Gérard Bocholier, Psaumes de la foi vive

Le poème prière

L’actualité de Gérard Bocholier est importante et porte sur deux livres de poésie publiés ce printemps, dont l’un est produit par l’éditeur Ad Solem, qui est connu pour son travail autour de la poésie en lien avec la spiritualité.

C’est ainsi que les Psaumes de la foi vive couvrent un volume de poèmes que je crois pouvoir séparer en différentes liturgies : la liturgie de la Toussaint, la liturgie de Pâques, de Noël et de l’Épiphanie, et pour finir le rituel de la prière ou une adresse à la mysticité. D’où  l’impression persistante de lire une sorte de « poème-prière »qui offrirait la satiété et une espèce de fin appelée ici : une foi vive.

Oui, on assiste tout au long du livre à une spiritualisation du monde que le poème rend accessible, à la confiance dans une certaine religiosité d’un homme évoquant Dieu ou la mort, Dieu ou l’amour, Dieu ou l’incarnation.

Psaumes de la foi vive, Gérard Bocholier,
éd. Ad Solem, 2019, 16€

 

 

Déliez toutes mes entraves
Tout croyant est un nomde
En route vers la naissance
En route vers ton étable

Tu es le mendiant qui marche
Le sable vêtu de vent
La pluie au cœur du jasmin
La neige fleurie d’étoiles

 

Cette conversation anagogique constituée d’éléments relevant de la métaphysique intime du poète, se charge néanmoins de la réalité physique en tant que preuve supplémentaire pour croire et espérer, pour croire et prier. Le poème ainsi agrandit le monde à la mesure de la divinité- foi qui n’oublie pas l’homme et sa quête - en une sorte de carême nerveux que libère la forme poétique, et nous laisse entrevoir comment croire est mieux une question qu’une réponse, une éthique de l’humilité plutôt qu’un lien comptable et intéressé au divin. L’évocation, du reste, des Évangiles, et assez peu de l’Ancien Testament, est le plus souvent une appropriation du monde par le livre, où le monde est saisi par la poésie. Gérard Bocholier suivant à sa manière l’œuvre fine et sacrée de l’Évangile, arrive devant le texte en demandant l’essentiel, en regardant vers le meilleur de soi, sans appuyer sa vraie connaissance du Texte par orgueil ou facilité de la pensée.

 

Encombré comme je suis
Par tant de feux et de cendres
Pourrai-je faire une place
Àton amour infini  ?

Il te faut si peu de place
De la paille un bout de table
Dans une auberge la nuit
Le creux dun cœur misérable

 

Et que cela soit le Christ jardinier du poème, le Christ àla souffrance de la croyance, seule importe la prière en son parachèvement mystique. L’espoir d’une vie après la mort, qui se traduit surtout par un espoir en la résurrection, c’est la survie la plus haute du croyant. Le poète doit donc donner corps et contour, grâce à l’espoir pur dans un ciel sans ombre, à l’adresse dès lors d’une plainte d’amour.

 

Ma vie aura ressemblé
À la roseraie dautomne
Des parfums des feuilles mortes
Des mains de soleil et dombre

Jai fait la même réponse
Jusquau bout veilleur infirme
Au jardin de ton angoisse
Tu sais bien que je taimais

Présentation de l’auteur

Gérard Bocholier

Gérard Bocholier est né en 1947 à Clermont-Ferrand, il a fait ses études dans cette ville où il a ensuite enseigné la littérature française en classe de lettres supérieures. Originaire d’une famille de vignerons de la Limagne et franc-comtois par sa mère, il a passé son enfance et sa jeunesse dans le village de Monton, au sud de Clermont-Ferrand, qu’il évoque dans son livre Le Village emporté, paru en 2013 aux éditions L’Arrière-Pays.

En 1971, il a reçu des mains de Marcel Arland, directeur de la NRF, le prix Paul Valéry réservé à un étudiant. La lecture de Pierre Reverdy, à qui il consacre un essai en 1984, Pierre Reverdy le phare obscur (Champ Vallon) détermine définitivement sa vocation de poète. Il commence à publier des volumes de vers aux éditions Rougerie, le premier : Le Vent et l’homme en 1976. Cette même année, il participe à la fondation de la revue de poésie ARPA, avec d’autres poètes d’Auvergne et du Bourbonnais, dont Pierre Delisle, qui fut un de ses plus proches amis.

Gérard Bocholier

D’autres rencontres viennent éclairer sa route : celle de Jean Grosjean, puis de Jacques Réda, qui l’accueillent dans la NRF, où il publie des poèmes et où il devient chroniqueur régulier de poésie à partir des années 90. Il rencontre aussi Anne Perrier, grand poète de Suisse romande, avec qui il noue une amitié affectueuse et dont il préface les œuvres complètes en 1996 aux éditions de l’Escampette.

Il remporte le prix Voronca en 1979, pour Chemin de guet, puis le prix du poème en prose Louis Guillaume en 1987 pour Poussière ardente (Rougerie). En 1991, le Grand Prix de poésie pour la jeunesse du Ministère de la jeunesse et des sports lui est décerné pour un manuscrit de poèmes pour enfants qui sera publié en 1992 dans la collection du Livre de poche chez Hachette, sous le titre : Poèmes du petit bonheur.

Devenu directeur de la revue ARPA, il collabore également comme critique de poésie à La Revue de Belles Lettres de Genève, au Chemin des livres, à Recueil puis au Nouveau Recueil. Il rassemble certains de ses articles dans un essai, Les Ombrages fabuleux, aux éditions de L’Escampette en 2003. Il participe à plusieurs ouvrages collectifs, dont les cahiers 10 et 17 au Temps qu’il fait, consacrés à Pierre-Albert Jourdan et à Roger Munier. Deux livres de poèmes pour la jeunesse sont encore publiés, aux éditions Cheyne, illustrés par Martine Mellinette : Terre de ciel  et Si petite planète.

Il entre dans la prestigieuse collection des éditions Arfuyen en 2006 avec La Venue et en 2012 avec Belles saisons obscures.  En 2011, son livre de vers et proses, Abîmes cachés (L’Arrière-Pays), est couronné par le prix Louise Labé. Son engagement religieux se fait plus direct , il se consacre essentiellement à l’écriture de psaumes à partir de 2009 et publie chez Ad Solem : Psaumes du bel amour (2010), préfacé par Jean-Pierre Lemaire, et Psaumes de l’espérance (2012), avec un envoi de Philippe Jaccottet, récompensé par le prix François Coppée de l’Académie Française. D’autres livres de psaumes sont prévus chez le même éditeur. Un essai paraît en 2014 chez Ad Solem : Le poème exercice spirituel.

Il tient une chronique de lectures, Chronique du veilleur, depuis 2012, sur le site de Recours au poème.

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