Marc Delouze, La Divine pandémie

Il faut lire « La Divine Pandémie », de Marc Delouze (éditions AEthalidés, 17 €), ouvrage très original et étonnant, au sens où il surprend le lecteur à chaque détour de page.

Marc Delouze pratique avec une facilité apparente la prosodie classique (on trouve dans ce recueil des sonnets parfaits) jusque dans les 70 alexandrins de sa liste de remerciements, véritable performance à noter. D’habitude, j’avoue que cela me désarçonne, mais, ici « ça coule tout seul » et, appliqué à un sujet d’actualité, n’a aucun caractère « vieillot ».

Le plus grand mérite de ces poèmes me semble être de donner à entendre plusieurs voix en écho, plusieurs avis différents concernant cette pandémie, puisque Marc envoyait ses textes à une liste de correspondants réguliers qui lui répondaient, affirmant ainsi une volonté viscérale de partage, de contact maintenu envers et contre tout via la poésie. Oui, nous étions « tous devenus semblablement uniques. »

1 mort + 1 mort + 1 mort
10 morts + 10 morts + 10 morts
100 morts + 100 morts + 100 morts
et des milliers + des milliers + des milliers
on entend on écoute la radio les nouvelles
on s’habitue on s’y attend on espère même :
quel record aujourd’hui ?
qui le détiendra ?

                                   ∗

 Enfin la mort nous parle, enfin nous l’écoutons,
Enfin elle n’est plus ce vaguement peut-être… 

Marc Delouze, La Divine Pandémie, éditions AEthalidés, 128 pages, 17 €.

Toujours guidé par sa volonté de partage, Marc Delouze cite des extraits de « La Divine Comédie » de Dante, Enfer, Purgatoire ou Paradis, et de nombreux poètes comme Gil Jouanard : « Écrire est devenu la seule façon concrète de continuer à respirer au fond de soi-même quand la réalité du monde s’est éboulée sur nos illusions d’enfance » et Bernard Noël, qu'il a bien connu : « pavé de mots pavé de rien / au jour le jour va le chemin / on invente du quelque part ».

Mais revenons aux mots de Marc Delouze qui conclut :

Le virus a écrit mon poème
Le masque sur ma bouche a écrit mon poème
Le silence des rues a écrit mon poème
La plage et le port interdits ont écrit mon poème
Le vent qui à Fécamp dans la nuit du 20 au 21 octobre 2021 a écrit mon poème à la vitesse de 175 km/h… 

Oui, le (les) virus, le dérèglement climatique, notre planète « bousillée ». Et maintenant une guerre de plus dans le monde.

Écrivons, lisons… Il ne restera peut-être pas grand-chose de notre civilisation, comme d’autres avant la nôtre. L’homme est apparu sur terre il y a relativement peu de temps. Animal agressif et capable de détruire son milieu naturel, prendra-t-il conscience des risques qui le guettent ou continuera-t-il à faire l’autruche ?

Bruno Latour, cité par Marc Delouze, écrit :

Pour le dire brutalement / nous ne pouvons pas continuer à croire à l’ancien futur / si nous voulons avoir un avenir. 

Présentation de l’auteur

Marc Delouze

Marc Delouze est un poète et écrivain français né à Paris en 1945. Son premier recueil Souvenirs de la Maison des Mots a été publié en 1971 avec une préface de Louis Aragon.  En 1982, il a créé avec Danielle Fournier l'association Les Parvis Poétiques qui organise des événements, des festivals, des expositions sonores et des lectures-spectacles. Il est également cofondateur de feu le festival Voix de la Méditerranée, (Lodève) et conseiller littéraire du festival C'Mouvoir (Cantal).
Ses poèmes sont traduits en anglais, italien, espagnol, hongrois, russe, serbe, grec, maltais, chinois, arabe, hébreu, macédonien, turc, malayalam (Kérala)... Il se produit le plus souvent en collaboration avec des musiciens, en France (Bertrand Renaudin, les Trois Tambours, Maxime Perrin...) et dans des créations à l'étranger avec des artistes locaux (Kérala, Kosovo, Centrafrique, Belgrade, Budapest...).

Bibliographie 

Poésie

  • Fécamp - Trikala aller-retour, poésies partagées avec Ilias Kéfalas, bilingue grec et français, 2022 (ISBN 978-960-615-492-8)
  • La Divine Pandémie, éditions AEthalidès, 2022 (ISBN 978-2-491517-16-8)
  • Les confins circulaires, sur des dessins de Michel Dejean, éd. Lire-Objet, 2020
  • De rupestre mémoire, conversations avec des tableaux de Jean Villalard et de Patricia Nikols, col. ficelle partagée, Rougier V éd. janvier 2020
  • Deuil du singe, Cahiers du Loup bleu, Les lieux-Dits, 2018 -
  • Petits Poèmes Post-it, Maelstrom éditions, coll. Bookleg, 2018
  • L'invention du paysage, avec des peintures de Michel Déjean, Lieux-Dits éditions, 2016
  • Le chant des terres, La Porte, 2014
  • 14975 jours entre Souvenirs de la Maison des mots et Poésie en phase terminale, la Passe du vent, 2012 (ISBN 978-2-84562-188-6)
  • Yeou - Piéton des terres, poème, la Passe du vent, 2007 (ISBN 978-2-84562-113-8)
  • Épouvantails, poèmes, éditions Lanore - Alchimies poétiques, 2002 (ISBN 2-85157-222-9)
  • T'es beaucoup à te croire tout seul, (poème), La passe du vent, 2000
  • Matière à dé-lire, Messidor/Temps Actuels, 1983 (ISBN 2-201-01637-2)
  • Matière à dire, Fontenay-sous-Bois, 1982
  • S.O.S. Poème en trois mouvements sur Saucerfull Of Secret, du Pink Floyd, Cahier 17 de poésie, revue Europe, 1974
  • Souvenirs de la maison des mots, précédé de : Par manière de testament d'Aragon, les Éditeurs français réunis, 1971

Théâtre

  • Mai68 aussi loin que possible, monologue pour trois voix, préface de Joël Jouanneau, éditions Les Cygnes, septembre 2020.

Récits

  • Chroniques du purin, roman, l'Amourier, 2016 ( (ISBN 978-2-36418-031-4))
  • C'est le monde qui parle, récit, Verdier, 2007 (ISBN 978-2-86432-490-4)
  • L'homme qui fermait les yeux sans baisser les paupières, Le bruit des autres, 2002 (ISBN 2-914461-12-7)
  • rue des martyrs, Le bruit des autres, 2003 (ISBN 2-914461-26-7)
  • Dames de chœur, Le bruit des autres, 2004 (ISBN 2-914461-37-2)

Livres d'artistes

  • Des oiseaux crucifiés dans un ciel de papier, un dialogue avec des encres de Istvan Nayg, éd. Signum, 2022
  • La main des mots griffant la nuit, avec le poète hongrois Tibor Zalan. Sur des peintures d’Istvan Nayg et de Danielle Loisel, éd. Signum, 2020
  • Un homme rien qu’une fois avec Jean-Louis Espilit (Les Rencontres Contemporaines, 2004)
  • Dans la bouche le sable du silence avec Patricia Nikols (Transignum, 2004)
  • Narcisse en Hamlet, avec une encre de Patricia Nikols (éditions Daniel Leuwers, 2007 in Richesses du Livre pauvre Gallimard 2008)
  • Diogène à la lampe borgne (Transignum, 2011)
  • L’aimant du vide attire le silence des formes, poème, aquarelle de Marc Giai-Miniet, Editions du nain qui tousse, 2012
  • Noué, poème, avec une gravure aquarellée de Marc Giai-Miniet, Les éditions du nain qui tousse, 2013
  • Arraché, poème, avec une gravure aquarellée de Marc Giai-Miniet, Les éditions du nain qui tousse, 2013
  • Le sel du silence, poème, avec 21 variations plastiques de Patricia Nikols, Les Cahiers du Museur, coll. A côté, 2016
  • Frontières dépliées, poème sur une peinture de Germain Roesz, Lieux-Dits éd., coll. Les uniques, 2018
  • la pierre, la mer, la parole, 64 variations sur des peintures de Philippe Lepeut, Lieux-Dits éd., coll. Bandes d'artistes, 2018.

Essais

  • La diagonale des poètes (avec Jean-Luc Pouliquen et Danièle Fournier), préface de Henri Meschonnic, La Passe du Vent, 2002, (ISBN 2-84562-049-7).
  • Des poètes aux Parvis, Anthologie poétique, La passe du vent, 2007, (ISBN 978-2-84562-119-0).

Traduction

  • Poèmes de Younous Emre, (avec Guzine Dino), Dessins de Abidine Dino. Publications Orientalistes de France, 1973
  • Incitation au Nixonicide et éloge de la révolution chilienne, Pablo Neruda, Éditeurs français réunis, 1973
  • Anthologie de la poésie hongroise, coédition Corvina (Budapest) et Éditeurs français réunis (Paris), 1978
  • Le chien aveuglé par la lune, Tibor Zalàn, traduction du hongrois avec Jenö Farkas, Palamart, 2017

Poèmes choisis

Autres lectures

Marc Delouze, La Divine pandémie

Il faut lire « La Divine Pandémie », de Marc Delouze (éditions AEthalidés, 17 €), ouvrage très original et étonnant, au sens où il surprend le lecteur à chaque détour de page. [...]