L’au­teure de ces beaux livres de mémoire (“Renée en elle”, “Sans Abue­lo Petite”, “Cent au print­emps”, “Sa mémoire m’aime”) pro­longe sa réflex­ion human­iste avec ce bou­quet de textes adressés à ses mère, grand-mère, grand-tante, aux poètes (Mari­na Tsve­tae­va), aux vedettes de l’écran (Mar­i­lyne, Brigitte, Françoise, Simone) et à toutes ces femmes qui ont tant oeu­vré pour que leur sort soit moins funeste. 

On retrou­ve la grâce, la finesse, et l’empathie de la poète qui sait si bien par­ler du temps révolu, de toutes les tâch­es ingrates, de tous ces corps appelés à tra­vailler sans peur de suer ni de courber le corps sous la peine.

En brèves inflex­ions, sous la ban­nière de Denise Desau­tels ou de Denise Le Dan­tec, Cécile hon­ore le labeur sous toutes ses formes, au temps où les moissons se fai­saient à la main, et “recom­mençaient chaque printemps/ les mêmes gestes d’élan et de coeur”, quand “c’é­tait dur” de vivre, de tra­vailler, femmes ou hommes même combat.

“Ma grand-mère comp­tait ses couches/ comme un oignon” : que de lessive à couler en riv­ière, que de linge à cur­er au soleil pour qu’il soit plus blanc.

Les usages du temps, les affres du corps, la splen­dide mémoire des corps : tout ici relève d’une ethno­gra­phie sin­gulière, menée par une poète qui ne fait pas fi de ce qu’elle a vu des anciens, mais en garde rigoureuse­ment les traces.

D’ailleurs, elle se niche, petite, dans cer­tains frag­ments : “mes jambes comme des ailes/ j’avale le vent bouche ouverte” (p.18).

Cécile Guiv­arch, Si elles s’en­v­o­lent, éd. Au Sal­vart, 2024, 74 p., 12 euros.

L’écri­t­ure flu­ide, nerveuse, qui ne s’embarrasse pas d’im­ages, retrace avec force la péri­ode (“ce vil­lage sous Franco/ cinquante ans en arrière”) .

Un très beau livre.

Présentation de l’auteur

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Philippe Leuckx

Né à Havay en 1955. Etudes de let­tres romanes.
Mem­bre de l’As­so­ci­a­tion des Ecrivains belges.
Cri­tique dans plusieurs revues et blogs (Jour­nal des poètes, Fran­coph­o­nie vivante, Bleu d’en­cre, poez­ibao, Les Belles Phras­es, revue Tex­ture…)

Prix Emma-Mar­tin 2011.

Auteur d’une trentaine de livres et pla­que­ttes de poésie : Une ombreuse soli­tude, Comme une épaule d’om­bres, Le fraudeur de poèmes, Le fleuve et le cha­grin, Touché cœur, Une espèce de tour­ment ?, Rome rumeurs nomades, Selon le fleuve et la lumière, Un pié­ton à Barcelone, Rome à la place de ton nom, D’enfances…