Ce recueil réu­nit plusieurs dizaines de poètes français con­tem­po­rains, vivants pour la plu­part. Tous ont la par­tic­u­lar­ité d’avoir croisé, d’une façon ou d’une autre, de façon éphémère ou fidèle, la route de la belle revue Les Cahiers du Sens et / ou des édi­tions Le Nou­v­el Athanor, dirigées par Jean-Luc Max­ence et Dan­ny-Marc. Et la pre­mière impres­sion qui ressort de ce beau vol­ume, tant sur le plan formel que sur celui du fond ou du pro­fond, est juste­ment d’avoir affaire à une « famille », avec ses points com­muns nour­ris de dif­férences, comme toutes les familles. Mais en poésie, la chose n’est pas anodine. La ques­tion de la ren­con­tre est ques­tion essen­tielle, entre poètes. La ren­con­tre et le chemin con­stru­it ensem­ble, en chem­i­nant ensem­ble, ain­si que le voulait Jean de La Croix. On plonge alors dans vingt ans d’histoire récente de la poésie française, sur ce ver­sant là, celui des poètes de l’Athanor, expres­sion qui à mon avis est appelée à faire sens dans les futures « his­toires de la poésie ». Car c’est bien d’un courant ou d’un ensem­ble de courants unis dont il s’agit ici, une façon de vivre la poésie, manière à laque­lle la revue et les édi­tions ont pu don­ner vie. Une sec­onde impres­sion s’impose au moment de refer­mer le vol­ume : ce n’est pas seule­ment un « bilan », mais bien un athanor, quelque chose qui pro­duit ce qui vient du plus pro­fond, avec l’assentiment, l’aide et l’engagement volon­taire des poètes, pour aller vers un ailleurs dont la beauté réside juste­ment en son incer­ti­tude. Les poètes réu­nis ici sont à l’image de pier­res, comme réu­nis en un édi­fice en cours de réal­i­sa­tion. On sent le souf­fle d’œuvres qui marchent, les yeux rivés vers l’Étoile. On sent les poètes au tra­vail sous la charpente.

Le vol­ume s’ouvre sur une forte pré­face dont les derniers mots dis­ent claire­ment ce que veu­lent ses deux archi­tectes : « Hormis la mort, rien ne pour­ra désor­mais nous faire reculer. Nous ne sommes ni des avo­cats ni des pro­cureurs, plutôt des bardes, des nomades, des bateleurs présen­tant des poètes d’espérance sur la place publique. Et nous n’attendons per­son­ne au prochain tour­nant de la vie, sauf les fidèles amoureux du Verbe. Et nous ne craignons, au fond, que le seul tri­bunal du temps ».

Quiconque a eu le bon­heur, une fois, de crois­er le poète Jean-Luc Max­ence, auteur de ces lignes, sen­ti­ra com­bi­en ces mots ne sont pas de vains mots. C’est un des mon­des de la poésie qui vit ici.

Bien sûr, citer le nom de tous les poètes présents en cet athanor n’est pas pos­si­ble, on me par­don­nera donc de citer ceux-ci : Al Ham­dani, Allix, Banc­quart, Boulanger, Boulic, Bre­ton, Caroutch, Cazenave, Cer­be­laud, Chatard, Cros­nier, Daguet, Dan­ny-Marc, Dauphin, Del­bourg, Engel­bach, Benoît d’Entrevaux, Gar­nier-Duguy, Gio­van­noni, Gras­set, Héroult, Lesieur, Mai­gre, Mam­bri­no, Yves Mrtin, Max­ence, Pelon, Pfis­ter, Reuzeau, Ros­nay, San­da, Selos, Sigaux, Siméon, Simonomis, Sor­rente, Sueid, Tan­nery, Tarpin­ian, Tau­rand… Et bien d’autres. Ceux qui con­nais­sent un peu la poésie française con­tem­po­raine auront sen­ti l’importance de la paru­tion d’un tel vol­ume : c’est, pour repren­dre l’ex­pres­sion de Paul Ver­meulen,  de poésie des pro­fondeurs dont il s’agit ici. 

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