Il man­quait une hirondelle
pour écrire notre histoire

 

C’é­tait ça donc ! Grisé j’é­tais, sur le dos de l’hi­ron­delle depuis le début de ma lec­ture ! J’avais bien sen­ti le vent de la vitesse, comme si j’é­tais moi-même la source aux caress­es de l’herbe du ruisseau.

 

Par longue pluie

La riv­ière
se cabrait se cambrait

 

Même les galets roulent dis-tu sans fin jusqu’à la mer. Est-ce ain­si que femme rêve ? me souf­fle ce livre. Où l’homme est l’autre. Où l’aimé revient à chaque page, à chaque galet blanc à ne pas semer. L’homme à ne rien per­dre. L’homme, loin des chemins du temps. L’homme pas dans pas, trem­pé dans la source, à ne surtout pas perdre.

Estelle Fen­zy, Le chant de la femme source, Edi­tions L’Ail des ours, juin 2020.

 

 

 

Je suis l’in­croy­able faim la dévoration

 

Et tout le reste est har­monie, luxe, calme et volup­té ! Comme sur ce lit de poème, on dévore avec toi, l’amour de la langue, chère Estelle !

Je t’écris d’un jardin de 6 heures. Avec dans les frondaisons des deux érables pour­pres qu’ont plan­tés autre­fois deux insti­tu­teurs amants, le chant amoureux des pigeons de juil­let. Le parc approche le jour. L’été s’a­vance. Les jeunes, sûre­ment, mal­adroits, ont quit­té le nid. Mais le chant per­dure. Plus haut encore, sûre­ment ? L’amour se riant de l’automne.

 

Je t’appelle d’une époque 
anci­enne au sor­tir de l’été

 

Tu te deman­des si vous avez bâti ce roy­aume, et pour le con­stru­ire encore tu vers­es les ven­dan­ges… qui font tourn­er la tête. Est-ce bien cela, femme, que tu cherch­es, que tu trou­ves ? Comme à l’écri­t­ure, poète, tu décou­vres ton poème ?

Que tu trou­ves. As trou­vé. Et sous ta nudité offerte, ton cœur bat. Vient alors offerte la fer­veur des mots sim­ples, la pal­pi­ta­tion du poème qui avance la vie, tant à rebours qu’à futur. L’un et l’autre dans l’ab­solu qui sauve et bâti le monde. Dans l’e­spérance aus­si de l’éter­nel sillage.

 

M’en­tends-tu
 Je chante un impens­able hiver

Ma voix claire

 Se déploie dans le jour

 

Le livre est court mais pré­cieux à rester sur ce vers qui dit au-delà et dans nous-mêmes, la source, la femme, le jardin, et les mots pour le dire :

 

le nom de l’eau qui jaillit

 

Présentation de l’auteur

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Serge Prioul

Serge Pri­oul vit dans l’est Bre­tagne, près de Fougères où il est né en 1955. Issu d’une famille de tailleurs de pierre, il est tou­jours resté très attaché aux valeurs sim­ples de la terre et du tra­vail. Très vite, il fait la ren­con­tre de la femme de sa vie, Régine. Tous les deux tra­vail­lent pen­dant 25 ans dans une entre­prise tex­tile. Et leur quo­ti­di­en sera fait de cette vie de tra­vail manuel et de loisirs sim­ples. A l’aube de ses quar­ante ans, une mal­adie, puis la guéri­son qui s’en suit, lui pro­posent, sans jamais renier le passé, d’écrire sa nou­velle vie sur d’autres tableaux moins noirs. L’essen­tiel de ses études reste ses lec­tures, et les poètes qui jalon­nent sa vie par­lent sim­ple­ment des choses sim­ples : Ponge, Guille­vic, Fol­lain ou Cen­drars, mais aus­si des écrivains comme Duras ou Rilke dont il appré­cie les écri­t­ures dépouil­lées. Tou­jours il appelle à la langue à laque­lle il est si attaché, celle de Mon­taigne ou de Vil­lon. Celle de Voltaire à Flaubert en pas­sant par Molière, Mau­pas­sant, Hugo ou Ver­laine. Il cite sou­vent Aris­tote qui dit : « Tu recon­naî­tras la vérité du chemin à ce qu’il te rend heureux », et trou­ve indis­so­cia­ble cet essen­tiel de sa démarche lit­téraire, de ces hasards, qui n’en sont pas sou­tient-il, hasards des ren­con­tres lit­téraires et cul­turelles de l’existence. Tout comme, sans cesse, dans sa vision poé­tique, la présence de sa femme et la notion de cou­ple. En 2012, Serge Pri­oul fait la con­nais­sance de la poète Sylvie Durbec. Une nou­velle ren­con­tre fon­da­trice. Sylvie écrit d’une façon pour lui neuve, dont il se sent proche, et qui l’amène une nou­velle fois à trans­former son style et à l’inscrire encore plus dans le quo­ti­di­en, pour lui un mot et un élé­ment fon­da­men­tal ! En 2014 Serge Pri­oul pub­liera les Car­nets du Bar­roso, 31 poèmes, hymne à l’amour sur fond de fresque du Trás os Montes, une région mon­tag­neuse du nord du Por­tu­gal. En 2017, revenant sur une vie de tra­vail et tou­jours d’amour, il écrira Faute de preuves, un long recueil comme un regard sur hier et aujour­d’hui. Serge Pri­oul dit tou­jours qu’il a beau­coup de chance, que les choses lui vien­nent parce qu’il les aime. Et qu’il a su trou­ver les pas­sages et surtout faire demi-tour sur les chemins jamais écrits.