Jean Pierre Vidal, Le vent la couleur
Objets d’une publication initiale aux éditions Le Temps qu’il fait, ces poèmes ont longtemps patienté sous le boisseau de l’indifférence avant que Marie Alloy, éditrice avisée, ne les mettent à nouveau en lumière.
Bien lui en a pris car nous voilà du même coup pris dans un exercice salutaire d’introspection désintéressée et tout à fait essentielle, au cours de laquelle le poète ne s’attache qu’à une chose : faire le jeu de l’instant. Autrement dit, c’est bien la question du sens de nos vies et de l’écriture qui est posée, sans autre réponse que le mystère des mots en forme d’ostinato et de résonance à la voix insondable du vent. Jean Pierre Vidal a recours à une grande économie de moyens. Pas d’effets ni de lyrisme, et encore moins d’artifices. Rien que le nécessaire, pour dire toute la précarité de la vie humaine face à ce qui la dépasse. Car ne nous y trompons pas, Vent et couleur / ne sont pas matière de mémoire. Certes. Mais nous nous souvenons / du soleil d’Hiroshima / du vent glacé d’Auschwitz. C’est la dualité du monde qui donne souffle au poème. Le chaud, le froid. L’éphémère et l’éternité. La vie, la mort. Et puis la couleur et le vent qui transcendent toute chose, en tant que métaphores à l’unisson, basses continues de la symphonie du monde et de l’existence. S’il est une chose à retenir, c’est sans doute que Le vent nous dit qu’une digue / doit se rompre en nous, rien de moins. La peur de mourir, le désir d’aimer, la vanité du poète alors que les mots dont il dispose ne sont pas sa propriété ? L’angoisse de la perte de l’âme ? Sans doute, et peut-être bien d’autres choses encore.
Jean-Pierre Vidal, Le Vent la couleur, Le silence qui roule, collection Poésie du silence, 2021, 100 pages, 13 €.
Qui écrit veut se survivre, nous dit Jean Pierre Vidal, tout en soulignant la vanité de l’entreprise. En ayant conscience du poids de l’illusion et aussi de sa nécessité vitale. Interrogation spirituelle ? Avant tout poème, pour dire le désir de vivre et d’être au monde, entre la peinture et le vent, avec au cœur la certitude qu’il n’est pas d’autre voie.