“Il y eut…” et autres poèmes

 

 

 

 

 

Il y eut

Depuis que tout a lieu

Un Voir prodigieux

Un Voir par où la Terre, n’ayant destin

Qu’en nous - myriade aveugle et sourde au nom d’humanité -  

Ici et là enfin

En d’immenses éclaircies

Et par-dessus les lois comme est l’œil héliophile

Se découvre elle-même  : vertigineuse 

Et bleue

Fulgurance rapide 

Parenthèse advenue au milieu du néant.

 

 

 

 

 

* * *

 

 

 

 

 

 

Poète celui-là

Qui devinait au fond du voyage de l’être

Ce désir de visions et d’illuminations

Moments fous de clarté au-dessus des cohues

Et qui sont les moments réveillés

De la Terre.

Moments combien ténus

Combien perdus d’avance  

Mais dont nations et peuples ne furent que le détour.

 

Poète celui-là

Palette en main ou pas

Qui vécut des soleils hors de portée du verbe.

 

 

 

 

 

 

* * *

 

 

 

 

 

 

Poème  : 

Terre et ciel un moment découchés

Des civilisations.

 

 

 

 

 

 

* * *

 

 

 

 

 

 

 

Dans l’été

Saison libre

La page en embuscade

Je passais mes journées à guetter la marée infinie 

Du soleil

Miracle toujours jeune

Mais dont le fil des jours nous détourne sans cesse.

 

Ma vie, trouée partout

Devenait extatique.

 

Voyance à perdre haleine

L’hier et l’aujourd’hui  : tout en moi culminait.

 

Les mots mêmes qu’on crut d’un pays familier

J’en touchais par instants la folie.

 

 

 

 

 

 

* * *

 

 

 

 

 

Donner des yeux à la planète.

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Même brièvement.

 

 

 




David Bijou

David Bijou est né en 1971. Il vit à Bordeaux. La poésie fut sa vocation immédiate.

On trouve ses recueils de poèmes sur son site de poésie: "A bout portant du mystère", "Aux sources de la présence", "Nous aurons quatre mains sur le piano des jours", "Un soleil fou", "Vie et mort dans les Pyrénées"...

http://davidbijoupoesie.fr/




À l’ombre de l’ombre

 

 

 

A L'OMBRE DE L'OMBRE  

 

 

 

Dans des cadrans de nacre,
Dodelinant sa musique
Sur les contours des pendules,
Tic tac, tic tac
Le temps tourne comme une ombrelle,
Sur le manège aux chevaux de jambes de bois
Dans le parc juste en bas.

Pas pressé je laisse filer l'or et ses filons,
Pour regarder passer les aiguilles qui trottent et trônent
En cavalières, sur nos vies de secondes.
Il faut bien oublier qu'un jour tout s'arrête...

 

 

 

 

 

EFFROIS DE TROTTOIR

 

 

 

S'il faut-il aller plus loin, affronter des bourrasques
Et croiser la peine dans des rues bousculées,
Couvertes de corbeaux et de pieds sous des masques,
Allons trouver chimères et fous de la cité

Dans le cœur de Paris, des visages fêlés
S'oublient et s'abîment en pensées taciturnes,
Cohabitent zélés avec un verre amoché,
A moitié plein de tout et de nectar nocturne

Tout près du grand bassin, accoudés au métro
Résistent des clochards assoiffés d'imprévus,
Qui contre un peu d'amour bazarderaient châteaux
Et matelas en soie qu'ils n'ont jamais reçus

Le brouillard s'alourdit dans les heures distendues,
Frissons sur le parcours des longs réverbères,
Dans le vide du vent sur la froide avenue,
Des sirènes hurlent leurs feux
Aux fenêtres grimacières

Drame de macadam, soir suie, noyé de plumes,
Meurt un oiseau marin dans un flash d'overdose,
L'ombre mordorée qui trouble le bitume
Pleure en écho son fils, sous les portes closes

Les larmes ont triomphé que faisions-nous là,
Les mains dans les poches à regarder passer
La douleur, le fracas, tout comme au cinéma ?
Mais mon cauchemar freine enfin,
J'entends
Grincer l'acier...

 

 

 

 

 

SALE TEMPS 

 

 

 

Am, stram, gram,
Pic et pics et colères,
Drames.

Des enfants se noient dans la marelle
Des poubelles
De l'histoire naufragée de leur pays en flammes,
Sous l'œil saoul des riches gens des côtes.

Le monde va de travers, bourré,
Bour et ratatam.

Doit-on arrêter la comptine ou la continuer ?
Comment faut-il la chanter,
Après ça ?

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William Braumann

William Braumann est auteur de chansons et de poésie et travaille actuellement à l'écriture de son premier roman.




Mémo du 7ème enfant

 

 

MEMO DU 7E ENFANT

 

 

J'ai plié la nuit
Quelques fragments d'aube
Pour inventer le soleil
La nuit a trop faim pour écrire le vide
Ce matin ou plus tard
La mémoire d'El Ninio entre dans ma main
J'ai planté mon âme dans la virilité de mon enfance
Entre les guillemets et les attentes
J'ai dévasté l'orbite de l'éternité
J'ai restauré sept âmes
Et
Demain c'est peut-être le retour des émotions morcelées
Qui filera le ciel dans la marche virulente de la croix
Une femme ou la pluie

 

 

 

 

 

AILLEURS

 

 

Au-delà des limites
Des inventions de l'autre moi-même
Il y a quelques fragments d'île
Ce matin
Je continue de me réinventer dans la fidélité du jour
À la faveur des orages
Je convoque les dieux
Au-delà des passions fragiles
Il y a la vérité Je dirais une vérité lourde
La vérité
C'est ce qui nous a tué
J'ai dans mon ventre 1 million d'années
La confiance des voyelles
La fertilité des villes
Le voyage de l'âme
Et je me réinvente trois fois dans la déchéance des regards séquestrés
Au-delà des sentiers
Je balance mon ombre pour dire aux Atlandes
Que la lumière est quelquefois mensonge
La réincarnation du soleil
Au-delà des silences obliques
Le jour tombe d'émerveillement
Dans la géométrie d'une saison liquide
Dans la virtuosité d'une étoile
Dans la sensibilité d'une femme
Je me dessine pour le plaisir de l'absence.

 

 

 

 

 

7e VISION

 

 

 

Dans l'achèvement de la 7e folie
Je me lance in vivo à travers cet âge
Corps mêlé de phrases ou de villes
Je reviens dans la déchéance d'une étoile
7 croix pour sonder la lumière
7 cloches pour souffler le soleil
7 nuages dans la géométrie d'une saison
Quelquefois
D'une ombre à un triangle
D'une voix à la misère du monde
Je me mange
Je me pèse dans la genèse d'une confusion impaire
Toutes les vérités du monde
Un petit trou dans la mémoire de l'équilibre
Avec des dieux en chute libre
L'humanité passe dans la stérilité du vide
Je mesure la 7e ombre pour plier l'itinéraire de l'absence
Dans l'écriture de la nuit

 

 

 

 

 

L'ÂGE DU HUITIÈME DIEU . . .

 

 

 

Renonçant à l'assaut du soleil
Hier cloué dans l'ombre
La lumière cloisonnée dans l'intransigeance du réel
Chaque parole porte la charge d'une femme
Le vide revient quelquefois
Avec l'humanité dans la main
Avec les horloges en larmes
Il marche dans la folie grise d'une étoile
Hier attaché dans une partition sauvage
L'auguste sourire d'un enfant mêlé de nuages
Il marche dans la constance d'une mémoire
D'un regard frôlé
Peu importe le poids de la nuit
Nous mangeons notre faim dans l'espérance illimitée

 

 

 

 

 

À QUAND L'ASCENSEUR

 

 

 

À ceux qui ont pointé du doigt à la mer
Porté dans la main toutes les folies du monde
Les regrets des enfants
C'est la conscience portée par l'amnésie
La liberté d'anéantir l'aube
Désir plat de réinventer l'oxygène
Je cours entre moi et l'autre moi
Il est écrit quelque part
Ceux qui ont transporté la vie sur l'autoroute du Nord
Avec l'envie dans la démesure du temps
Jusque-là
N'ont pas remis l'ascenseur.                                                               




Iléus PAPILLON

Iléus PAPILLON est né à Port-Margot, Nord, Haïti le 8 juin 1984. L'un des jeunes les plus remarquables d'Haïti en 2014, selon la Jeune Chambre Internationale (JCI). Il est détenteur d’une licence en Sociologie et Anthropologie de l’Université d’État d’Haïti (2008-2012). Il a travaillé son mémoire sur la Sociologie des migrations. Apports de la diaspora dans le développement d'Haïti. Il fait des études (niveau maîtrise) en Histoire, Mémoire et Patrimoine à (IERAH/ISERSS) Institut d'Études et des Recherches africaines D'Haïti, Université d’État d’Haïti (2014/2016). Il travaille son mémoire de maîtrise en Patrimoine bâti: Études sur la restauration du bâti en Haïti: Cas des maisons de style Gingerbread à Bois-Verna. 

RÉALISATIONS ET ACCOMPLISSEMENTS:

            ˧˨ L’un des initiateurs de l’implantation de la Bibliothèque Dominique Batraville de Port-Margot, Nord, Haïti en 2014 avec le support en livres de la Bibliothèque nationale d’Haïti;

Iléus PAPILLON a publié des articles dans Le Nouvelliste, le plus ancien quotidien d'Haïti.

Comme écrivain et diseur, il a été invité au Woumble «Forum» du 50th de Sosyete Koukouy à Miami, États-Unis les 30, 31 octobre et 1er novembre 2015.

Iléus PAPILLON est Lauréat national "Jeune le plus remarquable de l'année 2014" de la Catégorie culturelle du concours organisé par la (JCI) JEUNE CHAMBRE INTERNATIONALE baptisé: " Les 10 jeunes Haïtiens les plus remarquables de l'année 2014."
- Ancien Présentateur à la radio Vision 2000, 99.3 (ribrik Koze-Kreyòl et RCH 2000, 96.1 (Samedi des Arts);

- Iléus PAPILLON présente avec sa voix de poète plusieurs spots annonçant les émissions suivantes en Haïti:

- RANMASE/INTERSECTION / Radio Caraïbes 94.5;

- VISION 2000 A L'ÉCOUTE/ radio Vision 2000;

- KOZE PEYI/ Radio Trans Inter/RTI, 98.1;

- "KOUTJE SOU KILTI LAKAY" RCH 2000, 96.1"

" ALLO AGRO"/ radio Lumière 92.1
 

■ Publications individuelles:

1- Dans la prison de ton corps. Iléus PAPILLON, Imp. Vilcin, Port - au - Prince, 2009;

2- Tessons de vers. Iléus PAPILLON, Ed. Bois d'Orme, Port - au - Prince, 2010;

3- Tribòbabò. Ed. Iléus PAPILLON, Près nasyonal Ayiti, Port-au - Prince, 2012;

4- Tessons de rêves. Iléus PAPILLON, Ed. Presses nationales d'Haïti, Port - au - Prince, 2012;

5- Maux de passe. Iléus PAPILLON, Chasseur abstrait Éditions, France, 2012;

6. Les autres itinéraires/Chimen dekoupe. Iléus PAPILLON, album CD, Média-Texte, Port-au-Prince, 2013;

7. Sèt priyè lari. Iléus PAPILLON, compte d'auteur, Impr. Zwiltech, Port - au - Prince, 2015.

 

■ Ouvrages collectifs en Haïti et ailleurs.

Il a collaboré à plusieurs ouvrages collectifs, participé dans plusieurs anthologies:

_Haïtiennes. Portraits des femmes militantes. TRAMBLEY Émilie DORCÉ et Ricarson et sous la dir. de, Éditions Sciences et bien commun, Canada, 2015;

- Anthologie de la poésie haïtienne contemporaine. NOËL James sous la dir., Éditions Le Point, France, 2015;

_ Chemins poétiques/Caminos poeticos. GOUSSE Edgar sous la dir. de, Editions Trois Amériques, Montréal Canada, 2013;

_ Paix et Respect pour Haïti la première République Noire du Monde. Collectif d'auteurs. Les Editions du Net (LEN), 2013.

_ 135 poètes créoles d'Haïti de 1750 à 2011. Christophe Philippe CHARLES. Port-au-Prince, Editions Choucoune, 2011

- 20 poètes. Anthologie, Le Chasseur abstrait éditeur, France, 2013 




Rodrigue Lavallé

Rodrigue Lavallé est né en 1972. Lyonnais d’adoption, il a suivi des études de psychologie avant de démarrer une carrière de formateur et conseiller d’insertion professionnelle, poste qu’il occupe encore actuellement.

Il publie des textes dans les webzine Le capital des mots, Voxpoesi, Ratures, Soc et Foc (Florilèges)...
Publications en revues: Incertain Regard ; Bleu d'encre ; FPDV ; Les tas de mots ; Le livre à disparaître-revue éphémère à numéro unique ; Paysages écrits ; Vents alizés ; Comme en poésie ; L’assaut ; Levure littéraire ; Traction-Brabant ; Recours au poème ; Nouveaux Délits (à paraître en octobre 2013)...




Poèmes de Cristina HERMEZIU

coupe file

je l’ai cherché
centimètre par centimètre
dans l’ancienne gare
aux fenêtres sur la Seine

j’ai vu, en perdant quelques bonnes
secondes,
comme le sacré cœur dessinait
sur le ciel
un électrocardiogramme

il n’est pas là, ni là, là non plus
je l’ai cherché centimètre par centimètre
en attendant qu’il surgisse dans la salle suivante

l’amant perdu parmi les amants
futurs

et je ne l’ai plus jamais trouvé
ce tableau de Pissarro
avec un troupeau de brebis fleuri sur le chemin

 

 

la plus belle journée (I)

c’est là quand
tu tends la main
et elle disparaît

tu retournes (reviens)
au seul point
qui existe encore

sur le champ aveugle
du monde

et tu dis

ok. et maintenant ?

 

 

 

clause

j’ai pensé que je pourrais être
mon propre
nègre

écrire mes livres
à ma place
vu que je n’ai pas le temps
pas le talent
pas d’inspiration
ni le souffle
pour quelque chose
de si impondérable
(qui arrive avec la pluie
et j’ignore même si elle s’en va)

qui pourrait me donner s’il vous plaît
un ordre de grandeur
combien ça coûte
d’être
ton propre
nègre

 

 

lettre à V. (II)

 

parce que je pouvais écrire
à quelqu’un
j’aimais l’exil
comme un accouchement sous péridurale

j’oubliais que je n’étais
qu’un œil de graisse
qui reste toujours
à la surface de l’eau
et au fond du verre

j’oubliais que je n'étais
qu'une tache d’huile
noire
sur un macadam
étranger

les entrailles à vue
en guise d’arc-en-ciel

 

 

paysage

tu ne m’écrivais plus
quelques jours durant

comme une anesthésie
m’embaumait
le temps mort

la vie passait
parmi les obstacles
aigus
personne ne saignait
jusqu’au bout

dans ce monde
nous n’avons
que du temps
que du temps

 

 

écorchement

je me suis enveloppée
en entier
avec Paris

Paris, c’est
ma ceinture
de chasteté

une chrysalide
une chrysalide
un cocon
de soie
crient-ils tous

en attendant
les dédicaces
sur les bouts
de bandage
de la momie.

 

 

 

le cimetière de mots

il ne pousse pas
de la terre
de l’herbe verte

il ne tombe pas du ciel

des caillots de pluie
de vent
de lumière

non
non
il ne jaillit pas
comme la source
du tréfonds du puits
du plus profond du cœur

non
le mot
le mot
pousse
sur le cimetière
de mots
le mot
pousse
sur le cimetière
de mots.

 

 

 

la peau très fine du monde (VIII)

 

Paris
ne croit pas aux larmes

l’enfant
tire

sur la luge
l’ange
aux ailes
gelées.

 

 

 

 

poèmes traduits du roumain :

Sélection du recueil Parisul nu crede în lacrimi, éd. Junimea, Iaşi, Romania, 2016.

 

 




coupe file et autres poèmes

 

coupe file

je l’ai cherché
centimètre par centimètre
dans l’ancienne gare
aux fenêtres sur la Seine

j’ai vu, en perdant quelques bonnes
secondes,
comme sacré cœur dessinait
sur le ciel
un électrocardiogramme

il n’est pas là, ni là, là non plus
je l’ai cherché centimètre par centimètre
en attendant qu’il surgisse dans la salle suivante

l’amant perdu parmi les amants
futurs

et je ne l’ai plus jamais trouvé
ce tableau de Pissarro
avec un troupeau de brebis fleuri sur le chemin

 

 

la plus belle journée (I)

c’est là quand
tu tends la main
et elle disparaît

tu retournes (reviens)
au seul point
qui existe encore

sur le champ aveugle
du monde

et tu dis

ok. et maintenant ?

 

 

 

clause

j’ai pensé que je pourrais être
mon propre
nègre

écrire mes livres
à ma place
vu que je n’ai pas le temps
pas le talent
pas d’inspiration
ni le souffle
pour quelque chose
de si impondérable
(qui arrive en même temps que la pluie
et j’ignore si elle s’en va)

qui pourrait me donner s’il vous plaît
un ordre de grandeur
combien ça coûte
d’être
ton propre
nègre

 

 

lettre à V. (II°

parce que je pouvais écrire
à quelqu’un
j’aimais l’exil
comme un accouchement sous péridurale

j’oubliais que je n’étais
qu’un œil de graisse
qui reste toujours
à la surface de l’eau
et au fond du verre

j’oubliais que j’étais
une tache d’huile
noire
sur un macadam
étranger

les entrailles à vue
en guise d’arc-en-ciel

 

 

paysage

tu ne m’écrivais plus
quelques jours durant

comme une anesthésie
m’embaumait
le temps mort

la vie passait
parmi les obstacles
aigus
personne ne saignait
jusqu’au bout

dans ce monde
nous n’avons
que du temps
que du temps

 

 

écorchement

je me suis enveloppée
en entier
avec Paris

Paris, c’est
ma ceinture
de chasteté

une chrysalide
une chrysalide
un cocon
de soie
crient tous

en attendant
les dédicaces
sur les bouts
de bandage
de la momie.

 

 

 

le cimetière de mots

il ne pousse pas
de la terre
de l’herbe verte

il ne tombe pas du ciel

des caillots de pluie
de vent
de lumière

non
non
il ne jaillit pas
comme la source
du tréfonds du puits
du fond du cœur

non
le mot
le mot
pousse
sur le cimetière
de mots
le mot
pousse
sur le cimetière
de mots.

 

 

 

la peau très fine du monde (VIII)

 

Paris
ne croit pas aux larmes

l’enfant
tire

sur la luge
l’ange
aux ailes
gelées.

 

5-15 décembre 2016

 



4 poèmes d’Aleksey Porvin

         1

 

Le vase qui tombe salue le sol
de ses fleurs et de son eau trouble,
le cercle de verre brisé
jonche le parquet, où le coupable -     

chaque éclat crisse tout en cruauté vernie -
s'est réfugié sous la garde-robe
bien que toujours à portée de l'eau, comme
chaque bruit est à portée du silence.

Un minuscule éclat de verre explore l'entaille
& cherche un semblant d'âme au fond du doigt
Il ne s'en trouve aucun dans la veine limpide,
pas un seul & maintenant n'est nulle part ;

mais il est transparent & par conséquent                                                                              
capable de voir,
à travers lui-même il contemple la douleur :
le lieu - une goutte de sang,
un angle mort à la surface du verre.

 

           2

Les branches sombres déclarent forfait
le vent se referme sur lui-même ;
quelque chose en moi daignera-t-il
consigner leur souvenir ?
Le vent a échoué - ici
il y a de l'air, des pierres et des brindilles        
- que reste-t-il en eux ?
Tout ne saurait périr.

L'automne gardera-t-il souvenir
de moi ? Quelle faculté
de mémoire est la sienne ?
Vent, rapporte les branches.

Continue ta route - laisse ici toute chose -
Je me souviendrai de toi :
offrant les vestiges des ultimes
rameaux du jour.

 

3.

 

Obliquant sur le chemin, vers la musique,
nous nous enrôlerons avec la pluie,
faute de mieux  :

salut chéri,                                                                  
ouvre la route -
ta demeure grandit
à cette résonnance, où il n'y a personne.

Tu as beaucoup d'amis
qui, ayant entrepris une distante ambulation,
n'atteignent pas leur destination.

Nous sommes passés dans la soirée, mais
sans trouver la porte :
finalement, il est apparu que c'était toi.

La pluie se lèvera pour nous ;
Tu seras aussi strict qu'un instrument de mesure
dans tes questions :

mais sans cacher les yeux humides,
l'eau sublime, nous lave
avec quelque chose qui tient de la solitude.

 

                 4

 

Un oiseau marche sur le toit du grenier,
sur les corniches, comme s'il était une main :
tap, tap, tap - permettez-moi
de frapper, chaleureux et de concevoir...

De quoi ma main est-elle lourde, quand les plumes
des doigts et les pulsations des becs - les tiens ? - sont chauds
Le sang est-il en réalité aussi vaste que le vol
en cette année qui a fondu ?

Ce murmure est celui de mon sang, de mon enfant non-né* :
C'est moi qui suis là sur le toit, et parfaitement satisfait
C'est mon choix de venir ainsi frapper à ta porte
Toi qui n'es pas ma destinée.

 

 

Traduction : Eric Boury