Les 43 ans de la revue Osiris
Il faut revenir à l’extrême qualité de la composition de cette revue de poésie internationale. Dès la couverture, le collage puissant de Robert Moorhead (effectué à partir de l’interprétation historique d’une majuscule grecque) donne le ton de l’ouvrage : l’écriture importe et ce sous ses formes les plus parlantes (d’ici : les USA et d’ailleurs : Algérie, Allemagne, Angleterre, Australie, Espagne, France, Italie, Québec, Ontario). Les poèmes en allemand de Christophe Fricker et Günter Kunert et en espagnol d’Antonio Rodriguez Jimenez sont présentés avec leur traduction. Pour les poèmes en français (Djelfaoui, Farre et Antoine Boisclair) et en italien de Flavio Ermini seule la version originale est présente. Osiris accomplit son œuvre, la force créatrice est régénérée : les langues sauvées du chaos babélien se déploient les unes près des autres. Chacune a sa place bien orchestrée, elles se font écho. S’élève en final un chant polyphonique où chaque langue retrouve et ajoute son unicité. Ainsi en est-il des dix-neuf poètes présents, la pluralité des tessitures, des rythmes, formes ou thèmes abordés, garantit à chaque poème et à l’ensemble des textes publiés une belle singularité. Deux œuvres artistiques de Robert Moorhead Stratification 2 et Dome on the Rock et une photographie d’Andrea Moorhead Weatherhead Hollow Guilford, Vermont, en noir et blanc, permettent au souffle du lecteur de se poser et de reprendre de plus bel. Grâce et gravité semblent être les mots clés de l’image offerte comme un interlude, le paysage invitant à une poursuite poétique où l’émotion se mêle à la réflexion (et aux réflexions de la lumière). Parmi les poètes publiés, joie de découvrir (entre autres) Irish Crapo But what does the fox, loping /across my neighbor’s wind-blown meadow, /mean ? Ce vers de John Sibley Williams extrait de son poème Truce into a grandmotherly story of angels est par l’image évoquée et la musique magnifique. Quant aux poèmes de Patty Dickson Pieczka, ils lient ardeur et profondeur, originalité et maîtrise, extrait de War Hymn: No onyx beads, no jasmine candle/ nor charm from the old woman/ who reads pulses and tides/ can know the soul of longing. Les quatre poèmes d’Andrea Moorhead sont comme des fleurs simultanément prises dans la glace et la brisant: where the heart still beats /redder and redder. En quelque sorte une beauté qui se serait faite Osiris.