Laurence Chaudouët, Ta seule mémoire

Comme une procession de lents taureaux de bronze

L’obstination de la terre aux semelles

J’irai jusqu’au chemin des veines cristallines

Au souffle minuscule dans le brouillard lointain

Presque invisible et ta seule mémoire

 

 

Derrière les murs du jardin de Jouarre les arbres
            étaient portés par une grâce légère

Les feuilles silencieuses ouvraient un chemin dans la pierre
au loin sur de profonds portiques

Mon ombre très loin
suivait le mouvement souterrain des feuilles

Et c’était là
une douce vision de la mort

 

 

C’est dans ton pas que mon pas se fait

Il n’est pas le tien il n’est pas le mien
            Ensemble pourtant ils s’unissent

Il n’est plus permis de prendre les chemins de terre
             Où le souffle se change en cristal

Plus une seule trace pour les yeux

Comme mes yeux sur ton visage
Ne voyaient plus de marques

Et comme
Je n’entendais plus de plaintes

Je ne vois plus n’entends plus que je t’appelle

Nos pas se font pas à pas ensemble

 

 

Il ne cherche pas de l’amour
(ce serait se nier lui-même)

Cet amour qui est de la terre de la lumière et de l’eau !

 

 

Nuit boréale dans le milieu du jour
Toute chose usée par une ardeur blanche
Dont aucune n’est déchiffrable

En glissant rien ne marque
Ni la trame aiguisée des pensées les plus pures

Mais après le silence de craie
On entend une musique
Prisonnière d’une chair invisible

 

 

Mes mots sont des pierres de sable et l’invisible coursier du silence
les accompagne

            Nulle part le tamis n’est si fin que le silence ne puisse l’emplir

            Les mots s’arrêtent à toi seul à toi pour jamais

Il n’est de silence plus insaisissable que la pierre où toute chose se replie et s’absorbe
            Sans atteindre le plus petit atome

            où le saisir minuscule là où ton absence dure
            Toujours semblable et jamais la même

            Mais je t’aime sans nulle limite et quand je te parle le monde me répond
            Par ton absence de parole