François Clairambault, Les Anges sont transparents
« Pour écrire, il faut un cœur bouleversé », nous dit François Clairambault dans le premier recueil qu’il publie. Dans la majorité de ses poèmes - comme autant de textes écrits « sur le motif » - il nous livre une vision du monde où l’empathie se mêle à la compassion. Sans jamais se déprendre d’une forme d’émerveillement.
Comme dans les livres de Christian Bobin, il y des anges dans les poèmes de François Clairambault. Chez lui ils sont « transparents » et « contagieux ». Autant dire qu’ils sont partout. Dans le plus infime comme dans l’anecdotique. Et à la suite de Bobin affirmant que « le plus familier est tissé d’éternel », François Clairambault sait nous plonger dans les réalités les plus ordinaires en les auréolant de mystère et de merveilleux.
Dans un square, voici un homme « dans son manteau de feuilles mortes ». Dans cet autre square, des mamans tissent « des vanneries de paroles ». Sous le pont du périphérique, « une famille de carton s’accroche au mur ». Sur le grand boulevard, une femme « cuit des rissoles au feu de son petit réchaud ». Et le poète parle de sa « dinette incongrue ». Au bord de la voie ferrée, les coquelicots deviennent « gouttelettes de sang dans l’haleine brumeuse du train matin ».
François Clairambault, Les anges
sont transparents, préface de Jean-Pierre
Lemaire, éditions L’enfance des arbres,
130 pages, 15 euros.
François Clairambault est un homme aux aguets, traque le passage des anges à la sortie du métro, derrière la vitre d’un bistrot, à, l’intérieur d’un hôpital, Il regarde une petite fille qui « course un pigeon » et voit la nuit tomber « sur des filets de jeunes dames » postées sur les trottoirs. Quand c’est la veille du printemps, il note que « les tapis volants se tiennent prêts sur les rebords de fenêtres/à côté des sous-vêtements qui respirent enfin ». Et quand il pleut, « un torrent de diamants, nous dit-il, s’abat sur le caniveau ».
Transfigurant le réel, il « repeint » sa vie « avec des gens ». Il nous parle de l’amour, d’une femme et du « grenier » de ses yeux (« Quand mes mains osent les tiennent/il n’y a plus aucune distance entre l’infini et nous »). Il nous parle de l’ami disparu et, donc, de son « cœur bouleversé ». Pour approcher ainsi le mystère de la vie, François Clairambault a su s’abreuver à certaines sources. Elles coulent en minces filets dans son recueil quand il évoque le Zacharie ou l’enfant prodigue des Ecritures. « Peut-être le poème est-il l’instrument les plus approprié pour décrire ces avancées, ces retards, ces surprises de la vie spirituelle, ce voyage qui nous emmène vers une présence, si près de nous », souligne le poète Jean-Pierre Lemaire dans la préface de ce livre. Il a raison.