Jacques Rancourt, Suite en rouge mineur
Toute nostalgie est absente du dernier recueil de Jacques Rancourt, Suite en rouge mineur, évocation discrète des rites de passage de l’enfance à l’âge adulte.
Rien de trop appuyé dans ces scènes rétrospectives, présentées en français et en anglais et accompagnées des magnifiques tableaux de Wanda Mihuleac : ceux-ci forment un contrepoint visuel dont l’effet est de souligner le côté dramatique à peine suggéré par le texte. Plusieurs images défilent ainsi sous nos yeux, à la manière d’un lent traveling soutenu par la musique des mots. Ainsi l’éclat des images est-il constamment doublé, mis en sourdine, par le regard distancié du poète. Regard ironique ou tendre, rappelant les anecdotes de la vie courante, les premières amours ou l’éloignement des siens. Ici et là apparaissent les silhouettes de la mère et du père, celle du curé ou de la femme du maire. Jusqu’à la plongée en solitude qui se ponctue par ce constat : « Je n’étais plus que moi ». Expérience de la liberté qui se transforme en connaissance du monde. Cette suite joue avec brio des contrastes entre les propositions picturales et les tonalités plus douces du texte, ici décliné tel une envoûtante mélodie.