Germain Roesz, La collerette était rouge
Germain Roesz est plasticien, il sait donner du corps à la langue ; ici égrenée sous forme de distiques dans un format à l’italienne, 6 centimètres de haut, 20 de large, que l’on feuillette et c’est comme un kaléidoscope. Soit le récit d’une agonie à peine suggérée.
Ce qui en est dit :
La main tremble
Dans la main qui tremble
L’un s’en va, l’autre ne sait plus s’il a froid, faim…
Je vois flou
Ce sont tes larmes
Germain Roesz, La collerette était rouge, coll. Bas de page, éd. Les Lieux-Dits, 50 pages, 6 €.
La confusion est une fusion. L’un s’en va, l’autre ne sait plus où il en est… L’ensemble énoncé avec pudeur : cette intimité a une valeur universelle. La mort d’un proche a pour effet de nous décaper, ne subsistent que les mots clés, juste le nécessaire ; sauf à jouer les pleureuses, les pleureurs, ce n’est pas le genre de Germain Roesz, qui connaît une curieuse inversion des rôles :
La main tient les barreaux
D’un berceau de vieillard
En position de soignant, même si nous sommes cantonnés au rôle d’un accompagnateur impuissant, nous nous retrouvons en position parentale. Est-ce nous, redevenus petit enfant, qui partons avec lui ? Sans doute quelque chose de nous s’évanouit avec lui. Déjà, nous ne sommes plus dans son regard. Et puis…
Je caresse la joue
chaude encore
Le lecteur n’a pas à redouter un texte triste, qui mettrait le bourdon. Nous sommes au-delà de ça…