Danielle Fournier, Icis, je n’ai pas oublié le ciel
L'adverbe au pluriel, qui revient comme un leitmotiv, signifie que la narratrice de ces poèmes occupe nombre d'angles qui lui permettent de vivre en soi, en lieu et place des autres, dans une perception aiguë du réel : la place infirme des femmes, les plaies engrangées, le passage du temps.
La voix âpre de ces poèmes en prose n'évacue pas le chagrin ni le doute ni la solitude ; à rebours, elle met l'être dans l'intime posture d'un défi à ce qui se déroule, à "ce qui marque les choses".
Le temps nous expose et nous largue, où sommes-nous, dans ce temps distendu, informe ?
Au "icis" pluriel correspond le multiple des femmes, plurielles, diverses, différentes qui "entament la lente progression du désir qui se tisse au fil des histoires" (p.24).
La poète "déshabitée", "au nom égaré", pose nombre de questions prégnantes sur sa place, sur l'être, sur le temps ("le monde recommence quelques fois").
Cette poésie, lucide phénoménologie du quotidien, enregistre les pulsations entre soi et l'autre du monde : "Les choses ont une âme. Elles portent la fragilité du monde".
Danielle Fournier, Icis, je n’ai pas oublié le ciel, Les Lieux-Dits Cahiers du Loup bleu.
Hymne à la maison que l'on porte en soi - regard, réserve, prospection -, le poème de Danielle Fournier illumine par ses questionnements et la beauté des mots qu'ils véhiculent.