Ces cham­bres où le cœur se serre, la porte à peine entr’ouverte.
Ces cham­bres ombreuses et calfeu­trées, un peu rances et vieil­lottes, où le décor même est une invi­ta­tion au plaisir.
Où les tapis­series, les com­mu­ta­teurs, l’abat-jour de la lampe et les poignées du lavabo déga­gent une odeur de chair, gar­dent la trace invis­i­ble des mil­liers de doigts qui les ont touchés, sou­vent dans la précipitation.
Ces cham­bres où l’on ne voit que le lit en entrant, appel douil­let pour des corps pressés de s’étreindre.
Ces cham­bres où les robes et les pan­talons sont rapi­de­ment dégrafés, où les sous-vête­ments se pen­dent au bras des fau­teuils, où les bais­ers légers se trans­for­ment presqu’aussitôt en caress­es pro­fondes et moites.
Ces cham­bres où l’on ne dort jamais, sinon quelques min­utes après la crue hormonale.
Ces cham­bres où l’on voudrait s’installer pour un mois, sans jamais ouvrir les volets, pour s’abimer dans un océan de plaisir, mais qu’il faut pour­tant quit­ter au bout d’une heure, sou­vent moins, vain­cu par le pou­voir de l’argent et les con­traintes sociales.
Ces cham­bres me revi­en­nent, intactes, à l’esprit quand je passe devant un hôtel à l’enseigne ternie, au coeur de cette ville qui a renié son passé le plus luxurieux.

 

 

 

 

 

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