En attendant le numéro spécial que Recours au poème consacrera à ce très grand poète qui vient de disparaître, écoutons ses réponses à notre enquête.
La brièveté, non point minérale mais au plus exact de l’expression et de la vie, donne sa richesse à cet entretien.
1) Recours au Poème affirme l’idée d’une poésie conçue comme action politique et méta-poétique révolutionnaire : et vous ? (vous pouvez, naturellement, ne pas être en accord avec nous, ou à être d’accord dans un sens diamétralement opposé au nôtre)
La poésie n’a rien à voir avec la politique et ne doit surtout pas se laisser polluer par elle, on a vu ce que cela a donné avec Eluard, par exemple.
2) « Là où croît le péril croît aussi ce qui sauve ». Cette affirmation de Hölderlin parait-elle d’actualité ?
Bel aphorisme, et réconfortant (encore plus beau, soit dit en passant, dans sa langue originale), qui s’applique à la vie, mais la poésie n’est-elle pas la vie même !
3) « Vous pouvez vivre trois jours sans pain ; – sans poésie, jamais ; et ceux d’entre vous qui disent le contraire se trompent : ils ne se connaissent pas ». Placez-vous la poésie à la hauteur de cette pensée de Baudelaire ?
La poésie est une vocation, comme la prêtrise par exemple, et on doit TOUT lui sacrifier.
4) Dans Préface, texte communément connu sous le titre La leçon de poésie, Léo Ferré chante : « La poésie contemporaine ne chante plus, elle rampe (…) A l’école de la poésie, on n’apprend pas. ON SE BAT ! ». Rampez-vous, ou vous battez-vous ?
Cette injonction est évidente. A ce propos, il faut distinguer poésie et chanson, cette dernière, même quand elle a des prétentions philosophico-morales comme ici, est un sous-produit sans intérêt.
5) Une question double, pour terminer : Pourquoi des poètes (Heidegger) ? En prolongement de la belle phrase (détournée) de Bernanos : la poésie, pour quoi faire ?
La poésie est une quête essentielle sans laquelle l’existence n’a guère de sens.