Plume Linda Ruiz, extraits de Planète Velcro

Textes et musique de Plume Linda Ruiz, extraits du spectacle "Planète Velcro"

TRAGUS

Hémoglobine

Sur tes lobes dénudés

Ta peau est fine

Et le sang goutte à goutte

Répand sa chaleur

Sur le sol exsangue de couleur

Plus ça fait mal et plus tu te régales

Très lentement quand l'aiguille déchire ta chair qui se tend

C'est là que tu es vivant

 

Visage passoire

Cartilage étendoir

L'amour

La peine

Piqués dans ton ADN

 

Ton nombril où l'eau passe

Ton arcade cloutée

Ta langue calebasse

Sont des perles orphelines d'un collier magnifique

D'un bijou organique

 

De Venus à Pluton

Du tragus au téton

Le trajet disparait

Et la douce douleur se marie au plaisir

Qui poinçonne ton sourire

 

Visage écumoire

Epiderme œuvre d'art

T'es pas étanche

Mais ton royaume est immense

Quand j'serais bouffée par des cloportes

On pourra dire en quelque sorte

Elle a pas percé à Paris

Mais dans la dermatologie

 

 

Pleine Lune

 

On peut voir au loin se noyer les sirènes

Notre indifférence leur fait d'la peine

A peine un rêve de temps en temps,

C'est tout ce qu'on accorde aux dryades, aux dragons

A tourner le dos comme çà, par maladresse,

Nous on se disperse, et eux disparaissent

Ya plus grand monde à Brocéliande et dans les tréfonds du Loch Ness

 

Si l'on oublie de les regarder,

Il n'y aura bientôt ni gobelins ni fées

Pas plus de griffons ni d'oréades

Pour embusquer nos promenades

Nous réveiller au milieu de la nuit

Nous rappeler qu'on est dotés de plein d'envies

Multiples visages, de la fantaisie des virages

Qu'on peut prendre

Poignées De songes pas très sages avant de se rendre

 

Ils sont en voie de déraison, d'abdication, de dilution

Menacez-les, menacez les …d’apparition !

 

Nourrit la naïade qui s'ennuie de n'être plus qu'une égérie

Qu'une légère muse qu'on dévêtît devant les pages de poésie

Traque en toi le troll truculent, troque tes craintes contre une inspiration

Fais toi acolyte du korrigan, allié en écho de ses tribulations

Dans le sillage d'un cumulo nimbus, saluer solennellement une licorne

Camouflée en nuage et la est l'astuce, toujours la caresser dans le sens de la corne

 

Caresser l'idée d'une porte toujours ouverte aux frasques d'un farfadet de passage

La table dressée et l'âme prête pour une ivresse de gorgone ou de sage

De l'ambroisie au frais, la nymphe en raffole,

Pour combattre notre éthique qui s'étiole

Et quelques fioles d'hydromel, aussi pour le voyage

C'est pour ses ailes, pour l'énergie du décollage

 

 

*

 

Tapisserie décoration - Planète Velcro

 

TAPISSERIE DECORATION

 

Je n’entends que des rires Je voudrais prendre l’air

Et je sens le piano qui transpire

Mon collier me serre

J’ai trop chaud

Je chante pour les paravents Pour le mobilier

A jouer pour des malentendants J’aimerais autant qu’ils soient

muets

Je t’en supplie viens me chercher avant que je prenne racine

 

et qu’on vienne m’arroser Je sens déjà la chlorophylle Tu croyais que je chantais Que je chantais des chansons Mais non

Je fais tapisserie décoration tapisserie plante de salon

Quelquefois, bien heureusement

Quelques personnes écoutent

Et çà remet d’emblée du piment

Dans la soupe de mes doutes

Une jolie dame couverte d’or

S’avance pour me demander

Pouvez-vous jouer moins fort on ne s’entend pas parler »

 

Je t’en supplie viens me sauver Avant que le mur m’absorbe Et que l’on vienne accrocher Des tableaux dans les trous de mes lobes

Tu croyais que je chantais

Que je chantais des chansons

Mais non

Je fais tapisserie décoration tapisserie plante de salon

 

PAP PAP PAPIER PEINT STAP STAP STRAPONTIN PLAP PLAP PLACOPLATRE BAP BAP BALDAQUIN

 

Les heures défilent de profil

Et plus les visages se froissent Et l’ombre des mamies de cires

Dégouline en douceur dans leurs tasses

Et leurs canines qui brillent

Qui s’allongent dans la glace

Et le micro et son fil

Et l’étranglement qui menace

Je t’en supplie viens me chercher

Avant qu’on me plaque au sol

Minuit vient de sonner Je sens déjà la camisole Tu croyais que je jouais que je jouais du piano But NO !

 

Je fais AGORAPHOBIE / CONVULSION / NARCOLEPSIE/ DECORATION

 

*

 

OCCIPUT

Par quelle déliquescence un peu valétudinaire,

Mon hypothalamus a failli opiner

C’est très panégyrique

Mais comme un antépénultième borborygme,

Sans anacoluthe je voudrais rappeler

A l’époque j’étais callipyge,

Je portais de petites galvardines

J’étais d’une inextinguible probité

Mais vous êtes tous ici des cénobites

Si vous pensez que j’évitais les furetières

C’est pourtant là que je l’ai rencontré

Il était Nyctalope

Moi moi j’étais ambidextre

Il me massa l’occiput

Et l’on trouva un consensus

C’est superfétatoire mais par outrecuidance

J’ai partagé sa passion pour la cuniculiculture

Une telle accointance fait

Que même dans des cas graves de priapisme

Notre amour restait thaumaturge

Et lorsque j’étais cyclothymique,

Il devenait juste un peu plus anachorète

Et l’on riait ensemble de son alopécie

Pour son anniversaire j’organisais

Des parthénogenèses dans le noir

Sans vouloir flagorner c’était l’ataraxie.

Ce n’est pas une raison/ Quand on peut voir la nuit

D’accumuler les oraisons / jaculatoires au pied du lit

Et d’empêcher son monde/ de trouver le repos

En miaulant des diphtongues/ en jouant sur les mots

C’est d’un truisme dithyrambique, Mais ce céladon concupiscent

Vitupérait sur mon occiput comme un cathaphrygien

Si tu ne sais pas où se trouve ton occiput

Tu pourras regarder dans le dictionnaire

Je connaissais un thesmothète qui en avaient un.

Il était somniloque

Moi j’avais des acouphènes/ j’aimais les sots l’y laissent

Il me massa le plexus

Et l’on trouva un consensus

*

Pommeau de Douche

Tu voudrais tu voudrais comprendre, tu de demandes, tu veux savoir pourquoi

Pourquoi il répond pas au téléphone pourquoi il te rappelle pas

Pourquoi ton cœur est plein, ses yeux sont vides quand il te touche

Autant l’oublier, autant être amoureuse d’un pommeau de douche 

 

Il te disait t’es hyper belle, t’es hyper bonne t’es hyperbole

Tu répondais t’es plutôt beau, t’es plutôt homme, t’es plutonium

 

Et tu voudrais partir, larguer les amarres, partir, toutes voiles dehors   

Partir, voguer sur les flots, partir, mais t’es pas un bateau

 

Alors le soir tu rentres seule dans ton appartement, ou tu es seule, il n’y a personne, tu te sens seule, il n’y a personne, tu es si seule, y’a tellement personne, tu appelles, personne répond, car tu vis seule

Alors tu rentres dans ton bain tu trouves un peu de réconfort,

Il n’y a que ton pommeau de douche qui sait s’occuper de ton corps

 

Et tu voudrais Partir partir avec lui, partir sans peur et sans cris

Partir, avec ton pommeau, mais lui il est vissé au tuyau /

 

Alors tu prends une tenaille tu tentes de le dévisser

Ya du calcaire dans les entrailles, le joint est mort, il est bloqué

Alors tu te mets à cheval sur le rebord De la baignoire

Et c’est là que tu sens comme une lueur d’espoir

 

Ça te laisse un p’tit peu rêveuse/   la matière est miraculeuse

Il en faut peu pour être heureuse quand la paroi est granuleuse

 

Et tu voudrais... Rester telle une amazone

Rester comme sur un podium

Rester sur la porcelaine

Savoir Te donner de l’amour à Toi même

Présentation de l’auteur

Plume Linda Ruiz

Artisan de la scène, décortiqueuse de curiosités musicales, Plume a composé et joué dans des formations latines, jazz et théâtrales en y intégrant toujours une touche surréaliste héritée de sa fascination pour Alejandro Jodorowski et Alexandre Vialatte. Pianiste de formation, passionnée de ragtime et de jazz, elle se produit régulièrement dans les palaces de la Côte d'Azur et a été plusieurs fois finaliste aux Talents des Nuits du Sud. Elle a notamment partagé la scène avec Arthur H, Thomas Dutronc, Oldelaf, ou encore Enzo Enzo.

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