brisés au-dessus d’un matin pré­coce, orai­son de pous­sière brune.

Cette con­stel­la­tion-là s’ouvre en signe mauvais
et fait bleuir le soleil du soir à l’image des jours anciens. 
Le lende­main som­bre en silence meurt dans la pierre.

Les larmes du blé vien­nent peser sur les épaules de la sai­son pour touch­er au soir. 
Un éclair rouge court dans les flaques de la nuit,
et un vit­rail, là-bas, éclate de mutisme.

Les marcheurs d’omissions

Réduite entre les poings blancs des nuits successives,
Sous la pous­sière de l’astre lunaire, tour à tour, 
le voyageur devient errant et le errant pèlerin.

À la sor­tie des cer­cles de leurs feux, 
ils guet­tent dans le loin son vis­age dissous.
Leur joie chante le pour­risse­ment noir du silencieux,
Chaque jour, avec leurs lèvres.

Des araignées s’encerclent à son cœur,
et ses mots déjà sont gag­nés par la vis­cosité de la soie. 
Comme phalènes penchées sur le vide ils vien­nent con­fess­er leurs aiguilles, 
et lui reproche le manque de lumière qu’ils lui dévorent.

Le devance un soupir qu’il ne sou­vient pas avoir poussé.
Le nœud de ses mains boulever­sées se referme sur un orchestre
Dont lui seul sup­pose la gratuité.

 

 

Jus absen­tis

Juste au front de la loi, 
juste,
les rég­i­ments avariés
t’accordent du bas de leurs hivers passage.

Juste der­rière le verre du jour, 
juste, 
celui qui tou­jours parvient le dernier
aux qua­tre coins du sang, la forge.

Sans mots ce qui monte de la vie,
sans mots.
Les sépul­tures en file se passent la laine
gardée dans le cof­fre bleu de leurs bottes.

Tu jettes tout au feu de forge
juste.
Où gon­flent les riv­ets d’or dépareillés
tu frappes et démontes et laboures l’héraldique mor­du à blanc.

Ta main glisse juste entre le som­meil et l’enclume,
juste.
En vain tu t’es promis des armes con­tre le temps
Et les rég­i­ments te salu­ent de sous le charbon.

Sans mots ce qui monte. 
Juste.

900 sec­on­des et quelques kilomètres

Aux som­mets du doute, nous glis­sions sur la pierre fendue de lumière. 
Car­bu­rant d’ozone, le souf­fle pris dans un air à défaut sur un pur à vibra­tions de vaste. 
Cible des couleurs polymères, soleil contre-soleil
Comme un éclair frap­pant la neige.

Un lan­gage                                             - soupir
                                   de bran­dons                               en feu

Fusil­lant nos ombres con­tre l’enclume des duvets               mauves-
bleus,
                        four­rure des montagnes

L’odeur hachurée des convulsions […]

L’œdème-faisceau, ras­ant à fleur de silence l’oblique de la lande. C’est la fatal­ité de notre poussée qui nous devance et nous attend. Nous por­tons son action en nous, et mal­gré nous.

Nous ne croyons plus en son aligne­ment par­fait avec la lim­ite de notre monde. Nous élisons son sou­venir afin de pou­voir en par­ler sans jamais l’aborder.

Les freins amor­cent la descente, et nous devenons les dolents de la cible.

Présentation de l’auteur

Antoine Loriant

Né en 1997 et vivant dans le Sud de la France, mon intérêt porte majori­taire­ment sur les ques­tions de croy­ance, de débor­de­ment, et d’altérité. Écrivant et dessi­nant en sus de mes études de philoso­phie, mes recherch­es actuelles se por­tent sur la fig­ure de Mau­rice Blan­chot ain­si que sur la struc­ture comme parole cachée au sein du roman.

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Carole Mesrobian

Car­ole Car­cil­lo Mes­ro­bian est poète, cri­tique lit­téraire, revuiste, per­formeuse, éditrice et réal­isatrice. Elle pub­lie en 2012 Foulées désul­toires aux Edi­tions du Cygne, puis, en 2013, A Con­tre murailles aux Edi­tions du Lit­téraire, où a paru, au mois de juin 2017, Le Sur­sis en con­séquence. En 2016, La Chou­croute alsa­ci­enne paraît aux Edi­tions L’âne qui butine, et Qomme ques­tions, de et à Jean-Jacques Tachd­jian par Van­i­na Pin­ter, Car­ole Car­ci­lo Mes­ro­bian, Céline Delavaux, Jean-Pierre Duplan, Flo­rence Laly, Chris­tine Tara­nov,  aux Edi­tions La chi­enne Edith. Elle est égale­ment l’au­teure d’Aper­ture du silence (2018) et Onto­genèse des bris (2019), chez PhB Edi­tions. Cette même année 2019 paraît A part l’élan, avec Jean-Jacques Tachd­jian, aux Edi­tions La Chi­enne, et Fem mal avec Wan­da Mihuleac, aux édi­tions Tran­signum ; en 2020 dans la col­lec­tion La Diag­o­nale de l’écrivain, Agence­ment du désert, paru chez Z4 édi­tions, et Octo­bre, un recueil écrit avec Alain Bris­si­aud paru chez PhB édi­tions. nihIL, est pub­lié chez Unic­ité en 2021, et De nihi­lo nihil en jan­vi­er 2022 chez tar­mac. A paraître aux édi­tions Unic­ité, L’Ourlet des murs, en mars 2022. Elle par­ticipe aux antholo­gies Dehors (2016,Editions Janus), Appa­raître (2018, Terre à ciel) De l’hu­main pour les migrants (2018, Edi­tions Jacques Fla­mand) Esprit d’ar­bre, (2018, Edi­tions pourquoi viens-tu si tard), Le Chant du cygne, (2020, Edi­tions du cygne), Le Courage des vivants (2020, Jacques André édi­teur), Antholo­gie Dire oui (2020, Terre à ciel), Voix de femmes, antholo­gie de poésie fémi­nine con­tem­po­raine, (2020, Pli­may). Par­al­lèle­ment parais­sent des textes inédits ain­si que des cri­tiques ou entre­tiens sur les sites Recours au Poème, Le Cap­i­tal des mots, Poe­siemuz­icetc., Le Lit­téraire, le Salon Lit­téraire, Décharge, Tex­ture, Sitaud­is, De l’art helvé­tique con­tem­po­rain, Libelle, L’Atelier de l’ag­neau, Décharge, Pas­sage d’en­cres, Test n°17, Créa­tures , For­mules, Cahi­er de la rue Ven­tu­ra, Libr-cri­tique, Sitaud­is, Créa­tures, Gare Mar­itime, Chroniques du ça et là, La vie man­i­feste, Fran­copo­lis, Poésie pre­mière, L’Intranquille., le Ven­tre et l’or­eille, Point con­tem­po­rain. Elle est l’auteure de la qua­trième de cou­ver­ture des Jusqu’au cœur d’Alain Bris­si­aud, et des pré­faces de Mémoire vive des replis de Mar­i­lyne Bertonci­ni et de Femme con­serve de Bluma Finkel­stein. Auprès de Mar­i­lyne bertonci­ni elle co-dirige la revue de poésie en ligne Recours au poème depuis 2016. Elle est secré­taire générale des édi­tions Tran­signum, dirige les édi­tions Oxy­bia crées par régis Daubin, et est con­cep­trice, réal­isatrice et ani­ma­trice de l’émis­sion et pod­cast L’ire Du Dire dif­fusée sur radio Fréquence Paris Plurielle, 106.3 FM.

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