Claude Ber : Célébration de l’espèce — l’insoumission irréductible du poème
Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de présenter Claude Ber, mais s'il fallait un endroit où s'exprime toute la puissance de son écriture, ce serait dans ce texte, La Célébration de l'espèce, paru dans Il y a des choses que non, chez Bruno Doucey.
Résister, la poète nous confie ce que cela évoque, dans et à travers l'écriture, avant de nous laisser entrer dans cet ouragan qu'est ce texte, une Célébration de la littérature, dans ce qu'elle a de plus puissant.
Claude Ber
L'insoumission du poème
« Dès qu’on crée, on résiste. L’art c’est ce qui libère la vie que l’homme a emprisonnée », cette phrase de Deleuze, dans son Abécédaire, résume ce que j’entends par « résistance ».
Sans doute ce mot de « résistance » fait-il écho, dans mon histoire, à la « Résistance » dans laquelle ma famille fut engagée et que rappellent certains textes de Il y a des choses que non, mais la résistance du poème va au-delà de cette référence historique tout en incluant ce qu’elle implique d’insoumission au pire de nous-mêmes, de refus de l’inhumanité de notre humanité. Elle désigne aussi ce qui, dans le poème, semble résister à une première lecture, autant d’ailleurs par ses noyaux d’apparente obscurité que par ses éclats d’évidence lumineuse, et travaille notre intériorité, diffusant lentement sa signifiance.
Le poème est, dans tous les sens, langue résistante
langue consistante
langue nourrissante
substantifique langue de la moelle des mots et des morts
où résiste la langue au mirador
où résiste la langue à l’obscénité de transparence
où résiste la langue à l’asservissement
où résiste la langue à l’avilissement
où résiste la langue sous la dent
Claude Ber
La Célébration de l'espèce
Texte de Claude Ber dit par Frédérique Wolf-Michaux - Musique inédite d'Alain Bancquart
La célébration de l'espèce, texte de Claude Ber, extrait du recueil Il y a des choses que non paru aux éditions Bruno Doucey,
dit par la comédienne Frédérique Wolf-Michaux, sur une musique inédite d'Alain Bancquart.