Giovanni Pascoli, une traduction inédite : Le 10 Août (élégie)

Jean-Charles Vegliante nous offre la première traduction française de Pascoli depuis 1925 (Editions Mimésis). Voici une occasion unique de revisiter l’œuvre d'un annonciateur de notre modernité. Poète du début du vingtième siècle, grâce à son travail sur la forme, il offre au lyrisme de nouvelles voies d’expression. Une traduction sensible qui rend compte de la musicalité de la langue, des emplois syntaxiques et du vocabulaire propres à Pascoli. Jean-Charles Vegliante restitue la particularité de l’œuvre de ce précurseur de la poésie moderne, autant pour ce qui concerne la forme que la nature des sujets abordés. Découvrir l’œuvre de ce grand poète et la version française de ses vers est  aussi l’occasion de considérer le travail du traducteur, qui, lorsqu’il s’inspire de l’esprit de l’auteur absorbe la singularité de son style et participe de la création poétique.

 

 

                    X Agosto

 

San Lorenzo, io lo so perché tanto
     di stelle per l’aria tranquilla
arde e cade, perché sì gran pianto
     nel concavo cielo sfavilla.

Ritornava una rondine al tetto:
     l’uccisero: cadde tra spini:
ella aveva nel becco un insetto:
     la cena de’ suoi rondinini.

Ora è là, come in croce, che tende
     quel verme a quel cielo lontano;
e il suo nido è nell’ombra, che attende,
     che pigola sempre più piano.

Anche un uomo tornava al suo nido:
     l’uccisero: disse: Perdono;
e restò negli aperti occhi un grido:
     portava due bambole, in dono...

Ora là, nella casa romita,
     lo aspettano, aspettano, in vano:
egli immobile, attonito, addita
     le bambole al cielo lontano.

E tu, Cielo, dall’alto dei mondi
     sereni, infinito, immortale,
oh! d’un pianto di stelle lo inondi
     quest’atomo opaco del Male!

 

                                G. Pascoli, “Elegie”, Myricae, 1897    

        

 

                    10 août

 

Saint Laurent, moi je sais pourquoi tant
    d'étoiles parmi l'air tranquille
brûlent, tombent, pourquoi pleur si grand
    dans le ciel concave étincelle.

Une hirondelle au toit revenait :
    tuée, tomba dans les épines ;
elle avait dans son bec un insecte :
     assez pour que ses petits dînent.

La voilà, comme en croix, or qui tend
    ce vermisseau au ciel lointain ;
et son nid est dans l'ombre, il attend,
    pépiant toujours mais pour rien.

Un homme revenait à son nid :
    on le tua ; il dit : Pardon ;
dans ses yeux grand ouverts reste un cri
     il avait deux poupées en don…

Or là, dans la maison solitaire,
    on l'attend, on l'attend en vain ;
droit immobile il montre la paire
    de poupées à ce ciel lointain.

Et toi, Ciel, qui surplombes les mondes
    sereins, infini, immortel,
oh ! d'un pleur d'étoiles tu l'inondes
    cet opaque atome du Mal !

 

Pascoli, Myricae (éd. 1897, 30 ans après l'assassinat de son père)

 

 

 

Traduction non comprise dans L’impensé la poésie, Jean-Charles Vegliante, éd. Mimésis 2018.
Sur l’élégie de Pascoli, voir aussi sur Poezibao

 

 

Présentation de l’auteur

Giovanni Pascoli

Giovanni Pascoli (né le 31 décembre 1855 à San Mauro di Romagna dans la province de Forlì-Cesena en Émilie-Romagne, Italie - mort le 6 avril 1912 à Bologne) est un poète italien de langue latine et italienne.

Œuvres

  • Myricae 1891 (1re édition])
  • Carmen « CORDA FRATRES » (1898)
  • Canti di Castelvecchio (1903)
  • Primi poemetti (1904)
  • Poemi conviviali (1904)
  • Odi e inni (1906)
  • Nuovi poemetti (1909)
  • Poemi del Risorgimento (1913)

Traductions

  • Poèmes traduits en français par J.Ch. Vegliante (2009)

Sources Wikipedia

Giovanni Pascoli

© Crédits photos : Wikipédia

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