Avec son titre évocateur à susciter la pensée soudaine, Domi transcende l’intense dans l’infime.
Les corps participent grandement au décor, avançant sur la pointe des pieds des non-dits :
Devrai-je apprendre un jour/ à avancer sur les mains/ dans ce monde qui marche sur la tête.
C’est que l’écoute, avec en bruit de fond l’acouphène, doit se concentrer sur l’essentiel quand, ventriloque, l’âme de la poète « lève l’ancre du cri ».
Toujours prête pour une sorte d’envol perpétuel, la poète achève parfois de jouer la fille de l’air dans les mots tactiles à l’environnement et aux saisons, offrant au lecteur « cette aube (qui) se remplit de soleil/ comme une tasse à thé ».
Domi Bergougnoux, Dans la tempe du jour, Éditions ALCYONE, logo de couverture de Silvaine Arabo, janvier 2020, 41 pages,15 euros.
Consciente de sa précarité et de celle d’autrui, elle remet les pendules à leur juste place d’éternité avec cet espoir « d ’habiter le mystère de l’eau/ de la graine et du fruit », se rappelant alors sans doute le geste premier de la naissance ou même de la Genèse qui donne vie, prise de conscience et responsabilité.
Références gardées de belle mémoire à son premier recueil (« Où sont les pas dansants »), la poète illumine ses réflexions plus récentes à se faire microsillon, toutefois lumineux, dans le chant très expressif d’une réalité poétique fortement ancrée dans une démarche décisive à se rendre heureuse parmi les autres avec également cette belle évocation du bonheur voulu dans son actualité personnelle : « De son souffle sauvage/ elle démêla l’instant ».
Derrière ce caractère fort, pleurer n’est pas de mise puisqu’ « Il est temps/ d’additionner les soleils ».
Voici donc son volontaire optimisme organisé dans le sens des rayons solaires resplendissant dans « la tempe du jour ».
Le titre même du recueil suggère cette sorte d’emprise de la lumière dans la réflexion tout en évoquant une certaine fragilité à préserver un endroit sensible de l’individu.
Le détail d’un cil ou d’un grain de sable suffit à l’auteur pour émoustiller son regard de poète :
« Elle s’agenouille/ dans la fraîcheur/ des aubes et des ruisseaux ». On la devine vouloir partager cette joie avec quelque chose de décisif, une intention inaltérable d’être non seulement au monde mais aussi de résorber tout ce qui ferait de l’ombre à cette joie qu’elle veut communicative puisqu’« Il s’agit de cueillir/ tous les chants d’oiseaux/ et de les coudre à l’envers du jour ».