Tu veux mimer une saison morte
être un bois flotté sur une plage en hiver
un grincement de porte, une couleur sur un mur qui ne sépare pas
ce qui est là pour être là
que rien ne traverse
arrière-pays qui ne manque à personne
mais dont l’absence mutilerait l’apparence du monde.
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À portée du temps
tu façonnes un lieu avec des mots
couverts du silence des rivières
boisés comme un rêve en novembre
où le seuil est une ombre qui danse
dans l’espace mesuré d’une page non écrite
et tu attends, errant,
que l’encre bleue de l’enfance se lève
et vienne mourir sur les fleurs de ta tombe.
∗∗∗
Tu trembles d’un incessant refrain
qui du dedans cherche une fenêtre
au bord de ton corps grillagé
tu ne vois plus ni la tourterelle
ni le visage des saisons ni le garçon qui t’appelle
du fond de sa forêt
prisonnier d’un printemps sans oiseaux
tu te répètes comme cette goutte
dans le ventre de l’évier
automate rouillé criant au bord du vide.
∗∗∗
Tu sens l’odeur chaude de la pierre
prêt à te brûler aux ailes de l’été
dans la chambre moite
un après-midi de sable
emplit ton sommeil
une gorgée de bleu comme une griffe
dans une carrière d’ombres
tu te délectes – animal assoiffé de feu !
Tu saisis toute la densité du temps
sincère intervalle
où passe
l’impeccable clameur de ton être
renonçant à vivre ou à mourir.
∗∗∗
On t’a parlé une langue de sable
tu as su l’aube, le vent, la dune
le ciel à côté du ciel réparer la beauté
et cette main errante
dans l’abîme du jour
cherchant un reste de nuit
au fond d’un sarcophage.