La Lumière du soir, Marwan Hoss
La maison Arfuyen, dont les choix éditoriaux sont toujours d’une grande qualité, a publié en juin dernier le quatrième recueil de Marwan Hoss, La Lumière du soir.
Dès l’incipit se trouve évoquée la douceur du Liban par une écriture à la fois nostalgique et paisible, toute en finesse, dans laquelle les notations les plus simples suffisent à suggérer. C'est " à partir du silence " que le poète affirme vouloir écrire, de l’aube au crépuscule, tout ce qui reste d’une vie, ce qu’il " appelle la mort ". Une volonté d'économie le conduit à créer des textes brefs de trois à quatre vers, à peine plus. Le vocabulaire et la syntaxe sont particulièrement sobres. De là naît, sans aucun doute, l'émotion tout de suite ressentie : "Chaque jour majestueuse / L'aube se lève / Dans un grand rite de lumière ".
Très vite le lecteur s’identifie au narrateur, il est le premier homme, un poète lui-même à la recherche de soi mais aussi de l’âme-sœur : " Pour te retrouver / Il m’a fallu attendre ". Au sein de cette harmonie, écriture et nature sont, dans la sérénité, indissociables et troublées seulement par la venue de la nuit. La vie n'est cependant pas exempte de difficultés et ce sont celles-ci qui " forgent les mots ". La lutte – le poème, est, sur ce thème, " un chant guerrier " – devient heuristique et permet, de plus, la fusion avec l'autre, celle qui est du même sang, qui a le même don et qui se fait messager : " Pour raconter notre histoire / Pose tes mains sur mon front / Et écoute se déchaîner la mer." Il y a, en effet, une récompense à l'attente et ici à celle que proposent les mots quand, ayant trouvé "leur reine", ils aboutissent au " travail de l'écriture ", après " des mois de silence ". C'est alors que peut ralentir la souffrance. C'est alors que malgré la guerre et " les rayons noirs " du soleil qui rappellent la peinture de Pierre Soulages, son grand ami de quarante ans, Marwan Hoss privilégie la vie que " Solitude et tristesse / Cimentent ".
Puis nous est donnée, dans la dernière partie du recueil, la solution paradoxale : " Pour échapper à la mort / Mourir avant. ". Celle-ci est possible quand l'aventure intérieure est prégnante et n'hésite plus à se traduire par l'expression d'un certain lyrisme. L'hommage à la femme aimée n'est pas sans rappeler, avec un lexique très simple et un chant qui seul restera, l'expression de l'agapè du Cantique des Cantiques. Par leur délicatesse certaines images y font également penser : " L'or des mimosas recouvre tes mains ".
Grâce à l'amour humain, à la beauté de la nature étendue à celle du cosmos tout entier, l'écriture de La Lumière du soir peut transcender la mort et offrir à l'écrivain, comme à son lecteur, sinon une vie meilleure, du moins " une mort nouvelle ".