I Vagabondi, revue littéraire des deux rives de la Méditerranée
C'est avec plaisir que nous accueillons la naissance de la toute nouvelle revue éditée en Corse par Jean-Jacques Colonna d’Istria et les éditions Scudo. I Vagabondi, revue grand format sous couverture colorée annonçant son ancrage sur les « deux rives de la Méditerranée » se présente comme une revue largement ouverte sur les arts et les cultures. Plus de 70 participations reçues pour ce premier numéro, qui en a retenu 51, dont les auteurs sont présentés d’emblée, avec photo et biographie succinte, juste après le sommaire.
Le titre, ainsi que l'explique Jean-Jacques Colonna d'Istria dans son édito, fait d'abord référence à l’histoire corse, et à « l’accademia di i vagabondi », dont les publications propageaient les idées nouvelles dans tous les domaines, académie créée en 1650 par l’évêque de Nebbio, Carlo Fabrizio Giustiniani, académie reprise en 1749, puis en 1978…
I Vagabondi, revue littéraire des deux rives de la Méditerranée, n. 1, juin 2021, éditions Scudo, 168 p. 20 euros
Mais les vagabonds, précise l'éditeur, ce sont aussi tous les acteurs de la vie culturelle, tous les « non-essentiels », tels qu'ils furent définis durant les confinements, et dont pourtant la société ne peut se passer. Sans oublier les « vagabonds d’âme », tous ceux qui passent d’une forme d’expression à une autre, qu’ils soient créateurs ou lecteurs : c’est donc une revue qui se veut généraliste, et éclectique, toutefois tournée davantage vers les arts liés à l’écriture, visuels ou sonores désormais, grâce au QRcode.
Au sommaire de ce premier numéro, le festival Romain Gary, dont Sarrula Carcupinu souligne, en introduction, le caractère international donné à cet événement sous l'égide d'un auteur multiple à plus d'un titre. A ce projet se rattachent des articles sur la double personnalité Gary-Ajar et une série de beaux portraits, œuvres d'artistes divers, disséminés dans la revue.
Egalement mis en avant, les liens entre Corse et Algérie, pays invité cette année, avec un grand nombre d’articles variés et de photos, mais aussi des poèmes et des calligraphies, dans une belle mise en page graphique et colorée, sur un papier satiné, qui met en valeur textes et images sans les étouffer – et sans transformer la revue en lourd objet de salon difficile à feuilleter.
Outre les dossiers, dont on nous annonce que certains seront récurrents, je découvre un feuilleton, « La Maison sur la mer », et des textes en langue corse , dont les poèmes et traductions par Norbert Paganelli, auquel on doit une brève nouvelle autobiographique émouvante, « Noratlas », évoquant avec un regard d'enfant les années 1958 et 1962 et son parcours de « migrant/réfugié » d'une rive à l'autre de la Méditerranée, de Sartène (en Corse) à Bône et Philippeville, en Algérie. Faute de tout citer je retiens encore la nouvelle de Leïla Sebbar, « Isabelle. Sur la route », qui parle de Bône aussi, avec une évocation d'Isabelle Eberhard, la nomade aventurière, à travers le lien tissé entre elle et le jeune Ahmed, qui deviendra instituteur. Jean-PIerre Castellani affronte de face cette binarité du regard, dan sun article intitulé « Entre Corse et Algérie, Mes vagabondages autour de la Méditerranée », évoquant les tensions entre identités fortes et parfois antagonistes. Parmi les photos, dans leur belle pleine page, un « Dante et l'Enfer » de Jacques Cauda, « L'autre rive » de Patricia Pinzuti-Gintz, l »La vie et la liberté » de Soraya, et la double page graphique de Xavier Dandoy de Casablanca, intitulée « La Corse »... Mais les photos se mêlent aussi aux textes, comme dans « La Mort » poème et photos de Laurent Demartini mis en page par Katia Jannin – quand ce ne sont pas les calligraphies qui envahissent l'espace : ainsi « Spices painting with Trumeric – Spices poem Arabic- French » de Ness, ou le poème d'Amin Khan, « Il faut détruire Carthage », présenté et traduit par Terci Boucebci (dont un poème figure aussi dans ce numéro).
Pour clore ce rapide survol, on ne peut que citer la participation de Danièle Maoudj, « Naître au dialogue, ma Méditerrranée » : c'est ce que propose I Vagabondi, dont le numéro 2 prévoit les thèmes de la sexualité en Méditerranée, et du respect de la nature.