Claude Louis-Combet : “Le nu au transept”.
Comment écrire la contradiction entre la foi et la tentation, entre le vœu de chasteté et le désir charnel ? Comment incarner ce qui n’est qu’une abstraction ? Claude Louis-Combet imagine un dispositif fictionnel qui lui permet un récit plausible placé sous le signe de la psychologie des profondeurs. Deux vieux amis, ayant connu la même éducation religieuse, contemplent après avoir dîné, la reproduction d’une œuvre de Gustave Courbet, La Baigneuse à la source, contemplation qui va être le prétexte pour celui qui est devenu prêtre, de raconter à l’autre (qui a abandonné le projet d’accéder à la prêtrise), un souvenir remontant à sa jeunesse. Réalité ou, plus vraisemblablement, fantasme ? Peu importe, le dispositif est efficace, servi par la langue précise de Claude Louis-Combet.
Joseph, le prêtre, fait son service militaire à Bourges où il fréquente assidûment la cathédrale pour assister aux offices ou pour se recueillir. Jusqu’au jour où, sortant de la cathédrale, il est suivi, dit-il, par une femme entièrement nue. L’apparition va se reproduire régulièrement jusqu’à la fin de ses obligations militaires sans que jamais il ne cède à la tentation, se reproduire dans divers lieux de la cathédrale (un confessionnal, une chapelle funéraire avec un gisant, sur une croix…), les scènes érotiques variant à chaque fois dans une folle subversion…
Le texte de Claude Louis-Combet n’est que prétexte à une interrogation/description des profondeurs de l’être croyant. On devine qu’il n’y a là nulle gratuité, nulle complaisance car la biographie de l’auteur nous apprend qu’il a renoncé à la prêtrise, qu’il a refusé l’amour divin pour des amours plus terrestres. Le Nu au transept, s’il est une exploration de la psychologie des profondeurs telle que Jung a pu la théoriser, est aussi une exaltation de la femme et de l’éros. Claude Louis-Combet prête à son personnage une expérience mystique qui est la sienne, celle qu’il a menée jusqu’au bout : la femme n’est pas une créature lubrique mais la “détentrice d’un noyau de mystère dont la révélation était essentielle pour la connaissance de soi” (p 57). Ce qui peut paraître blasphématoire aux yeux d’un croyant mais qui n’est que la ferme contestation de l’anathème jeté sur la femme par la religion (les religions ?), anathème qui n’est qu’une erreur inscrite historiquement tant le désir et la jouissance sont des éléments constitutifs de l’être humain. Le problème alors est de savoir ce que l’individu fait de ce désir, ce qu’il en fait de socialement acceptable à un moment donné de l’Histoire, de socialement et d’individuellement utile… On comprend alors que dès les premiers mots de son récit Claude Louis-Combet parle de “théologie de la subversion”.
À la nécessaire impudeur des descriptions dues à l’auteur correspondent les photographies d’Yves Verbièse qui ponctuent le récit, images caractérisées par la surimpression de fragments érotiques apparaissant sur des vues de sculptures religieuses ou de mobilier cultuel. Le contraste et la convergence présents dans les photographies soulignent bien l’ambiguïté des propos de Joseph tout comme ils mettent en relief le côté équivoque de ce qui est rapporté : réalité ou fantasme ? L’éditeur rappelle que Claude Louis-Combet avait consacré son Chemin des vanités aux photographies d’Henri Maccheroni (qui a réalisé environ 2000 clichés du sexe d’une femme) et c’est après la découverte de cette œuvre qu’Yves Verbièse envoya à Claude Louis-Combet cette suite de photographies qui impressionnèrent fortement l’écrivain puisqu’il rédigea rapidement Le Nu au transept… Ce qui éclaire la genèse de l’œuvre.
Le Nu au transept est un livre qui met en évidence que l’on sait peu de choses sur l’homme et son fonctionnement. Tout au plus, quelque chose comme l’écume d’une vague du grand océan… Une écume que se disputent les psychologues, les économistes, les religieux et autres spécialistes auto-proclamés… L’étrange est que ce soit par l’expérience mystique que l’on parvient à en savoir un peu plus. Étrange ? pas tant que cela, puisqu’il existe des mystiques sans dieux…
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Claude Louis-Combet, Le Nu au transept, avec des photographies d’Yves Verbièse. L’Atelier contemporain éditeur, 96 pages, 15 €. En librairie.
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Jacques MOULIN & Ann LOUBERT : “Portique”.
Ce livre de Jacques Moulin se présente comme un ensemble de cinq poèmes en prose, sans ponctuation et se donnant pour objectif de décrire, de la façon la plus objective qui soit, l’activité portuaire et plus particulièrement celle des portiques qui chargent et déchargent les conteneurs… Ballet aérien qui dessine sur le ciel d’étranges signes qui se matérialisent et se figent sur la plate-forme du porte-conteneurs ou sur le quai… Le texte grouille, on passe d’un groupe de mots à l’autre sans transition et, pourtant, la réalité décrite diffère à chaque fois : “Docks dockers Groupage dégroupage Boîtes à déplacer comme rochers tombés de cargaisons lointaines”. Cette fragmentation du texte n’est pas sans rapports avec l’activité des portiques du port : l’ensemble peut donner une impression de pagaille, de désordre, cent objectifs divers étant poursuivis en même temps.
Chaque “strophe” est précédée d’un dessin d’Ann Loubert. Ce qui frappe, c’est le fort contraste entre le poème (cet ensemble de groupes de mots juxtaposés) et le dessin. Autant le premier est vivant, traversé de bruits et de mouvements, autant le second est statique, vide… Le premier est traversé par l’homme (le “portiqueur”, ainsi appelle-t-on sur les quais le conducteur de cette étrange machine), les lumières : “gyrophares falots projecteurs”, les sons : “cages à poules qui crient” ou “le cri du i des poulies”, le souffle : “Le portique a poitrail de taureau et souffle sa vigueur à la face du monde”… : tout est dit, rien n’échappe à Jacques Moulin qui écrit ainsi le poème du portique. Tandis qu’Ann Loubert dessine cette machine en un instantané vide de tout humain : les quais se réduisent à un jeu de lignes : droites, brisées, horizontales, verticales, obliques, courbes parfois ou arrondies (pour simuler le mouvement ?)…
Il faut aussi remarquer que le format du texte est à l’image du conteneur, rectangulaire tout comme le livre revêt un format à l’italienne. Lointaine évocation d’un spatialisme tempéré ? Remarque qui nous amène à évoquer l’exposition, Traits communs, d’Ann Loubert et de Clémentine Margheriti et à dire deux mots du catalogue édité par L’Atelier contemporain lors de cette exposition qui s’est tenue à Paris du 14 octobre au 2 novembre 2014. David Collin y écrit : “Dans le travail d’Ann Loubert le blanc a autant d’importance que le trait. Et parfois davantage”. C’est le cas ici dans ce livre rare.
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Jacques Moulin & Ann Loubert, Portique. L’Atelier contemporain éditeur, 64 pages (imprimées sur une seule face), 10 €. Dans les excellentes librairies ou sur commande via le site www.r‑diffusion.org
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Michel DUNAND : J’ai jardiné les plus beaux volcans.
Ce livret se présente sous la forme d’un carnet à la réglure Seyès. Ce n’est pas imprimé mais ça reproduit (sans doute en offset) la calligraphie appliquée d’un écolier (trop ?) sage. On pense immédiatement à des notes prises au jour le jour au cours de voyages ou lors de la fréquentation d’œuvres de l’esprit (romans, poèmes, peintures…). Deux carnets semblent composer ce recueil atypique. Le premier se donne l’apparence d’un carnet de route en Amérique (USA, Mexique, Haïti, Amérique latine, Cuba…), le second est plus européen. Mais s’agit-il de voyages réels ou imaginaires à travers peintres et poètes ? Je pencherai plutôt pour un mixte des deux interprétations car Michel Dunand passe aux aveux dans la dernière page : il affirme “laisser, le plus souvent, la parole à certains de [ses] compagnons de route, ou de [ses] guides”. C’est donc un homme de parti-pris qu’on trouve dans ces notes ; ainsi pour la partie américaine, le lecteur découvre les poètes de la beat génération, Hemingway, Bukowski et quelques autres ou les peintres Hopper, Basquiat… C’est plus un autoportrait de Michel Dunand (une façon originale de se dire à travers les autres) que la description, forcément limitée, d’un continent. Mais le lecteur peut légitimement s’interroger : fait-on vraiment le nécessaire pour éradiquer la misère ? Ou le système politico-économique en place n’en produit-il pas en continu ? Au fur et à mesure que certains échappent à cette misère dont parle si bien Guillevic dans Gagner ? Je ne tiens pas ces propos, à charge contre Dunand puisqu’il remarque à la fin d’une page : “San Francisco / 52000 sans abris / en 1999”. Il serait sans doute intéressant de savoir combien il y en a en 2015… Même s’il est prompt à dégainer contre les erreurs passées de certains : après avoir défini, non sans un certain humour noir, Staline comme le père idéal, il écrit : “Les saints ont parfois du sang sur les mains”, après avoir vu L’autoportrait avec Staline de Frida Khalo… Le portrait de Dunand est donc complexe…
Et surtout, comment comprendre ce conseil “Verrouillez très attentivement votre inconscient” ? Le peut-on ? Ces carnets sont une invitation à la méditation. Dans un temps de vitesse folle… Vers quoi court-on ?
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Michel Dunand, J’ai jardiné les plus beaux volcans. Érès éditions, collection Po&Psy, non paginé, 10 €. (Sur commande chez l’éditeur : 33 av Marcel Dassault. 31500 Toulouse).
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Alain MARC : “Chroniques pour un poésie publique” précédé de “Mais où est la poésie ?”
Dés 1990, Alain Marc forge le concept de poésie publique. À partir de 1996, il commence à écrire des chroniques qui seront publiées dans la revue Contre Vox… Jusque 2000, cinq chroniques paraîtront ainsi dans ce périodique, avant que les quatre premières ne soient rééditées sous forme de tracts qui seront distribués lors de diverses manifestations ou envoyés à quelques poètes, pendant une dizaine d’années. C’est dire qu’Alain Marc est avant tout un militant qui ne se contente pas de déplorer, comme beaucoup de poètes, la désaffection du public pour ce genre littéraire. La réunion en un volume de textes écrits sur plusieurs années et traitant de sujets différents rend difficile la lecture de“Chroniques pour une poésie publique”. Mais cette lecture reste stimulante de la première à la dernière page. Et s’il fallait résumer l’ensemble par quelques mots, ce serait : “J’hésite d’ailleurs à me présenter comme poète tellement les images que véhicule ce mot sont désuètes”.
L’ouvrage est divisé en deux parties. La première, intitulée “Mais où est la poésie ?” reprend les cinq chroniques données dans Contre Vox, neuf articles très divers (du plagiat opéré par un chanteur qui connaît le succès à la situation éditoriale de la poésie) et les échos d’un premier débat dont une partie a été publiée à la fin des années 90 (cf p 223, Préalables). La seconde regroupe une sorte de journal fait d’un montage de réflexions, de citations et de bribes plus ou moins courtes… C’est classé en six ensembles de longueur variable (de 4 à 40 pages) et s’étalant sur des périodes allant de 7 à 25 ans. Et c’est complété par un article de 1991, “Une poésie publique est-elle possible ?” qui reprend sous une forme synthétique les éléments abordés auparavant. C’est dire que ce livre témoigne d’une longue réflexion et qu’il mérite attention.
La poésie publique serait, selon Alain Marc, la solution à la désaffection signalée précédemment. À la double condition, précise l’auteur, qu’une nouvelle thématique exprimant les préoccupations actuelles du plus grand nombre (le chômage, l’écologie, les injustices, la misère, les guerres, le racisme…) soit exploitée par des poètes de plus en plus nombreux d’une part (mais reste le problème de la façon d’aborder ces thèmes et reste encore à définir le rapport de cette nouvelle poésie avec la poésie des profondeurs) et que, d’autre part, de nouvelles modalités de diffusion de la poésie voient le jour. Comme la lecture publique par exemple, si les poètes savent éviter les travers de la lecture telle qu’elle est pratiquée habituellement par les poètes eux-mêmes et une nouvelle façon d’aborder l’édition (cibler le public, éviter les tirages luxueux et les grands papiers, renoncer à la page quasi vierge qui a tendance à devenir un tic d’écriture…). Les deux conditions sont souvent liées. Alain Marc pourfend surtout l’hermétisme et le “haut langage” dans lesquels se complaisent trop de poètes, le fonctionnement de ces derniers en cercle fermé (qui écrivent pour leurs semblables). Etc. On ne peut qu’adhérer à de telles revendications tant les constats qui les sous-tendent sont partagés.
On reste impressionné par la quantité d’informations traitées par Alain Marc et par la diversité des citations si bien que l’on est quelque peu gêné car il y a toujours quelque chose qu’on n’a pas lu ! Mais ce qui est dit ou cité de Maïakovski, d’Aragon (“il faut s’adresser à des millions d’hommes”), de Sartre (qui pose les bonnes questions sur la poésie), de Dylan Thomas, de Pasolini… est remarquable et bien sot celui qui ne partagerait pas ces propos. Si le concept de poésie publique est attirant, on peut se demander si celle-ci est suffisante pour effacer le divorce entre le public et la poésie. Et ce, pour diverses raisons. Tout d’abord parce qu’un lecteur potentiel sur deux ne lit pas un livre par an ! Ensuite et en vrac : la poésie publique réussira-t-elle à contrer l’aliénation des esprits ? La culture n’est-elle pas une arme pour vaincre l’aliénation (même si Gramsci et Bourdieu ont mis justement en garde les citoyens contre tout angélisme) ? Que le poète ne sache pas produire une marchandise vendable appelle cette question : et si la société tout entière tournée qu’elle est vers le profit rapide poussait les citoyens/consommateurs vers des produits flattant les instincts qu’elle présente comme les seuls légitimes ? Et si la poésie devenait un moyen de combattre l’aliénation ? Etc.
Pour résumer en raisonnant… Dans son interrogation sur les rapports entre la poésie et la science, Alain Marc fait un parallèle entre poésie et résistance que lui inspire l’ouvrage de Jacques Gaucheron.. Il en extrait une phrase qui décrit bien, semble-t-il, la situation : “encore aujourd’hui sans doute est-il des esprits qui ne conçoivent pas qu’il puisse exister une poésie en-dehors du courant spiritualiste”. Certes. Mais depuis longtemps la poésie n’existe plus, il n’existe que des poésies. L’analyse que fait Alain Marc du livre de Gaucheron est juste et bonne à entendre. Mais cela n’explique pas la désaffection du public à l’égard de la production poétique dont une part échappe à ce que dénoncent Jacques Gaucheron et Alain Marc. En poursuivant le raisonnement de ces derniers, on en arrive à la politique qui est alors responsable de cet état de fait. Les politiques (c’est-à-dire les partis de gouvernement) acceptent le capitalisme avec le résultat que l’on sait au moment des élections : l’alternance pour que tout reste pareil… Mais le règne de l’argent s’est étendu : on ne crée, on ne vend que ce qui flatte les besoins élémentaires des humains. Quelle est la place de la poésie dans ce monde ?
Ou, pour dire les choses autrement… C’est pendant l’occupation nazie que la poésie s’est développée en France jusqu’à atteindre un niveau qui ira decrescendo ensuite. La poésie de contrebande parlait clairement (bien qu’elle fût cryptée) à tout un peuple. En Union Soviétique, de la mort de Staline à l’implosion du pays, la poésie s’est imposée jusqu’à connaître un succès populaire (Evtouchenko, Voznessenski…). Depuis, avec les oligarques, la vague est retombée ; on connaît l’anecdote : les Moscovites achetant des revues pornographiques dans le métro. Tout ça pour en arriver là ! D’où cette hypothèse qui mérite d’être examinée de près : la poésie ne peut trouver son public que dans des conditions historiques particulières. Il y aurait encore bien des points qui interrogent à relever dans le livre d’Alain Marc comme cette condamnation de la mise en chansons de poèmes dont Aragon disait qu’elle constituait une “forme supérieure de la critique poétique”. Jean Ferrat, en particulier, s’attire les foudres d’Alain Marc, Ferrat qui, avec quelques autres, a contribué à faire descendre la poésie dans la rue et à faire qu’elle passe à la radio… De même, sans un Bernard Ascal (dont Alain Marc dit que son travail “nuit à la poésie”), combien d’auditeurs ignoreraient cette “critique” singulière de la poésie ? On peut donc ne pas partager tous les jugements et points de vue d’Alain Marc sans pour autant rejeter ses constats et ses démonstrations… Ce qui met en évidence le mérite de son ouvrage : il suscite la discussion et la recherche de solution(s).
“Pour une poésie publique” est un livre rare et à défendre pour les problèmes qu’il aborde. Il appelle implicitement à une réflexion collective. Le changement n’est sans doute pas pour demain mais nul ne peut se satisfaire de la situation actuelle des poètes et de la poésie. Mais ce changement n’est-il pas lié à un changement politique en profondeur, à une remise en cause radicale du capitalisme qui, s’il perdure, continuera à produire les mêmes effets, peut-être même en pire ? Le débat est ouvert…
NB : Pourquoi avoir imprimé en aussi petits caractères ce livre ? Sa lecture est un véritable calvaire pour ceux dont la vue baisse : les lunettes ne font pas de miracles !
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Alain Marc, “Chroniques pour un poésie publique” précédé de “Mais où est la poésie ?”. Les Éditions du Zaporogue, 236 pages, PNI.
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Jacques AUDIBERTI : “Le globe dans la main”.
Jacques Audiberti, qui connut le succès au théâtre dans les années 50–60 du siècle dernier, est bien oublié de nos jours. Même la chanson de Claude Nougaro reste méconnue… Pourtant son œuvre est considérable et en 1952 il élabora l’abhumanisme avec l’écrivain italien Beniamino Joppolo et le peintre Camille Bryen : mais cette “doctrine” est ignorée aujourd’hui de la plupart des lecteurs. Dans un ouvrage portant ce titre (Gallimard, 1955), il définit l’abhumanisme de la manière suivante : “C’est l’homme acceptant de perdre de vue qu’il est le centre de l’univers. Et peut-être aussi qu’il n’est plus le centre de l’univers”. L’homme n’a donc plus la primauté dans le cosmos : si cette remarque ne fait plus hurler actuellement, c’est qu’elle est largement partagée par une grande partie de la population sensible aux thèses écologiques pour ne citer que ces dernières. L’écologie ne proclame-t-elle pas que ce qui importe c’est la nature ? L’homme est devenu coupable de tous les maux qui mettent en danger la planète : l’homme alors qu’il s’agit d’un système économique ! Thèses qu’il ne faut donc pas confondre avec le capitalisme vert car dans cette expression il y a le mot capitalisme et tout ce que cela suppose en termes de course au profit et de la place de l’homme comme maître du monde… Mais cela mériterait une longue discussion ; place donc à Audiberti.
Le Globe dans la main donne à lire cinq des articles qu’écrivit Jacques Audiberti pour le projet d’encyclopédie qu’avait l’éditeur Joseph Foret. Les deux premiers textes, L’amour et La médecine, paraîtront respectivement fin 1950 et au printemps 1951 sous forme de fascicule d’une trentaine de pages ; mais l’entreprise s’arrêta là. Les trois autres textes, La guerre, La science et La politique, ne parurent pas, ce sont donc des quasi-inédits retrouvés dans les papiers de Jacques Audiberti (quasi parce que, écrit Bernard Fournier, repris peu ou prou dans les œuvres ultérieures d’Audiberti, notamment dans L’Abhumanisme) ; ce qui fait l’intérêt principal de cette édition… Bernard Fournier, qui est le président de l’Association des Amis de Jacques Audiberti, dans son avant-propos très détaillé raconte la genèse de cette encyclopédie incomplète et analyse brièvement les cinq textes d’Audiberti…
L’amour offre une vision iconoclaste des choses à travers les travaux cités (Frazer, S de Beauvoir) et les exemples analysés (Héloïse et Abélard, Maria Goretti) : le point de vue est sérieux, mais c’est pour mieux démonter les relations amoureuses et désacraliser ces fameux rapports et la procréation. D’ailleurs le ton est sarcastique à souhait : “On se marie, c’est juré, croix, crachat, tant pis pour la carpette” ou “… les spermatozoaires […] avec une tête vrilleuse et une queue gouvernante, se précipitent dans une rivière de liquide blanc (tous les spermatozoïdes, même des Noirs, sont de race blanche) vers la terre de Canaan, la riche Lombardie, la matrice femelle. Ces lurons ont leur Moïse, leur Bonaparte, leur champion de plat ventre. C’est celui d’entre eux qui, le premier, parvient à l’ovule. Il s’y enfonce.” L’homme est ainsi remis à sa juste place. D’ailleurs Fournier résume bien le style d’Audiberti : “… un style à nul autre pareil, fait de lyrisme mâtiné de trivial dans des phases méandreuses…” .
Jacques Audiberti s’insurge contre une médecine qui ne ferait que réparer ce que l’incurie des hommes a provoqué. Le texte est éblouissant d’un savoir dans lequel Audiberti nage comme un poisson dans l’eau, mais cette documentation extraordinaire dépasse l’entendement du lecteur qui, souvent, est submergé… Jacques Audiberti se gausse de certaines tendances de la médecine qui, pour éradiquer les maladies, interdirait bien aux patients potentiels de naître ! Encore une fois, tout cela ne va pas sans humour : “La médecine militaire ne commence à se réhabiliter qu’à l’instant où elle se préoccupe enfin d’empoisonner pharmaceutiquement l’ennemi ou de le volatiliser électroniquement. À Hiroshima […], elle barre d’un seul coup des dizaines de milliers de candidatures à la tuberculose ou à la salpingite, sans parler des entorses éventuelles ou confirmées” ou à propos des microbes “Très amusant, de penser que Léon Gambetta, par exemple, quand à la tribune il parlait ou le maréchal de Saxe, à l’instant de manager sa petite amie, ils étaient, l’un et l’autre, farcis de ces gigantesques animaux se livrant à leurs trafics propres…”
Que dire des autres textes, sinon qu’ils se lisent avec le même bonheur tant l’écriture est jubilatoire, Audiberti n’épargnant rien. Et surtout pas, dans La guerre, la folie guerrière des hommes qui est sans fin puisque la guerre renaît sans cesse quelque part dans le monde et surtout, aujourd’hui, alors que l’industrie de l’armement est florissante et nécessaire à la survie des pays industrialisés c’est-à-dire à celle des marchands de canon ! Les premières pages de La guerre sont prophétiques : elles semblent avoir été écrites aujourd’hui.
Bernard Fournier souligne dans son Avant-Propos qu’Audiberti pense que la science ne peut être autonome : “L’idée tient mal, d’une science qui régnerait par elle-même, féconde et pourtant purissime, escaladable quoique inviolée”. Ces lignes ont été écrites il y plus d’un demi-siècle ! Et pourtant, aujourd’hui, la science, dans ses différentes déclinaisons (sciences dures, sciences humaines, économie, etc) prétend à la vérité — via les journalistes aux ordres — pour mieux asservir les chers auditeurs, les chers téléspectateurs, les chers lecteurs à… quoi donc ? Je le laisse deviner… L’écriture d’Audiberti dans La science est très cultivée parce que truffée de références aux différentes cultures qui existent à la surface de la planète. Mais Jacques Audiberti reste très circonspect à l’égard de ces cultures car il n’a en tête que l’abhumanisme (une doctrine parmi d’autres). Cependant, la méfiance qu’il exerce à l’égard de Lénine ou du Capital de Marx n’est pas sans poser problème : est-ce ainsi rédhibitoire de s’appeler Lénine plutôt que Guizot par exemple, d’avoir lu Le Capital plutôt que Maurras ? C’est la question qu’on peut se poser de nos jours… Qui a lu Marx aujourd’hui parmi ceux qui plastronnent à la télévision ? Dois-je le dire : j’ai lu Marx (pas dans sa totalité) mais aussi ses opposants. Jacques Audiberti ne le dit pas : quelle est l’infériorité congénitale du matérialisme historique ? “L’idée tient mal d’une science qui régnerait par elle-même, féconde et pourtant purissime…”. Certes, c’est là une condamnation sans réserves des prétentions de la science… Mais Audibert ajoute de suite : “Le professeur Langevin s’empressait à mettre la sienne, de science, sous le patronage du matérialisme historique, c’est-à-dire d’un dogme religieux gouvernemental”. (Comme si la libre entreprise et la course au profit n’étaient pas des dogmes religieux gouvernementaux !). Certes, mais cette attitude n’empêcha pas le dit professeur d’être à l’origine du plan Langevin-Wallon… qui ne fut jamais appliqué et dont certains se réclament encore aujourd’hui pour justifier leurs luttes. Alors ? Que penser ? Certes encore, les propos d’Audiberti sont datés. Mais peut-être faut-il se souvenir de Thomas Kuhn et de sa philosophie des sciences : l’évolution de ces dernières est discontinue ; dès lors qu’une théorie ne peut expliquer un phénomène quelconque, il y a changement de paradigme… Et la nouvelle théorie permet d’expliquer le phénomène qui résistait à l’interprétation. Et jusqu’au moment où apparaîtra un nouveau phénomène inexplicable… La science n’est donc pas indépendante des croyances sociales ! Alors il ne nous reste plus qu’à douter de tout ou à adhérer à l’idéologie dominante (qu’elle soit scientifique ou politique). La vie étant finie alors que la théorie est infinie (à l’échelle de la vie humaine !), il ne resterait plus qu’à lutter pour améliorer le sort des pauvres humains que nous sommes en doutant du bien-fondé des solutions proposées ; de quoi devenir schizophrène… On se prend alors à regretter que l’Encyclopédie d’Audiberti soit demeurée inachevée : qu’aurait-il écrit ?
Paradoxalement, La politique est un texte qui attire pour sa verve langagière et qui repousse pour son contenu idéologique. Audiberti ne fait pas la différence entre l’URSS et Marx ; le pouvait-il à l’époque où ce texte fut écrit ? Mais il y a plus grave, si Jacques Audiberti condamne les USA, il ne condamne pas explicitement le capitalisme théorique. Ce mélange de rhétorique (“… le Bien et le Mal, qui se disputent les petites filles, nos âmes”) et d’analyse (“Cependant, les Expositions Universelles, grandioses revues bourgeoises de l’ingéniosité humaine voisinent avec la misère et la cruauté”) ne convainc pas. Mais Audiberti a l’intelligence de refuser d’être “du côté du bien” ; parce qu’il n’y a ni Bien ni Mal… Ce qui reste à voir ! Et c’est là que son talent éclate : “Troisième terme, allons, montre toi ! Que le génie de l’indifférence militante, honneur, ou déshonneur, de Valéry, se manifeste en son absurdité”. Les obscurs, les sans-grades, les mal-nés sont-ils condamnés à toujours subir, à toujours connaître la misère ou les fins de mois difficiles ? Le développement sur le droit de vote et l’abstention qui en découle a du moins le mérite de rappeler que l’abstention est un acte politique de défiance face aux institutions car, le soir des élections, on ne comptabilise pas les votes nuls ou blancs et les abstentions comme des expressions politiques, ce qui donne aux suffrages “exprimés” des % faramineux. Je ne suis pas loin de penser, comme Jacques Audiberti, que “la littérature demeure la constance de la France et sa carte maîtresse”.
Voilà qui nous ramène à l’abhumanisme qui n’a jamais réussi à changer le monde) ! Jacques Audiberti a‑t-il raison ? Je l’ignore mais ce livre a des fulgurances qui parlent à l’homme d’aujourd’hui comme celle-ci “… il résulte, des règles actuelles du loto urinaire, qu’un parti, plus il a de voix, moins il a de sièges”. À quand la proportionnelle ? Voilà qui rappelle ce que disait Louise Michel : “Les bulletins de vote emportés par le vent avec les promesses des candidats ne valent pas mieux que les sagaies contre les canons. Pensez-vous, citoyens, que les gouvernements vous les laisseraient si vous pouviez vous en servir pour faire une révolution ?”. Il ne faut pas oublier la faculté du système capitaliste à récupérer les pensées les plus radicales, dès lors qu’il peut en tirer profit… Ces textes iconoclastes de Jacques Audiberti sont une invitation à repenser notre humanité, notre culture, notre société… Du travail reste à faire même s’il est à redouter que chacune et chacun prennent dans ces textes des bribes pour les conforter dans leurs croyances. C’est dire qu’une vraie lecture du “Globe dans la main” reste indispensable.
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Jacques Audiberti, “Le Globe dans la main”. Editions Le Bateau ivre, 232 pages, 18 €.
Chez Recours au Poème éditeurs, Lucien Wasselin a publié : Aragon / La fin et la forme, collection L’Atelier du Poème, 2014
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- Geneviève Raphanel, Temps d’ici et de là-bas - 19 octobre 2017
- Eric Brogniet, Sahariennes suivi de Célébration de la lumière - 19 octobre 2017
- Laurent Albarracin, Cela - 7 octobre 2017
- Place de la Sorbonne n° 7 - 2 octobre 2017
- Chiendents n° 118, consacré à Marie-Josée CHRISTIEN - 30 septembre 2017
- Fil de lecture : autour des Éditions L’Herbe qui Tremble - 30 septembre 2017
- CHIENDENTS n° 109, consacré à Alain MARC. - 2 septembre 2017
- Fil de lecture autour d’Henri MESCHONNIC, de Rocio DURAN-BARBA, de Marianne WALTER et de Joyce LUSSU - 2 septembre 2017
- Tombeau de Jointure (100) - 31 mai 2017
- POSSIBLES, et INFINIE GÉO-LOCALISATION DU DOUTE n° 2 & 3 - 31 mai 2017
- La nouvelle poésie mexicaine - 24 mai 2017
- Fil de lecture de Lucien WASSELIN - 19 mai 2017
- Actualité éditoriale de Sylvestre Clancier - 30 avril 2017
- Un éditeur et ses auteurs : les Éditions Arfuyen, avec NOVALIS, Marie-Claire BANCQUART, Cécile A. HOLDBAN. - 24 avril 2017
- Diérèse 68 et 69 - 24 mars 2017
- Un éditeur et ses auteurs : L’HERBE QUI TREMBLE avec Isabelle Levesque, André Doms, Pierre Dhainaut, Horia Badescu, Christian Monginot. - 21 février 2017
- Fil de lecture autour de Michel DEGUY, Patricia COTTRON-DAUBIGNE, Serge PEY, Mathias LAIR, et David DUMORTIER - 25 janvier 2017
- Fil de lecture de Lucien WASSELIN : une éditeur et ses auteurs, LA PASSE DU VENT - 21 décembre 2016
- Rectificatif de Lucien Wasselin à propos d’une critique parue dans le numéro 168 : - 29 novembre 2016
- Fil de lecture de Lucien WASSELIN : Un éditeur et ses auteurs, les éditions ROUGERIE - 16 novembre 2016
- Anne MOSER & Jean-Louis BERNARD, Michèle DADOLLE & Chantal DUPUY-DUNIER - 30 octobre 2016
- Fils de Lecture de Lucien Wasselin : éditions des Deux Rives, J.POELS, A. HOLLAN, W.RENFER - 20 septembre 2016
- Fil de lecture de Lucien WASSELIN : ARFUYEN — SPIRITUALITÉ et POÉSIE. - 25 juin 2016
- Fil de Lecture de Lucien WASSELIN : sur Jeanine BAUDE - 15 mai 2016
- Fil de Lecture de Lucien WASSELIN - 3 avril 2016
- Questionnements politiques et poétiques 2 “Les Orphées du Danube” - 4 mars 2016
- FIL DE LECTURE de Lucien Wasselin : Baldacchino, Garnier, Grisel - 8 février 2016
- Fil de Lecture de Lucien Wasselin : Nouveautés de L’Herbe qui tremble - 7 janvier 2016
- Jacques VACHÉ : “Lettres de guerre, 1915–1918”. - 5 décembre 2015
- Eugène Durif : un essai provisoire ? - 1 décembre 2015
- Fil de lecture de Lucien Wasselin : Actualité des Hommes Sans Epaules Editions - 23 novembre 2015
- Fil de lecture de Lucien Wasselin : autour de la Belgique - 11 novembre 2015
- Fil de lecture de Lucien Wasselin : Le Castor Astral a quarante ans - 3 novembre 2015
- Phoenix n°18 - 3 novembre 2015
- Fil de Lecture de Lucien Wasselin : Luca/Pasolini/Siméon - 26 octobre 2015
- Pierre GARNIER : “Le Sable doux” - 26 octobre 2015
- Fil de Lecture de Lucien Wasselin sur : A.Costa Monteiro, G. Hons, C. Langlois, J. Roman - 8 octobre 2015
- INUITS DANS LA JUNGLE n° 6 - 21 septembre 2015
- Fil de lecture de L.Wasselin : Abeille, Althen, Walter - 14 septembre 2015
- Deux lectures de : Christophe Dauphin , Comme un cri d’os, Jacques Simonomis - 24 août 2015
- Fil de lectures de Marie Stoltz : Hennart, Laranco, Corbusier, Maxence, Bazy, Wasselin, Kijno - 11 juillet 2015
- Fil de lectures de Lucien Wasselin : Louis-Combet, Moulin et Loubert, Dunand, Marc, Audiberti - 5 juillet 2015
- Christian Monginot, Le miroir des solitudes - 22 juin 2015
- Jean Chatard, Clameurs du jour - 22 juin 2015
- Contre le simulacre. Enquête sur l’état de l’esprit poétique contemporain en France (3). Réponses de Lucien Wasselin - 21 juin 2015
- EUROPE n° 1033, dossier Claude Simon - 14 juin 2015
- Yves di Manno, Champs - 14 juin 2015
- Jeanpyer Poëls, Le sort est en jeu - 14 juin 2015
- Jean Dubuffet et Marcel Moreau, De l’art brut aux Beaux-Arts convulsifs, - 23 mai 2015
- Mathieu Bénézet, Premier crayon - 10 mai 2015
- ROGER DEXTRE ou L’EXPÉRIENCE POÉTIQUE - 10 mai 2015
- Jacques Pautard, Grand chœur vide des miroirs - 17 avril 2015
- Patrick Beurard-Valdoye, Gadjo-Migrandt - 29 mars 2015
- François Xavier, L’irréparable - 15 mars 2015
- Fernando Pessoa, Poèmes français - 1 mars 2015
- Paola Pigani, Indovina - 1 février 2015
- Michel Baglin, Dieu se moque des lèche-bottes - 1 février 2015
- Didier Guth & Sylvestre Clancier, Dans le noir & à travers les âges - 18 janvier 2015
- Jean-Baptiste Cabaud, Fleurs - 6 décembre 2014
- Sylvie Brès, Cœur troglodyte - 30 novembre 2014
- Sombre comme le temps, Emmanuel Moses - 16 novembre 2014
- Zéno Bianu, Visions de Bob Dylan - 9 novembre 2014
- Marwan Hoss, La Lumière du soir - 19 octobre 2014
- Michel Baglin, Loupés russes - 13 octobre 2014
- Abdellatif Laâbi, La Saison manquante - 13 octobre 2014
- Deux lectures de Max Alhau, Le temps au crible, par P. Leuckx et L. Wasselin - 30 septembre 2014
- Porfirio Mamani Macedo, Amour dans la parole - 30 septembre 2014
- Chroniques du ça et là n° 5 - 2 septembre 2014
- A contre-muraille, de Carole Carcillo Mesrobian - 25 mai 2014
- Hommage à Pierre Garnier - 6 février 2014
- Sous la robe des saisons de Philippe Mathy - 29 janvier 2014
- Sub Rosa de Muriel Verstichel - 20 janvier 2014
- Comment lire la poésie ? - 19 janvier 2014
- Au ressac, au ressaut de Roger Lesgards - 6 janvier 2014
- Sous la robe des saisons de Philippe Mathy - 31 décembre 2013
- L’instant des fantômes de Florence Valéro - 23 décembre 2013
- La proie des yeux de Joël-Claude Meffre - 27 novembre 2013
- Bestiaire minuscule de Jean-Claude Tardif - 19 novembre 2013
- Après le tremblement, de Jean Portante - 18 novembre 2013
- Aragon parle de Paul Eluard - 10 novembre 2013
- Facéties de Pierre Puttemans - 4 novembre 2013
- La tête dans un coquillage de Patrick Pérez-Sécheret - 26 octobre 2013
- À vol d’oiseaux, de Jacques Moulin - 22 octobre 2013
- Vaguedivague de Pablo Néruda - 16 octobre 2013
- Mare Nostrum - 4 octobre 2013
- Rudiments de lumière, de Pierre Dhainaut - 15 septembre 2013
- Et pendant ce temps-là, de Jean-Luc Steinmetz - 15 septembre 2013
- Mémoire de Chavée - 30 août 2013
- Marc Porcu, Ils ont deux ciels entre leurs mains - 12 août 2013
- La chemise de Pétrarque de Mathieu Bénézet - 12 août 2013
- NGC 224 de Ito Naga - 6 août 2013
- LES ILES RITSOS - 7 juillet 2013
- Les Sonnets de Shakespeare traduits par Darras - 30 juin 2013
- Séjour, là, de JL Massot - 7 juin 2013
- Archiviste du vent de P. Vincensini - 27 avril 2013
- Mots et chemins - 8 mars 2013
- Passager de l’incompris de R. Reutenauer - 2 mars 2013
- Tri, ce long tri - 15 février 2013