Antoine Loriant, provençale
Il t’est un voyageur fidèle qui, loin dans le matin,
boit à la corne de tes yeux.
Et, l’étoile t’hommage,
publie ses pensées sur le sable.
L’exil est une conviction avec laquelle tu nais.
Bête de psaume dans le tintement des cloches
elle danse sa joie avec les épées, là, dans la digue, au-dessus.
Une moitié de lance,
bonne qu’à délirer les aveugles et les marées,
qui, foulée dans ton réveil,
habille chaque coquillage en oracle.
Provençale
Carillon dans le bois le feuillage osseux
plein de claquements de langue
saluent le cortège pourpre des étoiles.
Aux murs de l’été, tardives, elles viennent semer la rosée mauve
dans les ombres aux articulations mauvaises
et sur le rêve des marcheurs oubliés.
Sous le marteau de l’azur tombent des coins du ciel des alarmes
et avec le débris fou des pastoureaux.
Les voûtes de plumes abritent encore le secret des légendes perdues et le prix des mythes.
Bruns le jardin et la paille et les heures, humbles, qui somnolent sur les genoux du désastre.
Du vin des tournesols ayant perdu son or, coulé loin dans les astres,
Se tordent les fronts brisés au-dessus d’un matin précoce, oraison de poussière brune.
Cette constellation-là s’ouvre en signe mauvais
et fait bleuir le soleil du soir à l’image des jours anciens.
Le lendemain sombre en silence meurt dans la pierre.
Les larmes du blé viennent peser sur les épaules de la saison pour toucher au soir.
Un éclair rouge court dans les flaques de la nuit,
et un vitrail, là-bas, éclate de mutisme.
Les marcheurs d’omissions
Réduite entre les poings blancs des nuits successives,
Sous la poussière de l’astre lunaire, tour à tour,
le voyageur devient errant et le errant pèlerin.
À la sortie des cercles de leurs feux,
ils guettent dans le loin son visage dissous.
Leur joie chante le pourrissement noir du silencieux,
Chaque jour, avec leurs lèvres.
Des araignées s’encerclent à son cœur,
et ses mots déjà sont gagnés par la viscosité de la soie.
Comme phalènes penchées sur le vide ils viennent confesser leurs aiguilles,
et lui reproche le manque de lumière qu’ils lui dévorent.
Le devance un soupir qu’il ne souvient pas avoir poussé.
Le nœud de ses mains bouleversées se referme sur un orchestre
Dont lui seul suppose la gratuité.
Jus absentis
Juste au front de la loi,
juste,
les régiments avariés
t’accordent du bas de leurs hivers passage.
Juste derrière le verre du jour,
juste,
celui qui toujours parvient le dernier
aux quatre coins du sang, la forge.
Sans mots ce qui monte de la vie,
sans mots.
Les sépultures en file se passent la laine
gardée dans le coffre bleu de leurs bottes.
Tu jettes tout au feu de forge
juste.
Où gonflent les rivets d’or dépareillés
tu frappes et démontes et laboures l’héraldique mordu à blanc.
Ta main glisse juste entre le sommeil et l’enclume,
juste.
En vain tu t’es promis des armes contre le temps
Et les régiments te saluent de sous le charbon.
Sans mots ce qui monte.
Juste.
900 secondes et quelques kilomètres
Aux sommets du doute, nous glissions sur la pierre fendue de lumière.
Carburant d’ozone, le souffle pris dans un air à défaut sur un pur à vibrations de vaste.
Cible des couleurs polymères, soleil contre-soleil
Comme un éclair frappant la neige.
Un langage - soupir
de brandons en feu
Fusillant nos ombres contre l’enclume des duvets mauves-
bleus,
fourrure des montagnes
L’odeur hachurée des convulsions […]
L’œdème-faisceau, rasant à fleur de silence l’oblique de la lande. C’est la fatalité de notre poussée qui nous devance et nous attend. Nous portons son action en nous, et malgré nous.
Nous ne croyons plus en son alignement parfait avec la limite de notre monde. Nous élisons son souvenir afin de pouvoir en parler sans jamais l’aborder.
Les freins amorcent la descente, et nous devenons les dolents de la cible.