Ludovic Bernhardt, Réacteur 3 [Fukushima]
Loin de l’introspection ou de la séduction, Réacteur 3 [Fukushima] se veut témoignage ou avertissement, ce qui n’interdit pas une vraie musicalité, au moins dans les premiers poèmes.
Car, à mesure que le narrateur-robot se désagrège, l’expression prend d’autres formes. Il y a les mots rares ou surprenants qui se tamponnent ; il y aussi les blancs, les chiffres ou les plans du réacteur comme si nous y étions enfermés. Le lecteur est conduit, pas toujours en douceur, de la curiosité à l’angoisse à travers des descriptions tantôt oniriques tantôt techniques, une ponctuation déstructurée ou des graphies comme informatisées :
Massacre des fonctions ventilatoires (narines greffées de tubes de silicone). Débrailler des entrailles. Brûler des composants mutés en dioxines. Tandis que des coulées de codes aiguillonnent les évangiles encéphalites. C6 81 56 28 09 34 31 D2 F9 9C D6 BD 92 ED (…)
Une lecture à voix haute serait stoppée nette à l’image du robot dans les décombres, à moins que d’autres effets viennent amplifier ces sensations terribles et nous plonger dans le cœur de la centrale détruite : lumières, bruitages, fumées, projections…
Ludovic Bernhardt, Réacteur 3 [Fukushima], Editions Lanskine, 64 pages, 13 €.