Béa­trice Lib­ert vit en Wal­lonie. Elle a pub­lié pen­dant 40 années des recueils de poésie, des essais, des nou­velles, des œuvres pour la jeunesse. Ce qui vieil­lit sur la patience des fruits verts est une antholo­gie de ses livres de poésie d’une remar­quable unité d’inspiration et d’écriture.

Béa­trice Lib­ert, Bat­tre l’immense, (Edi­tions de Cor­levour), 15 euros

Elle par­le elle-même d’une « ascèse douce » à pro­pos de la venue du poème. La for­mule con­vient par­faite­ment à cette œuvre où sim­plic­ité, dépouille­ment et bon­té se con­juguent qua­si amoureuse­ment. Elle sait capter « la force du jardin frag­ile » qui prodigue au gré des saisons « un pollen invis­i­ble / qui nous défend des bar­baries. » N’est-ce pas le pollen même de la poésie qui se répand, pour autant qu’on sache lui laiss­er place ? Et ce pollen est si chargé de sacré qu’il con­court à une véri­ta­ble semai­son d’espérance.

 

                           Dieu s’était endor­mi sur la pierre

                         Vis­age ser­ré con­tre terre

 

                         Les anges des forêts lui ôtèrent

                         Ses san­dales ses habits empesés

 

                         Le posèrent nu ensommeillé

                       Sur la riv­ière qui partout le porta

 

                        Sans jamais l’éveiller

 

Béa­trice Lib­ert, qui sent son cœur « bat­tre l’immense », titre de son dernier livre paru aux édi­tions de Cor­levour, est un poète de l’accueil et de la douce com­pag­nie. Elle reçoit les vis­ites les plus impal­pa­bles, comme celles qui s’avèrent les plus ardentes, l’amour étant l’aventure la plus exal­tante de toutes, flèche de feu lancée vers l’absolu.

                             Nous sommes

                             Le lieu même

                           De l’Amour

 

                           Son visage

                           Et son vase

                           D’opaline

 

                             Ses mains 

                             Et son ciel

                           Sans pluie

 

                           Et ce qui

                           Claudique

                           En nous 

 

                           Guérit

 

Béa­trice Lib­ert, Ce qui vieil­lit sur la patience des fruits verts, (Le Tail­lis Pré), 20 euros

 

Cet Amour absolu est sans doute sa voca­tion pro­fonde. Il ne cesse de la sur­pren­dre et de la ravir. Quelle plus belle illus­tra­tion que ce poème de «L’inattendue », paru orig­inelle­ment en 2003 dans Le Pas­sant fab­uleux ?

 

                             Je suis cette femme à la fontaine

                             Et qui s’accoude à l’été

 

                            A mes doigts

                           Oscille une cruche

 

                           Et deux grains de silence

                           Coulent de ma paume étonnée

 

Ces deux grains que nous recueil­lons à notre tour, déjà semence de lumière, sont comme une récompense.

 

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Gérard Bocholier

Gérard Bocholi­er est né le 8 sep­tem­bre 1947 à Cler­mont-Fer­rand (France). Il a fait ses études sec­ondaires et supérieures dans cette ville, y a ensuite enseigné la lit­téra­ture française et les let­tres clas­siques en classe de let­tres supérieures. Orig­i­naire d’une famille de vignerons de la plaine de Limagne, il est franc-com­tois par sa famille mater­nelle, à la fron­tière du pays de Vaud en Suisse. Il a passé son enfance et sa jeunesse dans le vil­lage pater­nel de Mon­ton, au sud de Cler­mont-Fer­rand, que les poèmes en prose du Vil­lage et les ombresévo­quent avec ses habi­tants. La lec­ture de Pierre Reverdy, à qui il con­sacre un essai en 1984, Pierre Reverdy lephare obscur,déter­mine en grande par­tie sa voca­tion de poète. En 1971, Mar­cel Arland, directeur de la NRF, lui remet à Paris le prix Paul Valéry, réservé à un jeune poète étu­di­ant.  Son pre­mier grand livre, L’Ordre du silence, est pub­lié en 1975.  En 1976, il par­ticipe à la fon­da­tion de la revue de poésieArpa, avec d’autres poètes auvergnats et bour­bon­nais, dont Pierre Delisle, qui fut un de ses plus proches amis. D’autres ren­con­tres éclairent sa route : celle de Jean Gros­jean à la NRF, puis celle de Jacques Réda, qui lui con­fie une chronique régulière de poésie dans les pages de la célèbre revue à par­tir des années 90, mais aus­si l’amitié affectueuse du poète de Suisse romande, Anne Per­ri­er, dont il pré­face les œuvres com­plètes en 1996. Son activ­ité de cri­tique de poésie ne cesse de se dévelop­per au fil des années, il col­la­bore  au fil des années à de nom­breuses revues, notam­ment à la Revue de Belles Let­tresde Genève, au Nou­veau Recueil, et surtout à Arpa,dont il assure la direc­tion dès 1984. Il donne actuelle­ment des poèmes à Thau­ma,Nunc,Le Jour­naldes poètes. Cer­tains de ses arti­cles sont réu­nis dans le vol­ume Les ombrages fab­uleux,en 2003. A par­tir de 2009, un an avant sa retraite, il se con­sacre prin­ci­pale­ment à l’écriture de psaumes, pub­liés par Ad Solem. Le pre­mier vol­ume est pré­facé par Jean-Pierre Lemaire, son ami proche. Le deux­ième s’ouvre sur un envoi de Philippe Jac­cot­tet. Son essai Le poème exer­ci­ce spir­ituelexplique et illus­tre cette démarche. Il prend la respon­s­abil­ité d’une rubrique de poésie dans l’hebdomadaire La Vieet tient une chronique de lec­tures, « Chronique du veilleur »,  à par­tir de 2012 sur le site inter­net :Recours aupoème. De nom­breux prix lui ont été attribués : Voron­ca (1978), Louis Guil­laume (1987), le Grand Prix de poésie pour la jeunesse en 1991, le prix Paul Ver­laine  de la Mai­son de poésie en 1994, le prix Louise Labé en 2011. L’Académie Française lui a décerné le prix François Cop­pée pourPsaumes de l’espérance en 2013. Son jour­nal intime, Les nuages de l’âme, paraît en 2016, regroupant des frag­ments des années 1996 à 2016. Par­mi ses pub­li­ca­tions poé­tiques récentes : Abîmes cachés(2010) ; Psaumes du bel amour(2010) ; Belles saisons obscures(2012) ; Psaumes de l’espérance(2012) ; Le Vil­lageemporté (2013) ; Pas­sant (2014) ; Les Etreintes invis­i­bles (2016) ; Nuits (2016) ; Tisons(2018) ; Un chardon de bleu pur(2018) ; Depuis tou­jours le chant(2019) A paraître : Ain­si par­lait Georges Bernanos(Arfuyen) ; Psaumes de la Foi vive (Ad Solem) ; J’appelle depuis l’enfance (La Coopéra­tive). En 2019 parais­sent Ain­si par­lait G.Bernanos, Psaumes de la foi vive, Depuis tou­jours le chant ; en 2020 J’ap­pelle depuis l’en­fance (La Coopéra­tive) et Une brûlante usure (Le Silence qui roule), Vers le Vis­age (Le Silence qui roule, 2023) et Cette allée qui s’ef­face (Arfuyen, 2024)