Georges Guillain, Parmi tout ce qui renverse

Avec Parmi tout ce qui renverse, Georges Guillain vient  achever le cycle commencé avec Compris dans le paysage (Potentille, 2010), complété par Avec la terre au bout (Atelier La Feugraie, 2011).

Cet ouvrage, Georges Guillain, habitué des rencontres avec le public avec son Prix des Découvreurs, a souhaité le diviser en trois parties, dont la troisième vise à apporter quelques précisions sur son travail et sur les circonstances de son écriture pour un peu accompagner le lecteur sans vouloir lui imposer quoi que ce soit. Georges Guillain privilégie cette démarche de passeur qui distribue quelques clés, plutôt que de se couper d'un lectorat toujours disposé à découvrir la poésie contemporaine. Car souvent par trop de références culturelles, certains poètes se coupent d'un lectorat potentiel qui se sentent perdus à la lecture. Ici, tout le monde ne connaît pas le Libro dell'arte,  le château de Lacoste, ni la Via del lupanare, ni Aimé Bonpland, tous regroupés dans cet ouvrage par la magie de la poésie.

Nous suivons donc Georges Guillain dans un itinéraire littéraire d'un « Il » poète. Pas forcément lui, pas forcément autre mais poète assurément.

 

Georges GUILLAIN, Parmi tout ce qui renverse, Les Castor Astral - "Les Passeurs d'Inuits", 2017, 128p., 12€ ;

Georges GUILLAIN, Parmi tout ce qui renverse, Les Castor Astral - "Les Passeurs d'Inuits", 2017, 128p., 12€ ;

On découvre un Il amateur de jardins, parfois botaniste, profitant de ses voyages pour visiter les jardins, les parcs avec la curiosité et la patience du jardinier des mots :

Patient / Il prend le temps
que lui vienne une pensée intacte s'appuyant
du dos sur le blanc d'un linge ou d'un coussin
pour travailler comme une poutre
travaille / maintenant le fragile édifice
de sa conscience qui se souvient
de la course des nuages du corps splendide à

 

                                                                                      traverser

Le poète qui cherche l'inspiration dans les moindres détails du monde :

"si fraîche tant aimée à pas lents Il
contemple la mer même si chaque plaisir de l'eau
reste un geste faucheur"

"ce début d'averse qui recolore / autour de lui les choses simples // autrement"

 Et le poète qui s'interroge sur son travail, sur la définition même de la poésie quoi? qui serait plus réel ou plus beau

mais comme le souhaitait le poète / William Carlos Williams Il aimerait /qu'écrire soit fait de ces mots lents et prestes / ouverts à l'attente et pénétrants jamais distraits / qui laissent la parole aux choses / non pour les vider d'invention de mouvement // pour en prendre mesure

 Patience et discrétion du poète, doutes et interrogations aussi :

enfin Il sait
qu'il n'occupe qu'un petit espace
ridicule sur le globe mais il entre
dans le tableau comme un grand
lépidoptère laissant un peu de ses poudres

jaunes au glacis trompeur des feuilles / bombyx
ou machaon Il révise à son tour les échelles / Il
se fait peintre
                                                                                il a l'œil

alors // à l'intérieur / de lui // Il / continue /  de tomber / sans que personne // l'entende

Toujours "aller content" à la recherche de la musique et de la lumière des mots :

sa langue lumière
Il ne la retient plus prisonnière depuis longtemps

Et donc après cette présentation de Il dans la première partie, nous découvrons dans la deuxième quelques uns de ses poèmes. Beaucoup de voyages dans cette partie, mais pas pour collectionner les destinations, juste y chercher du sens à sa quête de "langue lumière". Avec aussi une variété dans la forme poétique et quelques jeux typographiques  qui rompent toute monotonie.

Le livre d'un passeur d'une poésie à faire découvrir.