Ivan Dmitrieff, Sente (extrait), et autres poèmes
SENTE (extrait)
une absence native procède à l'espace, rien ne manque ; pierre, et transparences, dans le jet du temps ; cet amour, ce silence ; ce qui arrive d'herbe, de racine, d'ombre claire sous la trouée des buissons ; d'oiseau de ton pouls dans la lumière ; de danse d'arbre et d'air, de sente et de pas ;
une énergie ; emplit, et déborde ; vallonnée de ciel et de buissons, terre assise, racinée, oiseau jeté dans le vent ; alors tissée du vert et du nuage, de la sente et du gué ; toujours venue à la beauté, à l'instant ; jouant l'horizon et le soleil, arbre et ronce, et ruisseau ;
une présence, ouvre ; paisible, où survient toute lumière : transparences et cri d'oiseau, pierre sous les feuillages, ombre et trou ; que ta main repose sur l'herbe est aussi son visage, infini ; ce rougeoiement des baies, ce ciel-au-dedans, témoin du jour ; ce repos et ce mouvement d'un corps, vécu par la vie ;
DANS LA LUMIERE EN FILIGRANE DE L’OUVERT ( extrait)
et au sein de toutes choses, matière et esprit se réorientent continûment vers la résonance d'un nouvel équilibre, leur chant est la demeure de l'invisible qui toujours se déploie dans le peuplement des pierres et des corps, dans la vibration intime de leur présence que poètes nous apprenons patiemment à voir, nous lisons de l'univers le poème, et c'est lui qui nous lit, et c'est lui qui nous dit lorsqu'en notre cœur nous disons du poème l'infinie parole, le chant ininterrompu qui depuis les nues primordiales forme dans l’éther le visage de chaque existence, et nous tendons profondément l'oreille pour accueillir du chant singulier de chaque être du ciel et du sol, et de nous-mêmes, la langue, et poésie originelle, dont nous sommes tous en ce monde le chemin et le voyage qui sans fin vibrent avec la lumière
ENTONNE
Entonne
entonne le chant vivant de l’ouvert
entonne
entonne
c’est le chant de ton voyage
le chant vertigineux de ton voyage
dans la densité des mondes
entonne
entonne
c’est lui ton chemin d’existence
c’est lui ta boussole de réalité
chant donné qui conduit le souffle
à travers les forges de la matière
chant donné qui conduit le souffle
au-delà du temps et de l’espace
chant donné qui conduit le souffle
à la bouche de l’ange
chant donné qui conduit le souffle
aux tréfonds du très haut silence
entonne
entonne le chant qui est en toi
ce voyage de vie
de toutes les nuits
et de tous les soleils
ce chant manifesté
de l’océan des mondes
des paysages millénaires
sculptant des montagnes émeraudes
des sommets éclatants du soleil
offerts à la neige
des jours qui tanguent
telle une barque de lumière à la dérive
des épreuves initiatiques du cœur
dans les labyrinthes de l’expérience
rouges et déroutants
des rebonds terribles de colère et de doute
des épines d’une douleur de cauchemars
dardant les plaies de l’âme
des doigts frais de la lumière
levant les rideaux d’un long sommeil
des étreintes de l’aube étincelante
et du feu naturelle de la joie
entonne
entonne
c’est le chant du voyageur suprême chant
de cette jouissance d’être lancée
dans les étoiles chant
du voyage de l’ouvert entré
dans la danse des seuils chant
d’exploration du vivant éployé
dans l’entrelacs d’amour
entonne
entonne
ce voyage !
ce chant !
ce voyage !
ce chant ! de ton existence
offerte à l’existence
comme elle est à la beauté autant qu’à la boue
comme elle est aux délices autant qu’aux larmes
qui traverse les terres innombrables du ciel
comme elle est à l’éternité autant qu’au moment offerte
à l’existence multiple de ses vies simultanées offerte
à l’ instant de chacun de ses possibles offerte
à ce jeu parfait de l’immensité consciente
entonne
entonne les mots et le sang du cœur entonne
les formes du voile de l’ombre entonne
les rives flamboyantes de la lumière entonne
les sonorités du vase humaine
car c’est ton étreinte céleste des pôles de la vie
c’est ton voyage infini du chemin du retour
ton chant ému du soufre de l’âme
ton chant ému du caducée du corps
ton chant ému du gui du temps nouveau
vers le centre absolu de toi-même
chant
de ta réalité manifestée
dans le miroir des formes
entonne
entonne
entre encore et encore
dans la profondeur de ta matière
car c’est elle seule ici-bas qui te mène
vibrant et solitaire
dans l’espace vivant entre les choses
vers le seuil de ton être
entonne
entonne
du jeu divin de l’ouvert
enchante le monde
enchante le monde