Haïkus : Du bleu en tête
Trois femmes pour parler de la mer, des plages et des rivages. Régine Bobée, Chantal Couliou et Choupie Moysan, trois Bretonnes bon teint (elles vivent à Brest ou dans le Morbihan) unissent leurs talent dans un livre de haïkus placé sous le signe du bleu. Celui de la mer déclinée, ici, sous forme de haïkus.
Me voici/la où le bleu de la mer/est sans limite », écrivait le haijin japonais Santoka (1882-1940). Nos trois autrices bretonnes – l’une née à Rennes, l’autre à Vannes, la troisième à Nantes - sont, elles aussi, face à la grande bleue. Elles ne nomment pas les lieux qu’elles épinglent en trois vers. A quelques exceptions près puisque l’on découvre, au détour de certaines haîkus, l’Ile Longue, Houat ou encore la Baie des Trépassés. L’ambiance est, de bout en bout, bretonne mis à part quelques échappées du côté d’Etretat, de Biarritz ou de la mer Egée, ou encore sur le ferry qui mène vers l’Angleterre et ses falaises de craie.
Sur le ferry fou
pris dans la tempête
tituber en crabe∗∗∗
Vent force neuf
rien vu de la traversée
nez dans le sac papier
Régine Bobée, Chantal Couliou, Choupie Moysan, Du bleu en tête, éditions Unicité, 83 pages, 13 euros.
Par touches successives, impressionnistes, nous voici conduits en pays de connaissance vers les plages et les grèves.
Sur le sable mouillé Après la marée
une suite codée coincé entre deux rochers
pattes de mouettes un seau d’enfants
Petite escale, bien entendu, dans les ports de pêche.
Sur le quai désert Sans horizon
dans les casiers à homards le marin échoué au bar
la pleine lune touche le fond
Il peut aussi arriver que la mer envoie ses messagers au creux même de la ville
Sur les trottoirs
querelles de goélands
les éboueurs en grève
Et poursuivons notre chemin avec nos trois Haijins vers les cimetières de bateaux, les sentiers douaniers, les aquariums, les îles et les presqu’îles… Trois vers, l’instant saisi au vol. C’est le haiku, le poème court, la poésie des cinq sens.