Yves Mabin Chennevière, Errance à l’os

Le dernier poème de l’auteur, après quinze recueils, est un long récit de soi, étalé sur plus de soixante-dix pages, jusqu’au point final qui clôture cette longue phrase erratique.

Le poème, ici, sert peut-être de prétexte pour renouveler et la langue et la prosodie et cette fameuse rythmique de notre auteur, engagé à s’auto-portraiturer sur le long cours, dans une geste digne des « chansons de ».

Le procédé n’est procédé certes que dans la mesure où les vers s’enchaînent, les pages, les images, et le « je » rassemble, unifie une coulée continue où chacune, chacun pourra retrouver divers accents de poésie, divers tons, diverses écritures :

…je stérilise le sourire narquois qui structure son agressivité
morcèle son désir avarié de conquérant sédentaire

mes viscères mon sexe ma peau pensent
mes émotions mes sensations s’agglutinent s’agrègent se multiplient
forment un socle de rêves qui seront les convives de mes nuits à venir…

Yves Mabin Chennevière, Errance à l’os, Obsidiane, coll. le legs prosodique, 2014, 88p., 14€. Trois peintures de Ronan Barrot.

Yves Mabin Chennevière, Errance à l’os, Obsidiane, coll. le legs prosodique, 2014, 88p., 14€. Trois peintures de Ronan Barrot .

Le poète sensationniste énonce, énumère, catalogue, répertorie, classe, enjambe, dilue, disloque, émiette, rassemble tout un univers complexe d’êtres, de fonctions, d’états, d’émotions, d’instants de vie, de vies autres, de vies des autres :

…ma mémoire insécable
j’hésite un moment que j’abrège entre ce que je connais et
ce que je veux découvrir
choisis l’invention,
le silence envahit chaque espace innocent que la conquête n’a pas
touché…

L’histoire entre à grands ressorts dans cet album où « j’erre » (incipit) :

…elle efface en naissant l’histoire de celles qui l’ont précédée
dévoile la géologie de la terre
ses accidents ses blessures ses fractures ses crimes
ses merveilles…

Une volonté de tout contenir, d’évoquer le tout, les parties, de décrire le menu, l’éventuel, en lyrique mesuré, corseté par un désir quasi encyclopédique de l’écrire sur ce qui (res)senti, anime toutes ces pages, riches il va de soi comme de ferments d’imaginaire, tant les métaphores, tant le cousu-fil des vers enchâssés les uns aux autres, tant la musique de ces lignes, de ces pages, attisent un supplément d’intérêt et de lecture.

Ce poème-fleuve est un récit de soi et des autres, osons le mot, époustouflant de style et d’inventivité.

Un livre sans âge, universel…jusqu’à l’os. D’avoir tout dévidé. D’avoir consigné de soi et des autres le registre des temps (naissances, évolutions, monde en turbulence, femmes qui accouchent, morts qui se profilent etc.)




Yves Mabin-Chenevière, Errance à l’os

Le dernier poème de l’auteur, après quinze recueils, est un long récit de soi, étalé sur plus de soixante-dix pages, jusqu’au point final qui clôture cette longue phrase erratique.

Le poème, ici, sert peut-être de prétexte pour renouveler et la langue et la prosodie et cette fameuse rythmique de notre auteur, engagé à s’auto-portraiturer sur le long cours, dans une geste digne des « chansons de ».

Le procédé n’est procédé certes que dans la mesure où les vers s’enchaînent, les pages, les images, et le « je » rassemble, unifie une coulée continue où chacune, chacun pourra retrouver divers accents de poésie, divers tons, diverses écritures :

…je stérilise le sourire narquois qui structure son agressivité
morcèle son désir avarié de conquérant sédentaire

mes viscères mon sexe ma peau pensent
mes émotions mes sensations s’agglutinent s’agrègent se multiplient
forment un socle de rêves qui seront les convives de mes nuits à venir…

 

Yves Mabin Chennevière, Errance à l’os, Obsidiane, coll. le legs prosodique, 2014, 88p., 14€. Trois peintures de Ronan Barrot.

Yves Mabin Chennevière, Errance à l’os, Obsidiane, coll. le legs prosodique, 2014, 88p., 14€. Trois peintures de Ronan Barrot.

Ce poème-fleuve est un récit de soi et des autres, osons le mot, époustouflant de style et d’inventivité.

Un livre sans âge, universel…jusqu’à l’os. D’avoir tout dévidé. D’avoir consigné de soi et des autres le registre des temps (naissances, évolutions, monde en turbulence, femmes qui accouchent, morts qui se profilent etc.

Le poète sensationniste énonce, énumère, catalogue, répertorie, classe, enjambe, dilue, disloque, émiette, rassemble tout un univers complexe d’êtres, de fonctions, d’états, d’émotions, d’instants de vie, de vies autres, de vies des autres :

ma mémoire insécable
j’hésite un moment que j’abrège entre ce que je connais et
ce que je veux découvrir
choisis l’invention,
le silence envahit chaque espace innocent que la conquête n’a pas
touché…

L’histoire entre à grands ressorts dans cet album où « j’erre » (incipit) :

…elle efface en naissant l’histoire de celles qui l’ont précédée
dévoile la géologie de la terre
ses accidents ses blessures ses fractures ses crimes
ses merveilles…

Une volonté de tout contenir, d’évoquer le tout, les parties, de décrire le menu, l’éventuel, en lyrique mesuré, corseté par un désir quasi encyclopédique de l’écrire sur ce qui (res)senti, anime toutes ces pages, riches il va de soi comme de ferments d’imaginaire, tant les métaphores, tant le cousu-fil des vers enchâssés les uns aux autres, tant la musique de ces lignes, de ces pages, attisent un supplément d’intérêt et de lecture.