Murielle Compère-Demarcy, Dans les landes de Hurle-Lyre

Une mer incendiée, retournée : c’est en compagnie de Blaise Cendrars, Antonin Artaud et des indiens du Montana, que Murielle Compère-Demarcy nous emmène, morts ou vifs, dans un voyage-dédale à travers les mots qui surgissent comme autant de gouttelettes qu’en compte l’océan.

 

 

Entrer dans le monde de Murielle Compère-Demarcy, c’est renverser le paysage, le mettre tête en bas ; et l’eau des étangs, des mers, des fleuves grossis des eaux de pluie, forment alors une planète fluide à marée montante et descendante, fluide qui expulse ses poissons rouges/hors du bocal intérieur/et la rage rentre dedans/et le clair de terre rentre dedans/et el ciel rentre dedans/et le monde-poème rentre dedans.

Ce premier objet nageant bien identifié – le poème comme manière liquide de dire le dedans –, Murielle Compère-Demarcy le dédie à Blaise Cendrars, qui n’aime pas le genre « poète », dans son ouvrage récent, « Dans la lande de Hurle-Lyre », paru chez Daniel Ziv (Z4 éditions) en fin 2019. 

Sortir de l’enfermement qu’est la vie, une vie, à travers le poème qui lui-même sort de l’eau déguisé en poisson rouge, poisson qui est le vin (rouge) de l’écriture, tel est l’exercice risqué, tête en bas, à sang renversé, que tente l’autrice.

Murielle Compère-Demarcy, Dans
les landes de Hurle-Lyre
, Z4 éditions,
illustrations Jacques Cauda, 2019, 138 p., 14 €.

Ce périlleux voyage, tête en bas, la répétition n’est pas superflue, mort en bas, est armé du revolver à deux balles déjà présent dans un précédent ouvrage de Murielle Compère-Demarcy1, « Alchimiste du soleil pulvérisé – poème pour Antonin Artaud», également édité par la maison Ziv en janvier 2019. Il faut sortir armé en effet lorsqu’on fréquente les totems Blaise Cendrars et Antonin Artaud. Et tirer, tirer sur les silhouettes habillées en doigts rouges du cœur (qui) dégouttent des mains. Nous sommes au centre, au plein de l’écriture qui rend lucide donc malheureux, dans le vin de l’écriture. Ivresse obligatoire et répétée par le vin ensorcelant du soleil.

C’est cela, sortir de là, sortir de cette poésie géante qui tue l’ordinaire des vies et fait mal, mal ; comment grandir sans se faire mal ? Hein, comment ? Questionnement sous-jacent : si la vie est un attentat permanent, comment faire danser la mort sans se donner à elle corps et âme ? La mort comme seule vie possible. Comment ?

Coupez mes mains, demande alors Murielle Compère-Demarcy aux lecteurs. Car c’est bien à eux qu’elle s’en remet. La vie est une maladie mentale non reconnue. Antienne.  Alors, lecteurs, si vous vouliez bien tuer les mains de cette Murielle-là, au moins ces mains qui retiennent le cri, peut-être ce cri tuera enfin, armé du revolver à deux-balles, et Cendrars, et Artaud ; ces douloureux passeurs du temps éparpillé. Se retrouver en morceaux, voilà l’apport de la lucidité. Comment guérir de la vie ?

Un autre voyage peut-être pour reformer, réformer, le corps-poème qui protégerait de la grandeur dévastatrice d’un Cendrars, d’un Artaud ? Murielle Compère-Demarcy le tente, posant son sac au Montana, ce pays de montagnes, de neige, d’isolement. La symphonie du nouveau monde, écrit-elle. Le tout sacré des nations indiennes. À poésie renversée, essorée de l’écriture, au royaume de Wakan-Tanka. Elle rencontre le peuple de l’eau du milieu, celui de l’eau renversée : Montana nuage rouge, poisson rouge sorti de son bocal.

Un poème renversant : Un autre monde se dévoile,/une autre réalité se lève/et nous sommes toi et moi dans le paysage/et non plus devant. Au cœur des quatre directions…

L’indien est l’eau, l’indien est un ciel ; il est la lenteur de la longue seconde qui égrène la seconde. Murielle Compère-Demarcy devenue indienne, herbe courbée par le vent.

Faut-il poursuivre, nager encore dans l’océan renversé dans lequel Cendrars, Artaud, deviennent baleines ? Juste un poème encore, définitif, indien, pour sûr : Ralentir l’action/Défense parfaite/Le poème est là.

Mais encore, rebondir… et puis, non.

 

Note

  1. Murielle Compère-Demarcy, Alchimiste du soleil pulvérisé, Z4 éditions, la diagonale de l’écrivain, illustrations Jacques Cauda, 2019, 136 p., 11,50 €.

 




Murielle Compère-Demarcy, Alchimiste du soleil pulvérisé

Que l’on relate la vie, le théâtre d’Antonin Artaud, se référer à la dissidence, à l’ouverture vers la nouveauté, la créativité, et les audaces, pour honorer la puissance époustouflante de l’œuvre  du dramaturge, est un préalable, une posture attendue, une tentative hasardeuse et ardue.

Cette danse avec l’homme solaire Antonin Artaud est une envolée cosmique de belle envergure. Son auteure, Murielle Compère-Demarcy, "fait sauter les verrous de la Grande Pusillanimité gonflée de sa  baudruche d'Auto-Suffisance",  ne nous épargnant rien, et toutes les facettes de cet homme si puissant et si meurtri  sont habitées par l’écriture de ces pages. 

Le lecteur est immédiatement attiré par le format de cette collection, dont Philippe Thireau prend grand soin, ce choix-ci l’atteste ! Tous les éléments physiques du volume racontent ce souci d’exigence.La typographie et les choix graphiques, l’occupation de la page de couverture, qui offre un portrait d’Artaud réalisé par Jacques Cauda, la quatrième de couverture, la qualité du papier, les éléments du paratexte. On attend tout, une évasion, un lieu fertile en interrogations, en réflexions, en partages. On n’est pas déçu.

Murielle Compère-Demarcy, Alchmiste du soleil pulvérisé, Z4 éditions, 2019, 131 pages, 11 € 50.

Comment s’opère le miracle, cette immersion dans l’univers de cet homme soleil, brûlé par les chants inexplorés de son art ? Le dispositif certainement, une écriture inclassable, qui se dresse hirsute et magique, comme un feu d’artifice ou bien comme la pensée d’Antonin Artaud, puissante et explosive.

Prose poétique, poésie tour à tour descriptive et évocatoire, immersions dans les délires ou le monologue intérieur du dramaturge, dialogue avec celui-ci, grâce aux changements de pronom personnel, Murielle Compère-Demarcy est dans cette vitesse et dans ce souffle battant du discours de celui à qui elle s’adresse, à qui elle offre la parole. Les jeux avec la typographie, avec l’espace scriptural, l’appareil tutélaire,

 

les pliures du silence
sur l'arête vive
du cri
tendent la ligne
rouge oppression
de pulsion
anthropophage
de volute d'ombilic
ondoiements de jouissance
et de défécation
dans les grandes oeuvres annales
du cri primal
en avortée tension
jusqu'à sa purgation

L'auteure devient celui-ci, Antonin Artaud, le regarde, entre dans sa transe, ouvre son univers. Discursive, métaphorique, aléatoire, alvéolaire, pragmatique, démesurée, et surtout témoin de la communion d'un visionnaire et d'une poète, l'allure de ces pages nous emporte courir avec celui qui a offert son génie au théâtre, son humanité à ses semblables. 

Le rythme effréné de ces pages nous mène tel un torrent de folie et de puissance évocatoire... la folie, cet enfermement qui fut aussi cette liberté de dire, d’agir, de créer, est si bien racontée, car comment rendre compte de ceci, de cette impossibilité à ouvrir l'espace du cerveau Artaud, de l'âme Artaud, si ce n'est en devenant la globalité Artaud, comme le fait Murielle Compère-Demarcy qui tient ce fil d'Ariane, ce fil ténu entre norme et déviance, entre terre et ciel.

Le vocabulaire d’un niveau tour à tour courant, familier, soutenu, et les jeux de mots, les néologismes, tout participe de la mise en œuvre de cette toile réalisée avec des jets de couleurs, de touches ponctuées de traits tendus, comme une corde, sur laquelle a avancé Antonin Artaud, sur laquelle s'est aventurée l'auteure de l'Alchimiste. Elle parvient à  plonger dans la conscience de ce personnage marquant du paysage théâtral français  du vingtième siècle. Elle réussit ce tour de force qui est de nous ouvrir aux pensées puissantes de cet homme remarquable. La folie, aussi, est donnée à ressentir, à connaître non pas grâce à une perception intellectuelle, mais grâce à cette immersion miraculeuse dans la vie intérieure de cet être tourmenté et fertile. C’est ceci que nous offfre l’auteure, qui abandonne les dernières pages de ce livre remarquable à  Antonin Artaud :

 

Ce que je suis
n'est pas inscrit
n'est pas représenté
dans l'homme
l'homme
n'est qu'un bloque opaque
et qui se meut
avec le réprimé
refoulé
et irrévélé
dont chaque geste
est un révélation spontanée.

Je suis l'infini.

 

 




Murielle Compère-Demarcy, Trois chevreuils noirs…

© Jacques Cauda

 © Jacques Cauda

 

 

 

Trois chevreuils noirs
 sortent du bois du sommeil
L'alouette rouge fuse
dans la plaine intérieure
L'espoir allume
sur ses miroirs de plume
les ailes de l’ailleurs

avant la brume
aux naseaux des aumailles
avant
l'endormissement
de la sève au bord du sevrage
hivernal

L'hiver amorphe rêvera-t-il ?

Qui fera feu de tout bois
dans l'âtre veilleur
couché comme un chien prêt de s'ébattre
sur le seuil aux abois

Quand,
l'affût
marquera-t-il l'arrêt ?
Quand ,
s'activera
l'instinct prédateur ?

La montée de sève débourre déjà
ses velours mauves éclos en écailles

Passée, l'hibernation automnale
Levé, le philtre des bois dormants
Réveillée, la respiration endormie
Le sommeil tente ses premiers pas
à la descente du nid

De quelles forces d'être
de quel rougeoiement d’altitude
le printemps explosera ?

Le chien bleu rieur, la chienne rouanne
mon épagneul picard,
flairent avant l'heure
les odeurs
printanières

À Balkis

La buse miaule
le chevreuil aboie
mon petit chat crève
Je feule, je crache, je meurs

de mon petit chat mort
comme une Bête
Tandis que l’aube lève

s’impatiente
sort les griffes
de ne trouver parole
 l’affût rêve
par l’ombre féline
un peu de lumière

Petit chat
mon petit chat mort
je te ressuscite, te hèle, et je te ronronne
te cheville
à cœur-caresse
Je te parle
Tu renais
dans ce qui respire
de ce qu’il me reste
de ce qui me traîne
Je hurle
derrière mes yeux de Bête
ton cri fauve de chat sauvage                                                                                                                                          

La nuit se dilate
upilles désailées
Je plante mes canines
peine sourde, cri des larmes
rentré,
dans les plumes de ton sommeil                                      

 

La vipère du désir s'active
 ensorcelle la broussaille du soir
 jusqu'à son nid d'étoiles             
où les oiseaux de l'aube
reviendront boire

 bientôt le jour
 les langues de venin
noueront le sang
suffoqué sous l’épiderme

 

 

La fatigue dégonde
une fenêtre dans le crâne

dormante sur l'épaule

Plein vent un pic-vert ricane
envol ondulé sous le velum
des idées qui s'écharpent
La volière des pensées est vide

La tenaille du soleil retire
une écharde
rire rouge flamboyant
entre les dents
de ta migraine qui cogne

Derrière le rideau qui gondole
un oiseau est rentré
dans le ciel éventé de ta tête
il tisonne l'alerte
dans le feu fané des décombres
où dorment fleurs de cendre
les arachnides du temps 
que la mort tisserande déchire
La cage est ouverte

Sous le manteau des coups de lames
feux sanglants de la veille
s'activent
esquivent dans le foyer décomposé
les gestes courts
les paroles torves paradoxales

celles qui font mal

Reposée la fatigue
déposera
sa mue dans l'âtre
jusqu'à
la prochaine attaque

de quelle nouvelle créature hybride
de quel nouveau monstre du Langage ?

© Jacques Cauda

 © Jacques Cauda

Présentation de l’auteur

Murielle Compère-DEMarcy (MCDem.)

Bibliographie

  • Je marche---, poème marché/compté à lire à voix haute et dédié à Jacques DARRAS, éd. Encres Vives, 2014
  • L'Eau-Vive des falaises, éd. Encres Vives, 2014
  • Coupure d'électricité, éd. du Port d'Attache, 2015
  • La Falaise effritée du Dire, éd. du Petit Véhicule, Cahier d'art et de littératures n°78 Chiendents, 2015
  • Trash fragilité (faux soleils & drones d'existence), éd. du Citron Gare, 2015
  • Un cri dans le ciel, éd. La Porte, 2015
  • Je Tu mon AlterÉgoïste, éd. de l'Ecole Polytechnique, Paris, 5e, 2016
  • Signaux d'existence suivi de La Petite Fille et la Pluie, éd. du Petit Véhicule, coll. de La Galerie de l'Or du Temps ; 2016
  • Co-écriture du Chiendents n°109 :  Il n'y a pas d'écriture heureuse, avec le poète-essayiste Alain MARC, éd. du Petit Véhicule ; 2016
  • Le Poème en marche suivi par Le Poème en résistance, éd. du Port d’Attache ; 2016
  • Dans la course, hors circuit, éd. Tarmac, coll. Carnets de Route ; 2017 ; réédition augmentée en 2018
  • Poème-Passeport pour l’Exil, avec le poète et photographe ("Poétographie") Khaled YOUSSEF éd. Corps Puce, coll. Liberté sur Parole ; mai 2017
  • Nantes-Napoli, français-italiano traductions de Nunzia Amoroso, éd. du Petit Véhicule, Cahier d’art et de littératures n°121, vol.2, Chiendents, 2017
  • …dans la danse de Hurle-Lyre & de Hurlevent…, éd. Encres Vives, coll. Encres Blanches n°718, 2018
Murielle Compère Demarcy

Publications en revues : Phoenix, La Passe, FPM-Festival Permanent des Mots, Traction-Brabant, Les Cahiers de Tinbad, Poésie/première, Verso, Décharge, Traversées, Mille et Un poètes (avec "Lignes d’écriture" des éditions Corps Puce), Nouveaux Délits, Microbes, Comme en poésie, Poésie/Seine, Cabaret, Concerto pour marées et silence, … ; sur espaces numériques Terre à ciel, Le Capital des Mots, Recours au Poème

Publications en 2018 dans Nunc, la Revue Europe et Galerie Première Ligne

Anthologies : "Sans abri", éd. Janus, 2016 ; "Au Festival de Concèze", éd. Comme en Poésie, 2017 ; Poésie en liberté (anthologie numérique progressive) en 2017 et 2018 ; citée dans Poésie et chanson, stop aux a priori ! de Matthias Vincenot, aux éditions Fortuna (2017), …

Rédactrice à La Cause Littéraire, écrit des notes de lecture pour La Revue Littéraire (éd. Léo Scheer), Les Cahiers de Tinbad, Poezibao, Traversées, Sitaudis.fr, Texture, Zone Critique, Levure Littéraire, Recours au Poème en tant que contributrice régulière.

Lectures publiques : Maison de la Poésie à Amiens ; Marché de la Poésie, Paris,6e ; Salon de la Revue (Hall des Blancs-Manteaux dans le Marais, Paris 4e) ; dans le cadre des Mardis littéraires de Lou Guérin, Place Saint-Sulpice (Paris, 6e) ; Festival 0 + 0 de la Butte-aux-Cailles ; Melting Poètes à la Galerie de l’Entrepôt (Paris, 14e) ; auteure invitée aux Festival de Montmeyan (Haut-Var) [août 2016 + août 2018] ; au Festival Le Mitan du Chemin à Camp-la-Source en avril 2017 /[Région PACA] ; au Festival DécOUVRIR-Concèze (Corrèze) en août 2018

Invitée du "Mercredi du poète" animé par Bernard Fournier, le 28 février 2018, au François Coppée - 1, Bd de Montparnasse, Paris 6e- présentée par Jacques Darras.

Lue par le comédien Jacques Bonnaffé le 24 janvier 2017 sur France Culture.

Son blog : Poésie en relectures




Murielle Compère-DEMarcy : 3 poèmes

 

Dans un clin /
de lecture
Entre les paupières /
du soleil
Un battement de ciel
Une coccinelle
pointille tout un mot /
sur le recueil de poèmes
que j’effeuille à fleur /
de ta peau

Quelque part / dans un clin
de lecture
Des ailes
feront battre plus loin /
les clôtures
d’ombre du 
soleil.

 

 

***

 

 

IMPRESSION FUGITIVE

L’œil & le photographe
n’auront pas rejoint l’autographe
de l’insecte sur la feuille

Un poème réinvente le cliché
sur une feuille /
Instant recomposé

 

 

***

 

 

 

COUPURE D'ELECTRICITE

un fusible a sauté
dans la nuit de ma tête /
de ma tête-à-poèmes
2 heures après minuit ce n’est rien
le train-tram-rail des rêves
qui roule / Le Directeur du Réseau Central
déféré / dans ma tête qui roule
Sous les verrous / à des éclisses mal
resserrées  / des
kilomètres
des kilomètres de voies se serrent
des parallèles se joignent
à la barre la voix des ouvriers
sans voie déraille / Sang /
Convois de sang

La Grande Société se serre
les fers / Le Directeur
la ceinture / qui prend
ses sbires à témoin
mais il y a maldonne

Tu prends ton bonheur
en première classe / billet à l’œil
tandis
que dure l’Affaire / N’ont pas le temps
de contrôler
n’auront pas le temps
de tout contrôler / trop dur à faire

La faute à personne
La faute à personne

Voie extérieure
Extérieur-Nuit
l’herbe mange le rail
le ram-tram-rail
de la lumière tandis
que tu marches / tu marches
jusqu’à l’emblème une trace d’un peu d’humanité

 

Dans le ciel l’angle obtus d’un fuselage sonne
l’angélus / sept heures
dix-neuf-heures /  sur le cadran l’ombre
change d’heure / autrement / la même
toujours la même
La quête des prières gagne mains sonnantes
la paume des nuages
une ville un clocher la voix des gallinacés à partager
l’heure / pas de corde à balancer
plus le temps / pas de balancier
temps électronique programmé /
la ville affairée
tandis
que tu marches / tu marches
podomètre thermo-luminescent
collé à tes pas luisants / ascension / performance
Vers / Chute
assurée

mais c’est la faute à personne
mais c’est la faute à personne

Fitness du vers en pleine & belle forme
mais coupure d’électricité
un fusible a sauté
dans le boîtier miné

de ta tête-à-poèmes
un poème et / un poème/  et un poème

On inspecte la pyramide
la pyramide des responsabilités
Le Directeur avec / Le Directeur dirigeant
leurs chemins vers la mer avant
la Centrale thermo-lactique
de nos rêves
mais c’est la faute à personne
mais c’est la faute à personne

ou à celui d’en-d’ssous
                         juste en-dessous
                                    tout en dessous
                                                        à descendre
                                                                   en douceurs

toi tu marches / tu marches jusqu’à
la Galerie Nationale
la galerie nationale près de la cathédrale
des anges presque debout font l’ange et regardent
se compter l’heure / sempiternelle / sempiternelle

 

Le conférencier enfile la flûte
la flûte des visites
dans la trame tendue
retendue des regards
parfois des reflets brillent
Rentrer dans la galerie d’art
Intemporelle / intemporelle
en-dedans / tout-en-dedans
des choses à convoiter / en douleurs
des convois d’or
Des tissus t’enveloppent
t’imprègnent / t’impriment
jusqu’au sang
des recoins de lune
interlope
jettent l’extase obscure
sur la toile
Sur la toile
une étincelle parfois / une attention s’allume
denrée rare
3 mètres sur 3 mètres 8 ans de travail
3 de recommencés / les lissiers tissent la patience
dans l’espoir-Pénélope
tu pédales
tu pédales de bonheur
retrouvé c’est le métier qui rentre
au-dedans
sur le fil
fil de laine dans cette trame de soie / des draps de satin
la lumière vibre / sculpte la toile
étoiles de l’art dans les regards
loin loin loin / âme-tram-rails / des trains qui passent
parce qu’ils passent
eux / au loin / broutés
par le regard
euh… / bovin

On prend du plaisir
Le Directeur de la Grande
Centrifugeuse des Rêves –destination
mangues / ananas / palétuviers
s’est pendu mais
on se serrait la ceinture
c’est la faute à personne
surtout la faute à personne

Le Directeur s’est pendu / attention
Patrimoine à vendre / Art à vendre / Artistes
soldés
en solde de tout cœur
Send u$ your heart ! A vot’ bon cœur, m’ssieurs dames !
Bien National  / 350 euros/picture
pour la peine de ton rêve
ton rêve précaire
–pas cher, pas cher-
Pour une tapisserie, faudra bien voir
temporiser
art contemporanisé
-On préparera
Sciences Po’

Tout se perd & tout
est à vendre
Maman est morte & je ne sais
pour quoi
Il faut éliminer l’armoire / l’armoire-à
-glace qui déforme
sa pauvre image / sa pauvre image
C’est lui le responsable C’est lui le responsable
Maman est morte & je ne sais
plus quand
mais faut récupérer
récupérer le mobilier
surtout le mobilier
Noter
Récup’ Mobil-mother
Fouiller emporter / vite emporter
Pendant la coupure / la coupure d’électricité

Sous couvert de ta tête
coupure d’électricité
tournesols à l’envers
Break Heart Ange perdu dans ton sommeil
se ronge les ongles –ce sont les nerfs
ce sont les nerfs / tendus sous la peau
C’est la faute à la coupure
la coupure d’électricité
du réseau / des nerfs
C’est la faute à la mort de Maman
Faudrait dormir

Pas dans le poème de la nuit
les caténaires sont tombés
/ foudroyés
les lignes ont les basses tensions
et les éclisses assassinent
Il est six heures ici / midi à New York
Minuit dans le lit des Sex-appeal
Orphée frustré déraisonne
rêve Narcisse plutôt qu’Eurydice
Scoop-de-mytho’ au cœur de l’Info’/  qui sonne
l’angélus éteint pourtant qui résonne
deux fois par jour / pas humain
mais

c’est la faute à personne
c’est la faute à Personne
Orphée frustré cogne
aux portes éventrées
des Ego-systèmes / nos EGOs
-Système
de Beaux Gosses pas beaux

mais il n’y a personne
mais IL N’Y A PERSONNE
 

 

Présentation de l’auteur

Murielle Compère-DEMarcy (MCDem.)

Bibliographie

  • Je marche---, poème marché/compté à lire à voix haute et dédié à Jacques DARRAS, éd. Encres Vives, 2014
  • L'Eau-Vive des falaises, éd. Encres Vives, 2014
  • Coupure d'électricité, éd. du Port d'Attache, 2015
  • La Falaise effritée du Dire, éd. du Petit Véhicule, Cahier d'art et de littératures n°78 Chiendents, 2015
  • Trash fragilité (faux soleils & drones d'existence), éd. du Citron Gare, 2015
  • Un cri dans le ciel, éd. La Porte, 2015
  • Je Tu mon AlterÉgoïste, éd. de l'Ecole Polytechnique, Paris, 5e, 2016
  • Signaux d'existence suivi de La Petite Fille et la Pluie, éd. du Petit Véhicule, coll. de La Galerie de l'Or du Temps ; 2016
  • Co-écriture du Chiendents n°109 :  Il n'y a pas d'écriture heureuse, avec le poète-essayiste Alain MARC, éd. du Petit Véhicule ; 2016
  • Le Poème en marche suivi par Le Poème en résistance, éd. du Port d’Attache ; 2016
  • Dans la course, hors circuit, éd. Tarmac, coll. Carnets de Route ; 2017 ; réédition augmentée en 2018
  • Poème-Passeport pour l’Exil, avec le poète et photographe ("Poétographie") Khaled YOUSSEF éd. Corps Puce, coll. Liberté sur Parole ; mai 2017
  • Nantes-Napoli, français-italiano traductions de Nunzia Amoroso, éd. du Petit Véhicule, Cahier d’art et de littératures n°121, vol.2, Chiendents, 2017
  • …dans la danse de Hurle-Lyre & de Hurlevent…, éd. Encres Vives, coll. Encres Blanches n°718, 2018
Murielle Compère Demarcy

Publications en revues : Phoenix, La Passe, FPM-Festival Permanent des Mots, Traction-Brabant, Les Cahiers de Tinbad, Poésie/première, Verso, Décharge, Traversées, Mille et Un poètes (avec "Lignes d’écriture" des éditions Corps Puce), Nouveaux Délits, Microbes, Comme en poésie, Poésie/Seine, Cabaret, Concerto pour marées et silence, … ; sur espaces numériques Terre à ciel, Le Capital des Mots, Recours au Poème

Publications en 2018 dans Nunc, la Revue Europe et Galerie Première Ligne

Anthologies : "Sans abri", éd. Janus, 2016 ; "Au Festival de Concèze", éd. Comme en Poésie, 2017 ; Poésie en liberté (anthologie numérique progressive) en 2017 et 2018 ; citée dans Poésie et chanson, stop aux a priori ! de Matthias Vincenot, aux éditions Fortuna (2017), …

Rédactrice à La Cause Littéraire, écrit des notes de lecture pour La Revue Littéraire (éd. Léo Scheer), Les Cahiers de Tinbad, Poezibao, Traversées, Sitaudis.fr, Texture, Zone Critique, Levure Littéraire, Recours au Poème en tant que contributrice régulière.

Lectures publiques : Maison de la Poésie à Amiens ; Marché de la Poésie, Paris,6e ; Salon de la Revue (Hall des Blancs-Manteaux dans le Marais, Paris 4e) ; dans le cadre des Mardis littéraires de Lou Guérin, Place Saint-Sulpice (Paris, 6e) ; Festival 0 + 0 de la Butte-aux-Cailles ; Melting Poètes à la Galerie de l’Entrepôt (Paris, 14e) ; auteure invitée aux Festival de Montmeyan (Haut-Var) [août 2016 + août 2018] ; au Festival Le Mitan du Chemin à Camp-la-Source en avril 2017 /[Région PACA] ; au Festival DécOUVRIR-Concèze (Corrèze) en août 2018

Invitée du "Mercredi du poète" animé par Bernard Fournier, le 28 février 2018, au François Coppée - 1, Bd de Montparnasse, Paris 6e- présentée par Jacques Darras.

Lue par le comédien Jacques Bonnaffé le 24 janvier 2017 sur France Culture.

Son blog : Poésie en relectures