Catherine Pont-Humbert, légère est la vie parfois
« En ce temps-là mon nom / n'avait pas encore été prononcé / La poésie dormait dans les limbes » : à cette origine dans « l'ombilic des limbes », Catherine Pont-Humbert rend grâce en renouant avec la poésie des premiers instants rejoints par les strates d'une écriture au présent.
À retrouver les « mots délaissés », la vérité des expressions du passé remonte à la surface, souvenirs chargés de l'avenir du dire toujours...
« Une mémoire liquide s'est abattue sur moi / Tout a coulé en vagues / Ressac obsédant du temps » : dans ces replis balayés par l'oubli, lecteurs comme auteure découvrent la saveur des heures passagères portées à incandescence dans l'écrin des formules affluant de nouveau, mêlant désormais les poèmes anciens à la parole d'aujourd'hui.
Invitation à ce retour à la source, l'anaphore des infinitifs prescrit de se relier à l'aube étincelante, au matin souverain qui annonce cette « insoutenable légèreté de l'être », pour reprendre l'oxymore du titre du roman de Milan Kundera, moins pour sertir la plaisanterie de gravité que pour donner souffle au « bon côté de la vie », à « son versant lumineux » : « Toucher l'élémentaire / Retourner au torrent / Poser le pas sur le chemin / Rejoindre la vallée / Boire la rosée »
Catherine Pont-Humbert, légère est la vie parfois, coll. Poésie XXI, N° 61, Jacques André Éditeur, 54 pages, 13 euros.
Cette alchimie de la vitalité à même de transmuer le chagrin en joie, la négativité en positivité, fait de la douleur un prélude à l'ardeur. La fille qui affirme à sa mère : « J'ai fait de nos tragédies des souffles légers », dévoile la comédie de vivre, faisant le deuil des traumatismes et colorant des teintes du bonheur les multiples facettes du joyau de l'existence.
« La parole garde la solidité de la main / Et remercie » : gratitude rendue au cours des choses, hymne à la chair du monde, la plume de Catherine Pont-Humbert se glisse au fil des sensations pour mieux dire le don à l'autre dans l'acte d'amour comme l'indiquent les conseils de l'amante à l'amant.
« Soyez mon amant / Soyez l'homme fin / Qui glisse sous le drap / Soyez ce corps qui m'emporte », ces injonctions aux plaisirs à partager dans l'étreinte tressent les éloges de la différence dans l'art d'aimer qui forme l'apothéose d'un sens possible à la vie, miroir de l'autre en soi.
« Diversité, étrangeté, altérité / Je vous ai démasqués / Vous étiez en moi / Je l'ignorais » : cette ouverture aux multiples visages de l'altérité est une réponse de la poésie dans sa puissance d'évocation comme dans sa délicatesse fondatrice, un cri toujours contenu qui s'élève en chant intérieur, se déployant à la rencontre de ce qui advient, signature des derniers vers de ce recueil en ode à la légèreté à conquérir !