Alain Santacreu, Le clochard sonne

 

Qui t’envisageait, pauvre homme qu’un lampadaire
Grimait ? Quelle paupière céleste palpitait
Sous tes pieds joints, priait ? De quel désir amer,
De quel hier, soupirait ton souffle alcoolisé ?

Ô clown lunaire, vieil archétype banal
De la ville. Pour les gens, c’était carnaval !
Tes paroles en l’air éclataient sous leurs pas,
Toi, l’hâbleur dont les mots s’envolaient sur les toits.

Tu riais, face hideuse aux orbites emmurées,
Clochard, et je me laissais interpeller.
Ta voix, en moi, tinta. Dans l’œil de ton regard

Je revis un enfant sous les traits d’un vieillard.
Tout s’effaça, s’inversa ; il n’y eut plus d’âge :
Le pourtour de tes pieds décalquait mon visage.

 

 

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Présentation de l’auteur

Alain Santacreu

La quête d’Alain Santacreu se joue depuis des années autour d’un mot : contrelittérature. Dans une postface remarquable à un recueil de ses essais, Au cœur de la talvera, Matthieu Baumier a dit de lui : « Le sait-il seulement ? Alain Santacreu est un poète. Je le sais bien moi qui ai reconnu la poésie en l’écriture née du dedans de lui » ; et, plus loin, il ajoute : « Alors, si l’écriture visible de Santacreu s’exprime apparemment en forme d’essai, l’état d’esprit qui anime mots et lettres tracés est cependant celui de la poésie. » La contrelittérature est une poétique, cela est si profondément vrai que la démarche singulière d’Alain Santacreu a parfois recours au poème… 

À lire : Alain Santacreu, Au cœur de la talvera,  (postface de Matthieu Baumier), Arma Artis, 2010.

Site de l’auteur : contrelitterature.com

Alain Santacreu

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