Chronique du veilleur (51) : Olivier Noria
Né à Bruxelles en 1980, Olivier Noria publie son premier livre de poésie : Rendre grâce. D'emblée, on perçoit plus qu'une voix de talent et une écriture très maîtrisée : une présence d'âme qui ne s'encombre d'aucun artifice rhétorique, d'aucune mode. « Le mystère s'enfante / Et toi l'enfant-passeur tu t'enchantes, chemin faisant. » Il s'agit bien là en effet d'une âme restée ouverte à tous les émerveillements, d'une âme de veilleur qui retient, sur ce qui va peut-être devenir œuvre poétique, l'informulable, qui prend « le pouls de l'Ouvert », « le pas de la clarté. »
« Ecriture franche », selon l'expression de l'auteur. Ecriture recueillie sur « le cœur du cœur blotti en son secret. » Le poète, qui est par ailleurs musicien, saisit les accords rayonnants, offre sa meilleure écoute à ce que le tumulte de notre monde ne cesse d'étouffer.
Tout au bercement du feuillage est souffle ordonnant
Tout se courbe pour mieux écouter
Olivier Noria, Rendre grâce, Le Taillis Pré, 14 euros.
Alors, peuvent s'élever, « musique d'entre toutes / les musiques », les « battements intimes / de l'irrévélé » .
Ce sont des fragments, presque silencieux, d'un secret,que le lecteur reçoit à chaque pas, à chaque page. Et le sentiment profondément émouvant d'un partage, à la fois poétique et spirituel, se fait jour, en une rencontre inestimable et inoubliable (« L'inoubliable seul est la rencontre »). Le lien est ainsi tissé et noué dans l'invisible, par un « long fil d'or », celui-là même qui nous relie à la divinité.
Nous ne pouvons véritablement aimer qu'en lien
Nous ne pouvons nous reconnaître
que dans la certitude d'être veillés, bordés
par la profondeur insondable d'un ciel constelléNous ne sommes pas seuls
Nous sommes unis -et la solitude nous révèle
On est heureux de découvrir ici un vrai poète, animé d'une soif d'absolu et d'amour, qu'il traduit avec humilité, profonde sincérité. On est touché par cette voix qui se confie au lecteur, tout en « rendant grâce » à ce qui lui donne force et beauté :
Désormais,
je ne m'encombre plus d'un stylo
sinon pour éclaircir ce qui tient dans la paume
du silence
Olivier Noria, Instantané Instrumental, Prière Contemplative, 1er Mai 2022.